Voilà une très jolie affiche ce soir pour un concert de rentrée placé sous le signe du psychédélisme sombre. Du coup, notre restant d'été indien prend des airs inquiétants d'hiver en avance.

Les Rouennais de
MNNQNS (ndlr : prononcez mannequins), déjà auteurs de deux albums électriques et sombres, ouvrent le bal des vampires. Basse, batterie, clavier, guitare douze cordes : le groupe démarre sur
Full Circle Back. Malgré une rythmique froide, le refrain accrocheur permet à ceux qui ne les connaîtraient pas d'entrer immédiatement dans le set. Ils enchaînent avec
Wire (Down To The), porté par une grosse ligne de basse, un rythme martial et des chœurs appuyés. Les lumières rouges et blanches soulignent la sobriété et la puissance de leur musique. Libéré des claviers, le musicien placé à gauche de la scène s'en donne à cœur joie sur la deuxième guitare.
Pacific Trash Patch prend une allure très cinématique, avec une boucle de synthé entêtante qui rappelle les bandes originales de films de science-fiction des années 60. Sur la fin, la boucle bascule dans un trip sombre, le bassiste attrape un deuxième clavier et le chanteur se met à frapper en rythme sur une plaque de métal. Même dans un espace scénique restreint et un set court, MNNQNS parviennent à faire le show, sobrement mais efficacement. Le dernier titre arrive déjà, laissant un délicieux goût de reviens-y. Pour nos souvenirs, le groupe plante une épine dans le flanc : rythmique hypnotisante, voix fantomatique, nappes de synthé répétitives et guitare en larsen pour un morceau superbement construit.

Alors que les roadies s'affairent à libérer la scène, la sono crache une techno glaciale, comme pour s'assurer que l'ambiance ne se réchauffe pas trop. Les lumières s'éteignent et l'atmosphère s'assombrit encore.
The Horrors montent à cinq sur scène. L'intro de
The Silence That Remains démarre sur une batterie déchaînée, avec quelques notes de guitare et de synthé avant l'explosion complète du morceau. Faris, concentré et totalement "dans la zone", écarte d'un geste le smartphone d'un spectateur au premier rang resté en mode torche. Il tourne comme un lion en cage et joue avec le câble de son microphone comme un dompteur avec son fouet.
Le son live est particulier : sec et chargé en aigus distordus. À trois comme prévu initialement, cela aurait sans doute très bien fonctionné, mais à cinq la nouvelle formation déploie une puissance redoutable. La setlist met en avant leur deuxième album,
Primary Colours et leur excellent dernier opus Night Life. Qu'il s'agisse des morceaux récents ou des plus anciens, tous passent parfaitement et les transitions sont impeccables. En intro de
Mirror's Image, Faris nous remercie pour vingt ans de soutien, décidément les années filent.

Le son de
Silent Sister est énorme en live, comme on pouvait s'y attendre de la part d'un morceau déjà si puissant sur disque. Après un début intense, peut-être un peu trop joué, le groupe trouve son rythme et s'installe naturellement dans son set.
A Sea Within A Sea est introduite par Faris comme "From The River To The Sea". L'intro quasi gothique, basse et synthé en avant, fait monter la tension. Pour ceux qui n'ont pas la référence, Faris conclura par un discret "Free Palestine", sobre, quand on sait que son père est d'origine palestinienne.
Sur
Still Life, la guitare devient plus fine, l'instant se fait éthéré et magique. La chanson n'en perd pas en intensité : la magie opère, le public entre en communion sur le refrain qui répète en boucle "when you wake up". Au réveil, l'enchaînement avec
More Than Life est phénoménal. La tension monte encore d'un cran. Sur
Ghost, les basses sont si puissantes que l'on croit sentir le fantôme à travers les vibrations, tandis que le synthé joue comme une organiste possédée dans une cathédrale.
LA Runaway est présentée comme la dernière chanson... écrite pour l'album, ce qu'une partie du public comprend comme la dernière du set. Faris, qui n'a pas perdu son sens de l'humour, s'en amuse. Mais il reste encore
Who Can Say, avant un rappel débutant avec
Lotus Eater, joué en trio par Faris, Rhys Webb (basse) et Millie Kidd (claviers). Le reste du groupe revient pour
Scarlet Fields, avant de conclure avec le mémorable et bien nommé
Something To Remember Me By.
Le groupe salue, quitte la scène et promet de revenir bientôt. On l'espère bien.