logo SOV

Vieilles Charrues

Carhaix, du 14 au 17 juillet 2016

Live-report rédigé par Clémentine Barraban le 4 août 2016

Bookmark and Share
Vendredi matin. Alors que le soleil cogne déjà sur les toiles de tentes, une nouvelle, de celles qui glacent le sang, se propage à la vitesse où peuvent aller les réseaux saturés des rares téléphones en état de marche. Le réveil a le goût amer des brusques retours à la réalité que l'on n'attendait pas si tôt et les douches à l'eau irrémédiablement froide du camping ne sont rien à côté de la Une du quotidien local, le Télégramme, distribué à l'entrée : une centaine de personnes ont été tuées à Nice, lors d'un attentat en pleines festivités du 14 juillet. L'insouciance du lieu s'étiole, les conversations tournent plus au dégoût qu'aux plans pour l'apéro. La fête reprendra juste un peu plus tard, après avoir pris des nouvelles des proches, dans un vaste Carpe Diem général !

Cette année, les mesures étaient déjà largement renforcées, mobilisant plus de sept cent agents dans la ville de Carhaix. Les festivaliers se plient, plutôt de bon gré, aux fouilles interminables (deux heures d'attente en moyenne pour rentrer dans le camping, le premier jour) qui font partie du plus gros dispositif de sécurité d'Europe. De quoi faire des Vieilles Charrues un cocon serein, permettant de profiter au maximum du week-end de musique et de folies hors du temps.

Rockeur furibond de son état, Dominic Sonic tire le coup de feu du départ de ce deuxième jour, sur la scène Kérouac. Guitare au poing, il dévale à toute berzingue les loopings mélodiques, poésie rude et riffs puissants de ses titres, comme une ode solennelle et sans superflu, aux grands mythes du rock.

SOV
Quand arrive l’heure du thé, Lou Doillon apporte avec elle, les senteurs douces et épicées d’une Angleterre romantique, mariées à un nuage de glamour bien frenchy. Saluée pour son deuxième album Lay Low, qu'elle co-signe avec Taylor Kirk de Timber Timbre, elle pose sa voix lascive, finement éraillée sur ses refrains perpétuels : une onde veloutée qui se propage depuis Glenmor.

Pour Ropoporose, un nom de scène pareil, c'est une invitation ouverte pour le public a s'adonner a son beuglement collectif préféré : « Pooow, pow-pow pow-pow-pooow pow... » (sur les notes d'intro de Seven Nation Army, tube des White Stripes, pour ceux qui fuiraient les stades et salles de concerts). Cet enthousiasme général semble bien aller à Pauline et Romain, qui mêlent l'énergie ambiante à leur patchwork de genres, réveillant un rock ambitieux et sans artifices sur la scène Grall.

Du côté de Kérouac, l’hypnotique voix de Stuart Staples invite au voyage. Révélant sur scène les titres envoûtants de leur 10ème album, The Waiting Room, les Tindersticks s'accompagnent d'images d’excursions fantastiques, d'histoires tendres ou d'amours brulants, quand le temps se prête surtout aux cornets de glace !

SOV
Depuis le début d'après- midi, le festival semble être envahi de sympathiques sosies à la crinière blonde seventies, qui braillent à tue tête « Goodbye Marylouuuu... » d'une façon harmoniquement discutable. Michel Polnareff est un de ces artistes dont les titres résonnent encore et toujours dans les têtes, comme d'étranges berceuses ou comptines lubriques d'une autre époque, mais qui demeure un personnage impalpable, s’enfonçant dans ses multiples déboires. Pourtant, quand il occupe la scène Glenmor, en queue de pie extravagante et matos en évidence, il incarne plus qu'une tignasse peroxydée et des lunettes noires dissimulant des yeux pas frais d'ancienne icône pop sur le retour. Michel nous conte ses mesquineries sans âge, ses amours et coups de gueules transgénérationnels, avec une voix pure et une énergie intacte. Pour son premier passage aux Vieilles Charrues en cinquante années de carrière, il est allé chercher outre-Atlantique deux fous furieux de la gratte qui saisissent leur moment entre deux tubes pour s'enflammer dans un battle de riffs scotchant et concluent avec une reprise de Smoke On The Water : quand la chanson française sait se faire rock'n roll !
La Poupée Qui Fait Non, Love Me, Please Love Me, Le Bal Des Laze, ses titres font l'unanimité, comme si le public réalisait qu'un tel ancrage dans l'inconscient collectif ne pouvait que susciter une énorme vague d'émotions. Michel sait emmener où l'on n'emmène pas, et les Vieilles Charrues n'en reviennent pas !
Aux dernières notes de On Ira Tous Au Paradis, Jean-Luc Martin qui profite du rassemblement pour proposer une minute de silence. Certainement que l'endroit ne se prête pas à rester si longtemps sans bruit, ni musique, ni festivités, car au bout de trente secondes, une Marseillaise retentira.

Référence européenne ultime en matière d’électro swing, le DJ autrichien Parov Stelar (de son vrai nom Marcus Füreder) sample disco, jazz et hip-hop pour barbouiller de couleurs rétro diablement festives ses pulsations électroniques. La plaine de Kerampuilh prend alors sa forme de dancefloor épique, où toute forme de chorégraphie est permise (oui, le Madison se danse aussi sur de l’électro des balkans !).

Les Pixies représentent typiquement le genre de groupes rock qui doivent leur légende à une chanson et dont le reste de la discographie est obscure et trop méconnus du commun des mortels pour qui ne s'appelle pas Francis Zegut. La classe de rattrapage est heureusement assurée (un vendredi soir, en plein mois de juillet, c'est dire l'urgence!). Au programme, pas de calculs ni dissertations, mais de bonnes claques et autres délicieux dommages corporels sont autorisés et même vivement distribués (au sens figuré, entendons-nous) par Black Francis et sa bande. En pionniers du rock alternatif aux États-Unis, cités comme référence par Nirvana, les bêtes de scène, à tendance punk rock qui déménage sur fond de délirium pshyché, mettent Glenmor sur le dos. CQFD.

Cette dernière décennie, ses tubes ont donné un rythme à nos été, ambiancé les pistes de danse, et fait donner de la voix sous la douche (si...). Pharrell Williams débarque sur Kérouac avec son show à l'américaine et ne fait pas dans la demi-mesure : décors hauts en couleurs, chorégraphies hyper calées et danseuses en tenues légères. Si sa prestation ultra formatée ne déchaine pas les foules, c'est quand il sait se montrer touchant, en accueillant sur scène un groupe d'enfants, ou tirer une larme en contemplant son public entonner la Marseillaise, qu'il gagne les cœurs. Il y avait comme un besoin urgent d'hymnes à la liberté et au bonheur.

Howard et Guy Lawrence, les deux frères prodiges de la house à la sauce britannique investissent la scène Glenmor. Forts du succès de leur second album, Caracal, Disclosure propulse le set en apothéose électro-analogiques, entre house vintage et bass music, dans un déluge de lumières hypnotiques.
artistes
    Breton Blend
    Dominic Sonic
    Lou Doillon
    Ropoporose
    Tindersticks
    Socalled
    Fidlar
    Michel Polnareff
    Vald
    Feiz Noz Moc'h
    Parov Stelar
    Soom T
    Pixies
    N'To
    Pharrell Williams
    Disclosure
    Lisa and The Lips