Kele

En juin 2021, entre deux vagues de confinement, le leader de Bloc Party libérait The Waves Pt. 1, le résultat assez intéressant de ses expérimentations en solo alors que la pandémie avait mis en pause forcée l'enregistrement de l'album de son groupe. Deux ans plus tard, tout semble plus ou moins rentré dans l'ordre, Bloc Party ont publié ce dernier et fait une petite tournée promo. Kele revient tout de même en 2023 pour la deuxième partie, toujours en tête-à-tête avec ses machines. Seule différence de taille, l'isolement est volontaire.

Ce deuxième album est très personnel, on a l'impression de voir l'artiste au travail et d'être invité dans son cercle d'intimes. La production de The Flames Pt. 2 est très propre mais atteint les limites du travail solo : on entend les boucles et les différentes couches posées sur le séquenceur. Un producteur aurait pu en faire un très grand disque, par exemple Dan Carey qui a fait des merveilles avec l'album très intime de Sinead O'Brien, ou pourquoi pas Nigel Godrich qui a amplifié et dompté l'énergie créative de Radiohead et réussi à faire des succès planétaires de leur musique de moins en moins pop et de plus en plus expérimentale.


Le travail sur la voix, qu'elle soit chantée ou parlée, est parfait, on sait avec Bloc Party que Kele maîtrise bien cet aspect. Le reste manque d'un regard critique, d'un liant pour transformer le bouillonnement d'idées en un grand disque. Le résultat reste impressionnant : claustrophobes, attention, on se sent vite à l'étroit dans le micro studio de Kele, voire enfermé dans son crâne face à ses angoisses. L'ambiance y est vite gothique, au sens d'Edgar Poe, offrant la bande originale des cauchemars de nuits interminables : des instants de totale solitude (I'm In Love With An Outline, Her Darkest Hour).

Pour un artiste reconnu comme Kele, se mettre à nu, volontairement, sans le prétexte protecteur du confinement, est un projet ambitieux. La démarche est d'autant plus respectable qu'il n'y a ici rien de prétentieux. True Love Knows No Death a tous les ingrédients d'un bon morceau, le mixage en moins. On sent l'anglais plus à l'aise avec des morceaux plus électroniques comme Vandal, un style auquel il s'est déjà essayé en solo, mais je préfère cette version plus dépouillée et personnelle.

Après l'eau et le feu, l'air sera le troisième élément mis en avant avec le futur The Singing Winds, avant un quatrième pas encore annoncé, mais déjà attendu.