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Dinosaur Pile-Up

Eleven Eleven

Dinosaur Pile-Up - Eleven Eleven
Chronique Album
Date de sortie : 16.10.2015
Label : So Recordings
4
Rédigé par Hugues Saby, le 28 octobre 2015
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Ça commence de la meilleure des manières. Une batterie sèche et percutante, un riff de guitare sauvage et reptilien… On jurerait entendre du Royal Blood. Puis vient cette voix légèrement nasillarde, presque placide, qui détourne l'attention pour mieux laisser éclater ce « 11 11 ! » puis ce refrain diabolique empestant la gazoline à 300 mètres. Je trouve toujours excessivement réjouissant de prendre une trempe dans la figure dès le premier morceau d'un disque. C'est peu dire que celui-ci nous en colle une sacrée. Une de celles qui remet les idées en place, fait monter l'adrénaline, donne envie de décapsuler une 8-6 avec les dents et de passer la nuit à faire n'importe quoi. Bah oui, c'est un peu basique, mais de temps en temps, ça fait un bien fou. Ce que nous proposent les Anglais, c'est un plaisir immédiat, sans complexe, en clair : une bonne défoule.

Ils ne nous laissent surtout aucun répit, puisque Red And Purple et son intro très Foo Fighters enchaîne pied au plancher, laissant la voie de gauche libre pour le bolide Grim Valentine et son refrain autoroute surjouissif et génial : « I just wanna die / Everytime / You come by /Please be mine / Grim Valentine ». Ils se paient même le culot d'un solo électrique, certes un peu WTF, mais il fallait oser. Et c'est ça qui est bon dans ce disque : Dinosaur Pile-Up sont ce genre de groupes qui ne révolutionneront pas votre discothèque mais risquent bien d'en encombrer les rayons tant leur rock colossal et potache est accrocheur. Autre atout de leur musique : ils nous font revivre, le temps d'une écoute, la liberté et le déchaînement du mouvement grunge avec une sincérité peu courante. Non pas qu'ils soient politisés, messianiques ou je ne sais quoi d'autre comme pouvaient l'être Cobain par exemple, mais parce que bien au contraire, ils semblent se foutre de ce qu'ils représentent. Ils jouent, ça sonne gros, ça rappelle Nirvana bien souvent, mais ça ne va pas plus loin. Et surtout : c'est bon. Qui plus est, leur musique assouvit un fantasme plutôt rigolo : associer le son du trio de Seattle à une voix étrangement similaire à celle d'Anthony Kiedis période fabuleuse des Red Hot Chili Peppers. C'est flagrant sur Friend of Mine et Anxiety Trip, et d'une manière générale tous les passages vocaux calmes, où l'on croit retrouver cet organe frêle et moqueur qui chantait ouvertement ses « fuck you asshole » sur Pea.

Mais ne vous y détrompez pas, si les Dinosaur Pile-Up sont joueurs, ils n'en sont pas moins capables de vous coller au mur en deux-deux. En témoignent les refrains des deux morceaux précédemment cités. Et la plupart des refrains de ce Eleven Eleven d'ailleurs. Le groupe de Leeds maîtrise à la perfection la dynamique quiet/loud, qui si elle peut rapidement être lourdingue chez d'autres formations, donne ici fière allure à l'ensemble de la galette. Les racines grunge sont particulièrement conscientes, (Nothing Personal, Gimme Something, Bad Penny, Crystalline). Sur certains titres, une dimension FM est pleinement assumée (Might As Well), parfois jusqu'à l'excès, notamment sur Cross My Heart, tube calibré pour Virgin Radio, qui vient finalement comme un cheveu sur la soupe. Tout simplement par manque de sincérité. Et c'est cela la force des Dinosaur Pile-Up, mais aussi leur faiblesse. Lorsqu'ils lâchent les chevaux sans souci du qu'en dira-t-on, ils sont invincibles. Lorsqu'en revanche leur musique se fait consciente, réfléchie, le manque d'originalité et d'authenticité se paie cash.

Au final, Eleven Eleven a bien des défauts, certes, mais procure la plupart du temps un plaisir incroyable. Les esthètes, les puristes et tous les gens pénibles qui pensent que la musique appartient à leur opinion étriquée, bien sûr, tireront la gueule à l'écoute de cet album. Les autres, ceux qui font des bornes en bagnole pour aller pogoter entre potes, ceux qui mettent le son très fort lorsqu'ils sont bourrés en soirée, ceux qui sautent partout lorsque le DJ passe du Rage Against The Machine en se foutant bien que les hipsters se foutent d'eux, ceux-là, eux, prendront leur dose grâce à cette musique sauvage, sans prétention, et, oui, émouvante.
tracklisting
    01. 11 11
  • 02. Red And Purple
  • 03. Grim Valentine
  • 04. Friend Of Mine
  • 05. Nothing Personal
  • 06. Anxiety Trip
  • 07. Might As Well
  • 08. Gimme Something
  • 09. Bad Penny
  • 10. Crystalline
  • 11. Willow Tree
  • 12. Cross My Heart
titres conseillés
    11 11, Grim Valentine, Nothing Personal
notes des lecteurs
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