Robots In Disguise

Riffs enfiévrés, électro-rock déjantée et fougue impeccable, les deux robots de sexe féminin de Robots In Disguise ont tout pour plaire. Seulement voilà, il y a un hic...

On ne peut parler du quatrième album, Happiness V Sadness, de Robots In Disguise sans évoquer l’intenable rivalité qui règne en son antre. Ce quatrième album articulé autour de dix plages minées possède une dualité qui va de son titre jusqu’aux entrailles de ses préceptes. Sans parvenir à capitaliser l’impact de la première partie du disque, à la fois pétillante et acidulée, la deuxième moitié englobe des morceaux nettement plus difficiles à avaler. Pour résumer, si Happiness V Sadness n’est pas exempt ambiguïtés, c’est parce qu’il oscille constamment entre pépites et ratés.

A croire que le titre de l’album était prémonitoire. Côté répartition, c’est la première moitié qui annonce les réjouissances. Tout commence avec Chains et Don’t Go, pas d’une extrême finesse pour le coup mais, néanmoins, véritablement efficaces. On enchaine dare-dare avec des morceaux d’électro-rock imprudents et bruts de brut livrés sans concession à l’auditeur : Hey Watcha Say et Lady & The Flies. En mariant la jovialité de CSS à la naïveté de Le Tigre, Robots In Disguise fait le job : tour à tour furieux, naïf et sexy. Des frappes comme celles-ci devraient être largement suffisantes. Il n’en est rien. Avec une musique sirupeuse, la formation retombe dans ses travers.
Il y a, comme toujours chez Robots In Disguise, ce goût d’inachevé. A vous d’en faire une qualité ou un défaut. Nous concernant, nous préférerons nuancer le propos. Car exprimer l’urgence c’est une chose, la pratiquer jusqu’à l’excès en est une autre. Ici, la rage semble surjouée, pour ne pas dire superflue. Incapable de relever la tête pour reprendre de l’air, Happiness V Sadness sombre dans une succession de titres en cavalcades incandescentes. Cette impuissance a au moins le mérite de nous apporter une réponse à une énigme absurde et post-moderne : quand les robots se déguisent, ils deviennent lourdingues et se fourvoient dans de pauvres exercices de style.

Soyons justes : la courtoisie est une idée usée, aussi vielle que le monde. Les deux amies l’ont parfaitement compris et la détournent dans un style bien à elles dont elles ne dévient pas. Toutefois, la donne ne change pas : inégal et disparate, l’album va-t-il rester dans les mémoires ? On ne se risquera pas à prendre les paris.