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Arlo Parks

Collapsed In Sunbeams

Arlo Parks - Collapsed In Sunbeams
Chronique Album
Date de sortie : 29.01.2021
Label : Transgressive Records
45
Rédigé par Jordan Meynard, le 28 janvier 2021
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Sur la pochette de son album, elle pose l'air assurée et conquérante. Pourtant, Arlo Parks ne se doutait pas qu'elle serait la reine du moment, ni que son poétique single, Cola, sorti en 2018, tournerait aujourd'hui partout en Angleterre, mais également sur les ondes de l'exigeante France Inter en France, pays d'où sa mère est originaire. Une plume qui lui a voulu de gagner de nombreux fans ces derniers mois, dont Billie Eilish, Michelle Obama, Angel Olsen ou encore Florence Welch (Florence + The Machine). Le réalisateur Gus Van Sant a même été séduit par son visage et l'a engagée pour une campagne de publicité. Mais ce joli compagnonnage ne perturbe pas la jeune artiste qui ne considérait pas la chanson comme une ambition première, elle qui se prédestinait à être juriste ou journaliste. Et pourtant, la chanteuse est propulsée sous les projecteurs avec sa nomination au BBC Sound Of 2020 et grâce à son style singulier ; des mélodies sacrées dans un spleen urbain post-adolescent et un flow réconfortant. 


Arlo Parks mêle dans une neo soul délicate son goût transmis par ses parents pour le jazz, la soul vintage et la musique nigériane. Des influences qu'elle mêle avec raffinement et douceur à son R'n'B poétique et activiste. Après ses deux EPs parus l'an dernier, elle sort en ce début d'année 2021 ce premier album, Collapsed In Sunbeams, carcan d'une série de vignettes et de portraits intimes de son adolescence et des personnes qui l'ont façonnée.



L'album s'ouvre sur la chanson-titre Collapsed in Sunbeams, qui tire son nom d'une ligne du roman de Zadie Smith On Beauty, sous forme d'un poème. S'en suit Hurt, un titre d'inspiration soul et R'n'B traitant de la santé mentale et de l'addiction. Ses chansons, comme des nouvelles, décrivent le spleen de la jeunesse blasée de la nouvelle génération. Super Sad Generation justement, l'un des premiers titres d'Arlo Parks, montre cette jeunesse écrasée de désarroi qui va super mal mais se super serre les coudes. Sur Black Dog, elle examine avec empathie la dépression d'un être cher sans passer par la métaphore ou quelconque autre détour, compétence qu'elle a hérité de ses parents : «Nous étions toujours encouragés à parler de nos sentiments. Ce sens de la transparence, ce sentiment d'acceptation inconditionnelle, m'a été inculqué très jeune. Je suis reconnaissante car tout le monde n'a pas ça. Il n'y avait rien qui ait été considéré comme trop petit ou honteux pour être discuté».


Cette ouverture se manifeste dans sa musique et n'élude aucun sujet, de la rupture amoureuse à la bisexualité. Elle lève notamment le voile sur son intimité expliquant avoir compris que sa bisexualité faisait partie d'elle-même. Sa chanson Eugene parle de tomber amoureux d'un meilleur ami hétéro, mais explore la confusion et la jalousie de la situation sans honte ni auto-châtiment. Green Eyes est une chanson d'amour avec une inclinaison LGBT+ rappelant comment l'objet de son affection « ne pas tenir lui main en public / sent leurs yeux juger notre amour et réclamer du sang ». Elle quitte son ambiance R'n'B - jazz habituelle, pour parler de la rupture avec Caroline. Elle entre dans le royaume d'un son plus traditionnel de chanteuse/compositrice borderline folk. La voix douce, chaleureuse et éthérée de Parks posée sur des cordes de guitare dont le son est presque emprunté au rock alternatif des années 90, est au-delà du rêve et de la nostalgie.


Malgré la vérité poignante de beaucoup de ces chansons, la mélancolie est équilibrée par un sentiment d'espoir et de pouvoir, mieux entendu sur le provocant Just Go And Hope, qui promet aux auditeurs : « Vous n'êtes pas seul ». Vous pourriez imaginer que la bande-son qui en résulte est suffisamment solennelle, mais ces chansons bouillonnent et pétillent avec une saveur R'n'B et soul, dont beaucoup rappellent le meilleur de l'époque des années 1990 du genre. Forte d'une culture extra-large (de Fela Kuti à King Krule, d'Otis Redding à Kendrick Lamar), elle marie un sens inné de l'écriture à sa voix spectrale instantanément familière. Cette dernière déborde d'empathie, d'âme et de tendresse, changeant sans effort de cadence en fonction du sujet de chaque chanson. L'album glisse dans un groove émouvant qui change et claque entre le rythme de la salsa et les subtils bruits électroniques de morceaux tels que Bluish, le délicat et scintillant « strumming » de la guitare de Parks, ou le grondement lugubre de For Violet. 


Tout cela en fait une collection de chansons sérieusement rafraîchissante qui ne va que renforcer la réputation de la chanteuse Arlo Parks : celle d'être une voix de sa génération. Incontestablement l'un des premiers grands albums de 2021.
tracklisting
    01. Collapsed In Sunbeams
  • 02. Hurt
  • 03. Too Good
  • 04. Hope
  • 05. Caroline
  • 06. Black Dog
  • 07. Green Eyes
  • 08. Just Go
  • 09. For Violet
  • 10. Eugene
  • 11. Bluish
  • 12. Portra 400
titres conseillés
    Hurt, Black Dog, Green Eyes, Portra 400
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