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Pale Blue Eyes

This House

Pale Blue Eyes - This House
Chronique Album
Date de sortie : 01.09.2023
Label : Full Time Hobby
3
Rédigé par Adonis Didier, le 29 août 2023
Chers étudiants, redoublants, et autres personnes arrivées ici par accident, laissez-moi vous souhaiter la bienvenue à ce nouveau cours de musicologie avancée, spécialité rock n'roll. L'objet de cette heure, un théorème tout simple. Connaissez-vous le théorème de Ramones-Tuche ? Parfois bien pratique pour les groupes en manque d'inspiration ou d'argent rapide, ce théorème peut s'énoncer comme suit, en prenant l'hypothèse d'un album comportant quinze chansons ou plus : « Tu peux faire deux chansons identiques, mais pas quinze ! Tu peux faire trois chansons identiques, à la rigueur, mais pas quinze ! Allez, tu peux faire quatre chansons identiques, ça peut arriver, mais pas quinze ! […] Tu peux faire quinze chansons identiques, mais pas quinze ! Ah bah si, tu peux en fait ! ». Anecdote notable, les Ramones ont en plus de cela réalisé quatorze albums (et pas quinze) comportant à chaque fois une seule et unique chanson reprise en boucle, mais ceci fait partie d'un cours plus avancé que nous n'aborderons qu'en troisième année, pour tous les braves et les chanceux qui n'auront pas abandonné avant. L'objet du cours d'aujourd'hui sera lui, pour sa part, d'observer et d'analyser de quelle manière certains groupes s'autorisent encore à employer ce théorème de nos jours. Sortez vos cahiers, grand 1 petit 1, nous allons parler de Pale Blue Eyes.

Ce trio britannique opérant dans le Devon sud (c'est en bas à gauche de l'Angleterre, mais pas le plus en bas à gauche), sort son premier album l'an passé, le 2 septembre 2022, et était alors décrit par la presse spécialisée comme, je cite : « une alchimie complète entre Sigur Rós et Kraftwerk, composée par les Stone Roses, et jouée par un groupe pop à la fois moderne, rétro, et futuriste. ». Comprenez par là de la synth pop vaporeuse qui bougeotte. Décidément ces journaleux et leurs formules grandiloquentes...
Un premier album extrêmement prometteur pour le couple Board (Lucy et Matthew) accompagné d'Audrey Simpson, qui voit son successeur naître à un an d'écart, presque jour pour jour, le 1er septembre 2023, fameux bébés du nouvel an. Et force est de constater qu'il est de plus en plus rare de voir des groupes publier des disques de manière aussi concentrée, un fait entre autres dû aux tournées éreintantes qui suivent en général chaque sortie, mais aussi à la difficulté souvent croissante de renouveler sa musique et ses thèmes. Une saine habitude qui, même si elle nous laisse de temps en temps sur notre faim, évite nombre de sorties ma foi très dispensables, et nombre de papiers tout aussi dispensables pour en parler. Une habitude qui n'est semble-t-il pas du goût des Pale Blue Eyes qui se seront, pour leur deuxième album, contentés d'appliquer à la lettre le théorème de Ramones-Tuche, et si vous avez compris ce cours, vous vous doutez de ce qui va suivre. Tu peux faire dix chansons identiques, mais pas dix. Ah bah si, tu peux en fait...

This House, nouvel album de Pale Blue Eyes, pourrait ainsi se décrire comme une seule et même longue structure de synth pop, sur laquelle se greffent de temps à autre des figures mélodiques et des paroles mouvantes, sans vraiment de fond, sans vraiment de corps, tant et si bien qu'après une demi-douzaine d'écoutes, il nous est toujours impossible de distinguer les titres les uns des autres, si ce n'est, pour Our History, dont le solo de guitare offre quelques virages sur une autoroute de synthés, et la finale Underwater, seule chanson à casser le rythme, et ralentir, alourdir cette satanée métrique calée à 120 bpm. La trame de fond grésille, des souvenirs de My Bloody Valentine et des Cocteau Twins émergent, le titre se fait plus vrai que nature, perdu dans un sous-marin en chute libre, dont le hublot noircit à mesure que la pression monte, partagé entre la peur de mourir et l'émerveillement d'un monde inconnu qui se découvre. Une musique en relief comme seul le meilleur shoegaze peut l'offrir, une chanson finale déposant un glaçage d'espoir sur un gâteau de regrets, gâteau dont le résultat évanescent ne fait que nous rappeler qu'on en attendait quand même beaucoup plus des Pale Blue Eyes.

Car le reste de l'album n'est absolument pas mauvais, simplement répétitif, répétitif au point que quatre chansons de cet acabit auraient suffis, répétitif au point que l'on ne distingue même plus les nuances et les titres dans cet amas de synthé et de cadence métronomique, répétitif au point que j'écris des mots juste pour vous montrer que la répétition est quelque chose de fondamentalement lassant à la longue, répétitif au point que j'espère que là vous avez compris, parce qu'il est déjà une heure du matin et je dois aller me coucher.

Répétitif donc, mais pas dénué de talent, ce sera donc mention Assez Bien, avec « Peut mieux faire, se repose sur ses acquis » écrit au Bic rouge sur le haut de la copie. Sur ce, n'oubliez pas de relire le cours pour la prochaine fois, j'aime commencer par une interro, tout spécialement quand je suis de mauvais poil.
tracklisting
    01. More
  • 02. Simmering
  • 03. Hang Out
  • 04. Spaces
  • 05. Heating's On
  • 06. Our History
  • 07. A Million Times Over
  • 08. Illuminated
  • 09. Sister
  • 10. Takes Me Over
  • 11. Underwater
titres conseillés
    Our History, Underwater, More
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