Manic Street Preachers

Légitime est la sempiternelle question de l’intérêt d’un Best Of qui, la plupart du temps, n’en a aucun. Alors quid de celui-ci ? Ce que nous proposent les Manic Street Preachers, ce sont trente-huit chansons réparties en deux disques. Vingt-cinq années de carrière résumées en deux heures trente-deux minutes et quarante-sept secondes.

Le concept est simple, National Treasures - The Complete Singles retrace chronologiquement la carrière du groupe par l’intermédiaire de ses singles. Une manière objective de rendre compte de l’histoire. Cependant, les puristes auront vite remarqué les oublis puisque Single Alley, leur tout premier single, sorti en 1986, brille par son absence. On notera également que You Love Us (Heavenly Version) et ceux tirés de Journal For Plague Lovers ont été oubliés. Malgré cela, il semble bien qu’il y ait de quoi manger sur la table.
La rétrospective commence par Motown Junk et le premier album du groupe sorti en 1992, Generation Terrorists, de loin le plus représenté avec six titres, desquels il se dégage une énergie punk, en plus d’une influence Guns N'Roses évidente, le « We destroy rock’n’roll » lancé à la fin de Motown Junk faisant écho au Welcome to the Jungle de leurs cousins américains. Derrière la virilité de leur musique se cache une vraie force mélodique qui transpire du poignant Motorcycle Emptiness ou de Little Baby Nothing, et un engagement politique tatoué à même la peau, à l’image des Clash à qui ils font allusion à la fin de Roses In The Hospital, La Tristesse Durera (Scream To Sigh) ou encore Revol.

La première partie se termine naturellement par Australia et les singles sortis sous Everything Must Go. L’album, auréolé d’un double disque de platine, est le symbole de leur ascension au sommet du rock britannique et la dernière marche avant l’album de la consécration, This Is My Truth, Tell Me Yours, entré directement à la première place des charts en 1998.
Le tube If You Tolerate This Your Children Will Be Next est la juste rampe de lancement pour une deuxième partie où le glam rock sous-jacent des débuts laisse place aux guitares acoustiques et aux mélodies pop extatiques. L’évolution artistique est évidente, en témoigne The Everlasting qui continuera d’en faire frissonner plus d’un avec ses envolées mélancoliques, ou So Why So Sad et son clavecin en filigrane, qui lorgne du côté des Beach Boys période Pet Sounds. Le son est devenu plus mainstream à l’image de Empty Souls que l’on croirait échappé d’un album de U2 que les radios auraient diffusé jusqu’à la couenne. A ce stade, l’absence de titres issus de Journal For Plague Lovers peut s’avérer frustrante quand on sait que l’accueil reçu en 2009 fut plutôt positif. La seule surprise de ce Best Of est le dernier titre, This Is The Day, reprise pas franchement indispensable de The The, qui résume en une phrase l’histoire des Manics : « You smile and think how much you’ve changed ».

De par sa longueur, cette compilation est un peu lourde et difficile à apprécier d’une seule traite. Le concept s’avère malgré tout parfaitement adapté pour quiconque souhaiterait découvrir ces gallois bardés de récompenses, qui affirmaient à leur début qu’un groupe ne devait réaliser qu’un seul album puis se séparer. Vingt-cinq ans et dix albums plus tard, ils doivent sans doute en rigoler.