This Is The Kit

La perle cachée de Bristol a beau s'être installée à Paris, c'est bien dans sa ville natale que ce quatrième album à la saveur estivale a été enregistré. Kate Stables, alias This Is The Kit, sait toujours nous charmer avec sa folk délurée aux orchestrations trépidantes. Elle s'est entourée de John Parish à la production (comme sur son premier album Krülle Bolle) et de Aaron Dessner de The National au piano, à la guitare et aux chœurs sur six des onze titres. Il en ressort un disque paisible mais néanmoins fait d'arrangements complexes.

Si l'on connait This Is The Kit pour sa passion et sa minutie pour les orchestrations folk précises et minimalistes, Moonshine Freeze est marqué pour la première fois par l'utilisation de synthés et de cuivres. Les nappes d'orgues se font quasi-invisibles mais ce coté psychédélique apporte une certaine introspection mystique, en se heurtant aux divagations de xylophones malicieux. Les morceaux partent d'une grande simplicité pour évoluer vers des clameurs étendues et complexes, comme si Stables les débutait seule pour terminer avec un orchestre géant. Les percussions prennent une part importante des arrangements tandis que cette voix mystérieuse semble sucrer l'ensemble, composé de ses acolytes Jesse D. Vernon, Rozi Plain ou Jamie Whitby-Coles. Les violons lancinants de Bullet Proof nous marquent dès l'introduction. Entre relents mélancoliques sur les ballades caressantes, rythmique électrique bluesy sur les passages bruts, This Is The Kit semble évoluer en permanence sans toutefois s'éloigner de sa ligne directrice.

Le titre éponyme Moonshine Freeze est certainement le plus représentatif, nommé d'après un jeu de sa fille qui devait répéter trois fois le mot Moonshine avant de s'immobiliser. La simplicité brute d'une mélodie y explose subitement autour de la voix, pierre angulaire des morceaux. Kate a cette manière particulière de prononcer les syllabes, semblant les stopper net, laissant sa folk lumineuse douce et voluptueuse s'exprimer à son paroxysme. On sent quelques influences de musique cubaines avec ces maracas sur All Written Out In Numbers ainsi que des accointances jazzy dans les instrumentaux cuivrés, comme un solo de saxophone fou sur Hotter Colder. On pense parfois au Hail To The Thief de Radiohead dans ces guitares acoustiques brutes et cette rythmique étouffée ou encore à Sharon Van Etten dans cette tension insufflée, restant dans une certaine introspection. La maîtrise parfaite des orchestrations est prolongée par des chœurs gospel sur Two Pence Piece ajoutant une certaine spiritualité au morceau.

Moonshine Freeze est un album estival et posé, dont on écoutera les petites histoires racontées par Kate en sirotant une mauresque au soleil, pour tenter de se glacer la peau.