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Led Zeppelin - Celebration Day

Dossier réalisé par Olivier le 15 octobre 2012

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Depuis quelques années, Pathé Live organise des projections de spectacles humoristiques, d'Opéra ou de pièces de théâtre dans ses salles. Pour la projection du DVD Celebration Day dédié au concert donné par Led Zeppelin le 10 décembre 2007 à Londres, en hommage à leur ami Ahmet Ertegün (ndlr : co-fondateur d'Atlantic Records, disparu en 2006), Pathé a, bien sûr, privilégié images filmées en Haute Définition et son Surround pour retranscrire parfaitement le tournage réalisé à l'aide de dix-sept caméras.

Tout, dans ce concert, inspire la légende : le 29 octobre 2006, Ahmet Ertegün assiste à un concert des Rolling Stones à New York, pour l'anniversaire de l'ex-président des États-Unis Bill Clinton. Concert filmé par Martin Scorsese pour son documentaire sur le groupe, Shine A Light. En coulisses, Ahmet Ertegün, âgé de 83 ans, glisse sur le sol et se cogne durement à la tête. Emporté à l'hôpital, il sombre dans le coma et y décède quelques jours plus tard. Scorsese lui dédie son film et Led Zeppelin, un an plus tard, son concert de reformation.


Pour ce fameux concert, vingt millions de fans se sont inscrits pour obtenir un précieux sésame et, par le biais d'une loterie mondiale, 18 000 seulement sont tirés au sort ! Il faut dire que tout le monde ne peut avoir eu la chance d'assister à la performance de ceux qui furent, pendant plusieurs années à partir de 1971, le plus grand et sûrement le premier groupe de hard-rock du monde. Inspiré par le blues, le rock et même le folklore, qu'il soit anglo-saxon ou oriental (Kashmir) la musique de Led Zeppelin est la première à user et abuser des riffs saturés, des vocalises puissantes sur plusieurs octaves accompagnés d'une ligne de basse lourde en accord avec des percussions précises et déchaînées d'une batterie alignant quantités de fûts et de cymbales – et même un gong gigantesque – que l'on n'avait encore jamais vus utilisés dans un groupe de rock, le tout dégageant une puissance digne des nombreux lancements spatiaux de l'époque.

Deux questions découlent de ce film. La première question repose sur l'âge et la forme des membres originels du groupe en 2007 : Robert Plant, chanteur, a soixante ans, Jimmy Page, guitariste, soixante-trois ans et John Paul Jones, bassiste, soixante-et-un ans, alors que Jason Bonham, batteur et fils de John Bonham, en compte quarante-et-un. La deuxième, sur l'intérêt, du label et du groupe, à proposer un énième film alors que Led Zeppelin ont toujours pratiqué la création graphique, photographique et cinématographique.


A la vue d'un John Paul Jones en manque d'énergie, d'un Robert Plant ridé et légèrement boursouflé et d'un Jimmy Page aux cheveux intégralement blanchis par l'âge, on se prend à penser au coup marketing, à la reformation de circonstance, qu'elles soient financières ou ego maniaques... et on a tort ! Avec le temps de chauffe nécessaire à tout bon ampli à lampes, John Paul Jones et Robert Plant, montent crescendo en puissance et, si les octaves ne sonnent plus si aiguës et puissantes dans la gorge du chanteur, nul doute que beaucoup de retraités aimeraient encore pouvoir aligner les notes et pousser la voix comme le fait Robert Plant. Son énergie s'est un peu tarie avec l'embonpoint, bien sûr, mais pas au point de faire sourire l'assemblée. Égal à lui-même, virtuose ès guitare reconnu par la planète musicale entière et donnant à son public corps et âme au point de devoir changer une chemise détrempée en cours de concert, le génie de Jimmy Page se lit dans les déformations célèbres de ses zygomatiques. Il est en apnée à chaque descente ou remontée de manches, double sur le magistral titre Kashmir. Quant au fils du batteur légendaire, Jason Bonham, il n'est pas là pour faire de la figuration ni pour simplement rendre hommage à son père. Travaillant la batterie depuis l'âge de quatre ans et bercé par les coups de canon du paternel, extrémiste de la vie, il est vif, précis et puissant malgré le stress qui l'habite dans ce challenge quasi impossible.
Difficile de lui en vouloir pour l'absence de folie qui émanait de John, et qui l'a entraîné dans la tombe, bien trop tôt. Moins enragés, plus sages, moins provocateurs, Robert et sa bande sont les stars du public d'une O2 Arena pas si âgée, où défilent les guitares de légende de Jimmy Page filmées de la salle par une myriade de smartphones dont on ne soupçonnait même pas l'invention – et sûrement encore moins l'intérêt ! - à l'époque où celles-ci furent conçues.

C'est un défilé haute couture du rock brut auquel nous assistons avec un rendu sonore auquel, une fois encore, aucun membre du groupe n'aurait rêvé dans les années 70. Ce rock dur, hard-rock ou heavy metal comme on l'appellera plus tard dans les années 80, n'est finalement rien d'autre qu'un blues du Mississipi amplifié et distordu jusqu'à la limite avec des accélérations que seuls les plus grands ont pu rendre mélodiques. Artistiquement, le choix des titres est d'ailleurs plus axé sur la période blues du groupe. Démarrant, comme un message métaphorique par Good Times Bad Times, il faut attendre le magnifique et maléfique Starway To Heaven pour décrocher la timbale et entendre s'enchaîner, alors, la crème de la crème de Led Zeppelin résidant sur l'Olympe du rock psychédélique, et ses immortels Whole Lotta Love ou encore Rock And Roll, venant conclure ce concert qualifié de plus grand évènement rock de l'Histoire par la presse Anglaise de l'époque.


Après cette prestation, toute la presse musicale s'était alors demandée si le groupe était vraiment reformé et si d'autres concerts ou albums allaient naître de cet événement hommage. Exception faite d'une apparition aux Jeux Olympiques de Pékin en 2008, les fans ont vite du déchanter. A l'image de ce film live, peut-être un peu trop simple, sans surprises au montage mais qu'il convient de voir dans les meilleures salles de cinéma, ce sont Jimmy Page et Jason Bohnam qui insufflent l'essence sacrée de la vie à un Robert Plant fatigué et ayant, définitivement, tourné cette page monumentale de l'histoire du rock. Et c'est peut-être mieux ainsi.

Ce film reste une chance pour les plus jeunes car il offre, à quelques détails et rides près, l'opportunité de se voir transporté dans une salle de concert, quelques années en arrière, pour y vivre un moment d'histoire. Celle qui perdure, qui s'écrit au burin, sur du marbre fait pour passer les siècles et qui, sans aucun doute, provient de la même carrière que celui que l'on retrouve en haut des marches qui mènent au Paradis, controversé, de Led Zeppelin.