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Soft Cell

Happiness Not Included

Soft Cell - Happiness Not Included
Chronique Album
Date de sortie : 06.05.2022
Label : BMG Rights Management
35
Rédigé par Bertrand Corbaton, le 5 mai 2022
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Pour certains d'entre vous, le nom de Soft Cell n'évoquera que l'énorme succès commercial de la cover de Tainted Love dans les années 80. Ce titre phare repris par la suite de façon plus ou moins heureuse par divers artistes, et parfois salement amoché (merci Marylin Manson), a permis au duo Marc Almond – Dave Ball d'atteindre une notoriété qu'il n'aurait peut-être jamais connue sans le matraquage de ce morceau électro indus phénoménal.

Mais que connaît le grand public de ce groupe si l'on met de côté Tainted Love ? Pas grand-chose au final. Peut-être Memorabilia, dont l'influence a marqué un nombre conséquent d'artistes de musique électronique. Il faut dire que le dernier album paru date de 2002. Déjà à l'époque, ce Cruelty Without Beauty apparaissait comme un retour assez inattendu, puisque l'album avant ce come-back affichait lui aussi presque vingt ans au compteur (The Last Night In Sodom, sorti en 1984).
Malheureusement, on se serait certainement passé du retour de Soft Cell en ce début d'année 2000, tant Cruelty Without Beauty paraîssait fade et vide d'idées. Cette musique club électro était franchement vulgaire et peu inspirée et ne faisait vraiment pas honneur au duo car ces deux artistes sont réellement des monuments. En dehors de Soft Cell, on ne compte plus les collaborations de Dave Ball, entre Psychic TV ou les Virgin Prunes, l'arrangeur-compositeur a aussi travaillé pour des artistes mainstreams comme Kylie Minogue ou Jimmy Sommerville. Et que dire du chanteur Marc Almond, ce personnage sur lequel le temps ne semble avoir aucune emprise. Lui aussi très proche de la musique industrielle initiée par Throbbing Gristle, puis Coil et Psychic TV, il semble intemporel, évanescent, capable de tout et de toutes les collaborations.

Elles témoignent surtout d'une créativité sans limites et d'une boulimie artistique absolument démentielle. Car le frêle mais charismatique Marc Almond est insatiable, incroyable. Ce passionné de chanson française est capable de s'attaquer à l'œuvre de Jacques Brel, reprendre Aznavour ou Ferré, puis explorer la musique Russe, travailler aussi bien avec Siouxsie Sioux que rejoindre Benjamin Biolay sur scène.
Il faut absolument se replonger dans son Dancing Marquis de 2014 pour saisir l'ampleur et la classe de cet artiste incomparable. Il faudra bien cela car, malheureusement, ce Happiness Not Included ne laisse pas réellement entrevoir tout le talent de Marc Almond, et ne restera pas vraiment comme un élément incontournable dans la discographie de Soft Cell.

Pourtant, dès l'étrange Happy Happy, Happy, il semble évident que Dave Ball est sorti des infernales compositions clubs de Cruelty Without Beauty. C'est déjà une première bonne nouvelle. Même si certains titres comme Nostalgia Machine sont dans une veine plutôt dansante, on est sur des bases beaucoup plus écoutables que vingt ans plus tôt. Surtout, ce n'est pas la ligne directrice de l'album et certains morceaux feront dans une certaine mesure penser au Soft Cell des années 80. C'est parfois assez loupé comme sur Heart Like Tchernobyl, ou sur le menaçant Bruises On My Illusion. Quant à Purple Zone avec les Pet Shop Boys, il ressemble plus à un featuring de Marc Almond sur un morceau du duo Tennant – Low et est au final très dispensable. Malgré tout, on s'en sort plutôt bien par moment à l'image de Nighthawks. Sur le très classieux I'm Not A Friend Of God, on retrouve un Marc Almond sûr de lui et de sa prestance, pour un morceau qui aurait pu se retrouver sur ses meilleurs albums solos.

Certes, on est encore loin de la force des vieux titres de Soft Cell comme Sex Dwarf ou Youth, mais le duo se retrouve tout de même bien inspiré avec le vaporeux Tranquiliser ou Light Sleepers et sa mélodie simple et savoureuse. Si Dave Ball avait évoqué un album minimaliste, certains titres sont pourtant denses, comme sur le final New Eden, calme et ethérée, mais aussi riches de nombreuses textures électroniques. Enfin, les plus nostalgiques du son Soft Cell pourront se consoler avec l'électro froide de Polaroid ou le nerveux et sombre Happiness Not Included au thème prenant.
Bien sûr Happiness Not Included semble totalement hors du temps, et les craintes étaient grandes après le naufrage total de Cruelty Without Beauty. Pourtant, difficile de pas s'enthousiasmer pour ce nouvel album qui sera peut-être le dernier mais clôturera au moins de façon digne la carrière d'un groupe immense à bien des égards. Le duo Almond – Ball n'a plus rien à prouver, et leur empreinte est déjà prégnante dans l'histoire de la musique électronique.

Il n'est plus question pour eux de révolutionner quoi que ce soit, ces deux-là ont fait leur part et c'est à d'autres de prendre les armes aujourd'hui. Il est dorénavant question pour ces icônes de prendre du bon temps, car le temps passe vite, et nous n'avons plus vingt ans pour attendre un nouvel album de Soft Cell. Il ne vous reste donc plus qu'à apprécier avec indulgence et bienveillance les dernières productions de ces deux monstres sacrés.
tracklisting
    01. HAPPY, HAPPY, HAPPY
  • 02. POLAROID
  • 03. BRUISES ON ALL MY ILLUSIONS
  • 04. PURPLE ZONE
  • 05. HEART LIKE TCHERNOBYL
  • 06. LIGHT SLEEPERS
  • 07. HAPPINESS NOT INCLUDED
  • 08. NOSTALGIA MACHINE
  • 09. NIGHTHAWKS
  • 10. I'M NOT A FRIEND OF GOD
  • 11. TRANQUILISER
  • 12. NEW EDEN
titres conseillés
    HAPPINESS NOT INCLUDED, I’M NOT A FRIEND OF GOD, NEW EDEN, TRANQUILISER
notes des lecteurs