Sam Fender

Sam Fender revient après une pause méritée de quatre années. Le jeune anglais a connu depuis ses débuts en 2019 une ascension fulgurante, et méritée. Qualifié de petit prodige à 20 ans à peine, son répertoire alliant tonalités rock et folk, il a véritablement marqué les esprits et c'est en son seul nom qu'il a rapidement occupé les plus grandes scènes des festivals outre-Manche. Entamant alors un début de carrière aux Etats-Unis, c'est à ce moment-là que nombre d'enthousiastes l'ont comparé à un certain Bruce Springsteen, en référence à son profil de jeune artiste issu d'un milieu ouvrier défavorisé, éloigné des écoles d'art et des réseaux bien-pensants qui font et défont les jeunes formations. Fort de messages à caractère abrasifs contre les inégalités sociales, Sam Fender a réussi à séduire un public très large, et ironie du sort, à répondre aux attentes de l'industrie musicale, celle qui par nature n'est pas spécialement bienveillante envers les musiciens à petits, voire très petits moyens.

Tout cela a eu un prix, cher payé par l'intéressé. C'est en effet en pleine promotion de son album Seventeen Going Under que Sam Fender a dû déclarer forfait, afin de préserver sa santé mentale, une pression très forte pesant sur ses épaules sachant que l'attente du public derrière se faisait alors pressante. Nous retrouvons donc en 2025 un Sam Fender apaisé, remis de ses mésaventures et muni d'un troisième album intitulé People's Watching. Une chose est sûre, ce troisième opus marque l'évolution dans l'âge de Fender et une maturité tant personnelle que professionnelle qu'il acquiert d'année en années. Les morceaux reflètent tous comme le passage d'un cap (celui de la trentaine ici) et toujours avec des paroles concernées, la musicalité particulièrement sophistiquée marquant de ce fait la stature de l'artiste aujourd'hui.


A l'aide d'une production mastodonte à laquelle a participé Adam Granduciel (The War On Drugs), l'album a été enregistré à Los Angeles, sous la houlette du producteur Markus Dravs, responsable entre autres du gigantisme du son de Coldplay. Sans pour autant destiner Sam Fender à un futur fait d'albums gênants, on reconnaît à de nombreuses reprises lors de l'écoute du disque la patte d'un homme qui sait transformer des musiciens en bêtes de stade. Ainsi, les deux titres d'ouverture que sont People Watching et Nostalgia's Lie semblent prédestinés à être repris en chœur (et en bracelets lumineux) par une masse imposante de fans un soir d'été parmi 20 000 autres privilégiés. Les riffs de guitare un peu poussifs et les effets sur la fin des morceaux paraîssent superflus avec des textes pourtant graves, plutôt prompts à la sobriété. On notera la présence d'Andrew Scott dans la vidéo de People Watching, marquant encore plus la hype de ce titre, et ce, reconnaissons-le, pour notre plus grand plaisir.


Ce qui ne change pas ici, c'est la voix de Sam Fender, de plus en plus puissante et chaude, un petit bout d'accent prolo du nord qui ressort de ci-delà, lorsque les chœurs ne le noient pas trop. Ce sont donc énormément de moyens qui ont été mis à la disposition du jeune anglais, et on ne saurait le blâmer pour en avoir tiré le meilleur. Des titres comme Wild Long Lie, le très folk Rein Me In et le poignant TV Dinner permettent quant à eux de retrouver un peu de tension dans le tracklisting, nous dévoilant un Sam Fender moins dispersé. Entre cela, des morceaux propres, bien faits, prompts à séduire une nouvelle vague d'admirateurs à l'image de Chin Up, calibré pour les charts et les mener à nouveau aux pieds des plus grandes scènes. Le disque se clôture sur Remember My Name, morceaux majestueux où le timbre de Sam Fender n'en est que plus vibrant et nous confirme que c'est plus écorché et à nu que nous préférons le musicien.

People's Watching est un troisième album qui crante Sam Fender dans la cour des grands, très solidement construit pour le propulser encore plus haut dans la sphère des artistes voués à des carrières au rayonnement international. Nous n'en serons alors que plus ravis de l'apprécier dans les conditions privilégiées que nous offrira l'Olympia de Paris début mars, avant probablement de le retrouver parmi les plus prestigieux festivals cet été.