Modern Nature

Celles et ceux d'entre vous à la recherche d'une échappatoire à la cacophonie des villes, au marasme ambiant, aux klaxons des voitures, à l'odeur de l'asphalte chaude ou au larsen d'une guitare trop proche de l'ampli, devraient sérieusement se pencher sur Island Of Noise, nouvel album de Modern Nature.

Celui-ci agit comme une respiration, une déambulation dans le calme, une bulle d'oxygène au milieu du carcan généralisé. Certes, si vous connaissez déjà le groupe, la description supra ne vous étonnera pas, et vous trouverez dans Island Of Noise tous les ingrédients qui vous font apprécier le travail de composition rurale de Jack Cooper avec cette formation depuis How To Live en 2019. Cette ambiance sylvestre marque au fer la véritable identité du groupe, assumée jusque dans l'artwork de l'album.

Ainsi avec des titres comme Dunes ou le très délicat Bluster, Modern Nature nous ressortent la recette d'une musique éthérée, fluette, aux accents jazzy, loin de toute urbanisation. Il y a un quelque chose qui rappellera aussi certains aspects du krautrock. Mais tout ça n'est pas très bien défini, ce n'est pas clair, et cela rend la musique de Modern Nature particulièrement singulière.
À tel point que parfois, on imagine le groupe tenter des subterfuges pour ne pas tomber dans un schéma qui les ramènerait à une espèce de simplicité qui ne leur sied pas, ou qu'ils souhaitent éviter à tout prix. Le troublant Masque est conforme à cette idée. Même Performance, aux allures plus évidentes, refuse de rentrer dans une case pop trop contraignante et exiguë. C'est plutôt curieux car il y a pourtant de la simplicité chez Modern Nature. Mais elle est dans l'intention, dans la recherche de pureté, pas dans la structure intrinsèque de sa musique.

En définitive, Modern Nature vous invitent à sortir d'une route pour vous amener au plaisir de marcher dans les bois humides. Si la déconnexion est totale, vous n'êtes pas sans repères pour autant car le chemin est tout de même balisé par endroit à l'image de Brigade, qui vous montre la voie malgré ce saxophone espiègle et insaisissable qui virevolte pour attirer votre attention.
Cette dualité est latente tout le long de l'album et confirme Modern Nature comme une entité bien à part. Pourtant, cette balade n'est pas sans risque, et certains sentiers menacent de vous mener à un ennui certain par moment. Parfois, vous vous retrouvez tenaillé par l'envie irrésistible de vite sortir de cette nature morte pour éviter une léthargie qui n'a plus rien d'agréable, comme sur le morceau final Build.

Au final, l'écoute de Island Of Noise nous laisse sur une sensation plutôt insolite et paradoxale. Celle d'avoir expérimenté un voyage assez unique, mais terminé par un retour au réel assez désagréable, comme lors d'une sieste trop longue ou d'un mal de tête latent. Il se trouve que l'effet de surprise ne fonctionne plus vraiment et les effets si stimulants et agréables de l'album précédent semblent désormais évaporés. C'est plutôt préjudiciable, surtout si Modern Nature s'enferment dans une niche dont ils pourraient avoir bien du mal à s'extraire. Et nous faire vite regretter la jungle urbaine...