Vingt ans de Metronomy, voilà un évènement à célébrer en grandes pompes tant nous étions tous à mille lieues de penser que ce projet débuté dans une chambre d'ado connaîtrait une telle longévité. Longévité parsemée de disques à tubes, présents dans tous les bons supermarchés d'Europe, comme d'autres plus exigeants car plus complexes, faisant ainsi de Metronomy un groupe à part entière, avec ses hauts et ses bas, ses qualités et ses faiblesses. Pour ce faire, le groupe nous offre pour la rentrée des classes son premier Greatest Hits (accompagné en bonus d'une série de sessions réunies sous le nom de BBC Sessions).
Retour en 2005, époque sans réseaux sociaux ni plateformes de streaming, où la découverte de nouveaux groupes se faisait encore à la radio, dans la presse spécialisée et chez les disquaires ou dans les clubs. A cette époque où l'après Britpop mettait sur le devant de la scène les grosses guitares garages, Joseph Mount sort Pipe Paine (Pay The 5000£ You Owe) , accompagné alors de Oscar Cash, le cousin, et Gabriel Stebbing, le copain de classe. Un disque clairement électro - mais-pas-que -, qui laisse présager à celles et ceux qui eurent alors le nez creux que les synthés allaient encore avoir leur mot à dire dans le petit monde de la pop en ce début de XXIème siècle. Passé un peu inaperçu en France, on retrouve alors en 2008 le toujours trio avec Nights Out, le temps pour le groupe de se forger une véritable réputation sur scène.
C'est à ce moment que certains singles de Metronomy sortent vraiment du lot, et allant petit à petit se transformer en « classiques » : encore un peu dépouillés, Heartbreaker, A Thing For Me et le palpitant Night Owl sont les premiers marqueurs de l'ADN Metronomy : electro pop mêlée à la guitare, comme une passerelle entre deux mondes et une volonté de s'ouvrir à un plus large public. Il y a dans toute histoire de groupe à la longévité conséquente un moment où ce dernier explose à la face du monde. Pour Metronomy, cela tient en un titre : The Look. En 2011, dorénavant accompagnés d'Anna Prior à la batterie et d'Olugbenga Adelekan à la basse ainsi qu'au chant, Gabriel ayant quitté l'aventure, c'est une formation solide qui va conquérir tous les charts mondiaux grâce à The English Riviera à l'efficacité redoutable. Longtemps chahuté car considéré comme un album purement commercial, notamment par les fans des premières heures, c'est pourtant bien un classique dont ont accouché Metronomy.
Refrains entêtants, mélodies automatiquement assimilables, légèreté et mise en exergue des chants (l'apport de la voix d'Anna mettant un point final à la « touche » Metronomy), l'album bat des records de vente et ouvre de nouvelles portes aux anglais. Radio à gogo, concerts en arénas et occupations des plus grandes scènes de festivals, avec les aléas liés à la notoriété soudaine comme l'utilisation à outrance des morceaux pour moult spots publicitaires un peu partout dans le monde... Metronomy ont grandi, sont devenus des artistes reconnus par leurs pairs, récoltant beaucoup de lauriers, et comme cela est toujours le cas dans les scénarios de ce type un peu prévisibles, laissant de côté une partie de leur fan base des débuts, jamais prête à accepter ce qui apparait à ses yeux comme un acte de trahison.
Peu importe les rageux, Metronomy ont alors l'audace d'enfoncer le clou en 2014 avec Love Letters, où des effluves soul viennent se mêler à l'électro pop toujours aussi pertinente de Joseph Mount. Le single Love Letters devient un hymne pour des génération d'ados, le titre un rappel officiel pour chacune des tournées à venir du groupe. Plus aucun doute ne subsiste alors sur la crédibilité de Metronomy. A grand renfort de collaborations prestigieuses comme le vidéo clip dirigé par Michel Gondry, la patte Metronomy, dorénavant veloutée et pailletée, devient reconnaissable entre mille.
Comment, après avoir atteint de tels sommets de popularité, repartir sans s'auto-parodier ? La réponse sera Summer 08, l'album qui ébrèche le moule à chansons parfaites de Metronomy. Un disque qui sort en 2016, et qui représente un réel retour aux sources, car entièrement enregistré par Joseph Mount lui-même, comme à l'époque des premières maquettes bidouillées dans sa chambre. Avec cet album le moins représenté dans ce Best Of (un seul titre, mais probablement l'un des plus stylés de tout leur répertoire, Old Skool), on redécouvre les racines techno et house de Joseph Mount. Le disque, alors boudé injustement par les nouveaux fans des lettres d'amour de Metronomy, il deviendra un must have des clubs et une source intarissable de remixes pour tous les DJs en goguette.
Le temps passe, les membres du groupe fondent leurs familles, s'installent pour élever leur progéniture. La maturité pointe le bout de son nez mais c'est bien avec un nouvel album fortement coloré à la pop pétillante et fun que Metronomy font leur retour en 2019. Metronomy Forever est un recueil de morceaux qui offre, tel un traité de paix, un audacieux mélange de chansons pop grand public (Salted Caramel Ice-Cream écœurant pour certain, délicieux pour les autres) et morceaux épurés et tout en distorsion tel The Light, beaucoup moins accessibles et révélateurs de l'identité ambivalente du groupe. Un album aussi complet que le devient la formation, dorénavant avec Michael Lovett venant étoffer le son notamment en live. La tournée malheureusement avortée du fait de la pandémie de COVID-19, les anglais n'en reviendront que plus forts lors des prochains concerts, en confirmant leurs statuts d'excellents performers.
Joseph Mount étant un homme aux multiples ressources, plusieurs EPs de collaborations apparaîssent avant l'arrivée du dernier album studio en date, le très mélodieux Small World. Un disque largement ancré dans un style plus traditionnel musicalement parlant, la prise de risque visant à s'éloigner des standards tubesques qu'ont su nous pondre sans interruption Metronomy est tout à leur honneur. Présents en fin de playlist, Things Will Be Fine et Right On Time marquent pour beaucoup de critiques le début d'une nouvelle ère dans la carrière de Metronomy. Ce qui en vingt ans de bons et loyaux services est une démarche plutôt saine, et signe d'une belle sagesse acquise.
Les fans étant nombreux, quoi de mieux d'assortir à ce Best Of déjà très copieux un second disque de live, exercice dans lequel ont toujours excellé Metronomy et ce depuis les tous débuts. Nous voilà en possession d'une série d'enregistrements faits à la BBC entre 2008 et 2019, dix années durant lesquelles le groupe a définitivement entériné son statut de poids lourd de la scène indie britannique. On retrouve ici l'excellence de la qualité des broadcasts de la BBC, les chants sont donc encore plus vibrants, avec quelques petites pépites bonus non présentes sur le Best Of telles Somme Written ou On Dancefloors, notre préférence allant de l'interprétation parfaite de The Look à celle électrifiante de You Could Easily Have Me. Deux faces bien distinctes du spectre Metronomy, rendant ce groupe beaucoup plus alambiqué que certains veulent bien le croire.
Devenus incontournables dans toute discothèque qui se respecte, Metronomy signent avec ce Greatest Hits un contrat avec leurs fans : après ces vingt premières années d'une richesse absolue, le temps est maintenant venu d'entamer la seconde partie d'une carrière qui s'annonce toute aussi fructueuse et, nous l'espérons, remplie de surprises.