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Douglas Dare

Aforger

Douglas Dare - Aforger
Chronique Album
Date de sortie : 14.10.2016
Label : Erased Tapes
4
Rédigé par François Freundlich, le 21 octobre 2016
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C'est un album mystérieux, voire abyssal qu'est ce Aforger de Douglas Dare, songwriter londonien qu'on a vu tourner avec Ólafur Arnalds ou Nils Frahm, ses compagnons de label. S'il le considère comme son premier disque, un premier essai Whelm, regroupait ses tout premiers morceaux. Mais Douglas Dare va ici bien plus loin en multipliant les expérimentations entre pop néo-classique et électro nappée.

La pierre angulaire de ce disque est le piano, qu'il soit à connotation synthétique ou dans son plus classique appareil. Puis vient cette voix, parfois profonde rappelant un crooner juvénile, parfois maniérée et puissante lorsque elle s'embarque dans des aiguës détonants. On pense parfois à James Blake ou Jeff Buckley, d'autant plus lors des adaptations live habitées récemment aperçues. Les instrumentaux sont quand à eux davantage brumeux que mélodiques, souvent sombres et lancinants ou supplantés par une lourde basse comme sur le single New York ou des cuivres dissonants se rejoignent dans une folie enlevée rappelant The National Anthem de Radiohead. On pense d'ailleurs plusieurs fois au quintet d'Oxford, autant dans les sonorités de la guitare acoustique que dans l'intimisme contemplatif de quelques notes de piano mineures répétées. Vous l'avez compris : la musique de Douglas Dare peut être très complexe, malgré ses textes très directs.

On reste abasourdi par Oh Father, une complainte intime parlant du rapport de son père à sa propre homosexualité. La voix s'y fait grave et solennelle, on y perçoit pleinement toute la torture qu'un enfant peut ressentir lorsque il est rejeté à cause de son orientation sexuelle. Davantage encore sur cette supplication finale : « Oh Father it's not too late ». Les ballades selon Douglas Dare sont hors du temps comme sur la minimaliste The Edge, évoluant comme protégée du monde dans un drap de soie noire et lisse. Tout est y est au ralenti, tout n'est qu'effleurement.
La rythmique synth-pop peut néanmoins prendre le dessus comme sur Binary ou une chorale angélique accompagne un piano lumineux. Les morceaux oscillent entre électronique et acoustique, la voix précieuse semble s'entendre aussi bien avec un ensemble de cuivres qu'un orgue cotonneux ou des beats bruitistes rappelant une BO de film. La noirceur et la mélancolie transpirent de Aforger et Douglas Dare va parfois trop loin dans son personnage écorché, dans ce trop plein de désenchantement et de papillons noirs qui peut parfois nous désabuser voire nous faire lâcher prise. L'homme est pourtant plutôt d'un naturel souriant lors de ses concerts.

Ce disque riche et avant-gardiste fourmille d'idées et Douglas Dare y semble en constante recherche de nouveauté sonore. S'il peut être déconcertant avec ces changements de rythme de tous les instants, il nous marque de par les émotions à vif qui s'en dégagent. A la croisée d'une multitude de styles, on tient l'un des disques OVNI de cette année, libéré de toute étiquette. Libre tout court.
tracklisting
    01. Doublethink
  • 02. Greenhouse
  • 03. Oh Father
  • 04. New York
  • 05. The Edge
  • 06. Binary
  • 07. Stranger
  • 08. Venus
  • 09. Thinking Of Him
  • 10. Rex
titres conseillés
    New York, Oh Father, Binary
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