The Embrooks

Free The Embrooks!
Sorti fin 2004 dans l’indifférence quasi-générale, ce troisième album des Embrooks mérite pourtant qu’on s’y attarde un peu : en effet, à l’image de l’excellent deuxième effort de The Bees sorti un peu plus tôt cette année, ce trio anglais nous dévoile dans ce Yellow Glass Perspections un monde musical passionnant au son certes un peu daté mais traduisant leur attirance psychédélique à peine prononcée (voir également la pochette!) pour la si créative fin des années 60.

Ainsi, dès les premières notes de l’ultra-efficace Happy Fickle Girl, les «I Need Your Love/I Need Your Kiss» assénés par le chanteur italien (!) Alessandro Cozzi Lepri nous font faire un grand bond d’une quarantaine d’années en arrière à une époque où les Small Faces, YardBirds ou autres Kinks nageaient en pleine période "mod/freakbeat". Le début d’album franchement impeccable (Francis et The Twisted Musings Of Sir Dempster P. Orbitron (Deceased) ça c’est du titre!) atteint le top avec Back In My Mind qui procure un plaisir jouissif immédiat à quiconque aime la pop acide de qualité.

A l’instar des Detroit Cobras, l’une des particularités des Embrooks est de remettre au goût du jour quelques vieilleries obscures que seuls les initiés fanatiques du courant "mod" reconnaîtront; pas moins de quatre reprises (Francis, Riding A Wave, Feel Like Flying et Children Of Tomorrow) de chansons enregistrées entre 1967 et 1969 (par respectivement Gary Walker & The Rain, Turnstyle, The Attack et Mike Stuart Span pour les passionnés!) sont présentes sur ce disque ainsi clairement ancré dans cette époque.
Mais pas besoin non plus de connaître sur le bout des doigts l’histoire en 69 volumes de l’évolution du rock anglais de sa création à aujourd’hui pour apprécier les chansons intemporelles des Embrooks; en effet, des Kings Of Leon (le couplet de Feel Like Flying aurait-il d’ailleurs inspiré celui de Molly’s Chambers ?) aux Datsuns (le riff principal de A Note In My Drawer), nombreux sont les groupes récents à avoir également affiché des préférences sonores plus anciennes, même si cet album est sans conteste encore moins produit et beaucoup plus pop que ceux des groupes précédemment cités.

Alors certes, la deuxième moitié du disque ne sera pas aussi parfaite et malgré un Show Me A Little Smile impeccable, quelques signes de lassitude apparaissent indéniablement à l’écoute des derniers titres qui tournent un peu en rond, mais l’unité sonore revendiquée par les Embrooks est à ce prix.
Sans aucun effet facile ni single putassier à l’horizon, ce Yellow Glass Perspections s’avère donc au final comme globalement fort efficace et surtout désarmant d’honnêteté; pas de doute, ces Embrooks là n’ont pas grand chose à foutre de la reconnaissance, de la mode (éphémère par définition) actuelle ou du succès commercial mais s’attachent à la seule chose importante à leurs yeux : sortir un bon album de rock n’ roll, à la fois nerveux et mélodique, qui donne du plaisir immédiat à quiconque l’écoute.
Autant dire que la mission est accomplie avec brio.