Rock en Seine

Après une journée ayant vu le festival amorcer un virage dans sa programmation avec plus d'ouverture à la musique électronique, c'est à la pop dans tous les sens du terme et à la culture urbaine que le public de Rock en Seine se voit confronté en ce dimanche 28 août.


Sous un ciel quelque peu nuageux mais des températures toujours estivales, nous retrouvons ainsi à 14h30 la jeune Holly Humberstone sur la Grande Scène. Star en devenir outre-Manche après avoir notamment remporté la catégorie Rising Star lors de la dernière cérémonie des Brit Awards, celle-ci fait rapidement valoir son aisance et sa maturité malgré une scène sans doute encore trop grande pour elle et son unique musicienne installée à la batterie. Exception faite de quelques excès de minauderie dispensable et d'une voix trop souvent doublée par des pistes pré-enregistrées, la musicienne fait parler sa polyvalence en se produisant du piano à la guitare en passant par le synthé. Si certaines de ses compositions peuvent paraître encore trop aseptisées, d'autres à l'image de l'entêtant Drop Dead ou de Falling Asleep At The Wheel ont toutes les qualités pour la voir s'imposer sur les ondes des radios grand public ou dans les playlists du plus grand nombre.


Hasard de la programmation, Sarah Faith Griffiths alias Griff lui emboîte immédiatement le pas sur la scène de la Cascade quelques centaines de mètres plus loin. Elle aussi très en vue outre-Manche après avoir collecté plusieurs prix depuis 2021, Griff fait partie de cette jeune génération de musiciennes considérées comme la réponse britannique aux stars américaines actuelles. Accompagnée de deux musiciens au second plan, l'anglaise se démarque de sa concurrente par une énergie indéniable, arpentant sans cesse les quatre coins de la scène microphone en main et misant sur un style où pop, R&B et dance se côtoient et se mêlent. Disposant dans son répertoire de plusieurs tubes certifiés, à commencer par Head On Fire publié en duo avec Sigrid ou Black Hole, tout en s'appropriant sur scène le titre I Wanna Dance With Somebody (Who Loves Me) de Whitney Houson, Griff semble d'ores et déjà avoir une longueur d'avance sur la concurrence.


Invitée de dernière minute dans la programmation du jour, Helen Ballentine alias Skullcrusher vient présenter aujourd'hui au public parisien son premier album attendu dans quelques semaines. A contre-courant de son nom de scène, l'américaine propose en duo un ambient folk dépouillé et apaisé. Avec une communication réduite au strict minimum, un public apathique et novice, et des interprétations manquant franchement de dynamisme, difficile de rentrer dans cet univers à la beauté austère. Les titres se suivent et se ressemblent, les trente minutes passées sur scène ne manquant pas de faire ressentir quelques longueurs ou moment de flottement. Une déception relative que l'on tentera de gommer dans une salle plus intimiste et adaptée à l'univers de Skullcrusher.


Changement d'ambiance radical sur la Grande Scène pour le retour d'AURORA au Parc de Saint-Cloud, un peu plus de vingt-quatre heures avant un concert en tête d'affiche dans la salle du Trianon. Radieuse et souriante comme à son habitude, usant et abusant de son rôle de femme-enfant, la norvégienne va parcourir durant plus d'une heure l'intégralité de sa discographie, sa pop nordique tantôt teintée de folk tantôt plus électronique s'attachant rapidement les faveurs d'un public de plus en plus nombreux. Toute de blanc vêtue dans une large robe, la musicienne fait la démonstration de son évident talent vocal avec une certaine candeur, invitant par la même occasion la chanteuse Pomme afin d'interpréter leur duo Everything Matters pour un résultat absolument charmant. Le très dansant Cure For Me fera quant à lui danser les plus récalcitrants, tout comme un Queendom très relevé, alors que le très attendu The Seed se veut lui aussi des plus réussis. L'un des temps forts de cette journée.

Après avoir accueilli Jamie xx ou The Blaze la veille, le festival mise pour cette dernière journée sur le producteur anglais Fred again.. pour faire danser les foules. Producteur, musicien, remixeur ou arrangeur, Fred John Philip Gibson de son vrai nom n'a plus rien d'un nouveau venu. Auteur de deux albums en 2020 et 2021, et n'hésitant pas abondamment parsemer la setlist de ses prestations d'inédits plus ou moins récents, le touche-à-tout semble n'avoir aujourd'hui qu'un seul et unique objectif : faire danser. Habitué à l'utilisation de samples divers variés et n'hésitant pas à donner ponctuellement de la voix pour accompagner celles d'autres artistes l'accompagnant via des pistes pré-enregistrées, Fred again.. délaisse parfois la subtilité au profit de l'efficacité mais ne connaît aucune baisse d'intensité tout au long de son set avant tout fédérateur.


Particulièrement appréciés par le public français, Parcels vont alors nous offrir sur la Grande Scène l'un des derniers temps forts de cette édition 2022. Gorgées de soleil et groovy à souhaits, les mélodies des cinq musiciens font mouche sans discontinuer, tout comme des harmonies vocales enjolivant leurs compositions electro pop et psychédéliques. Si la mise en scène proposée se veut somme toute minimaliste, les sourires sur les visages des membres du groupe, une imagerie un rien rétro et la bonne humeur insufflée tout au long d'un set aux airs de jam continu sont imparables. Outre une entête reprise du tube I Follow Rivers de Lykke Li, dans sa version remixée par The Magician, on retiendra une sublime version de EDM conclue par un jam de percussions du plus bel effet.

Une journée conclue avec Channel Tres et FKJ, mais aussi et surtout un concert de Stromae en guise de clou du spectacle. Une édition 2022 qui, en dépit de quelques couacs organisationnels symbolisés par de longues files d'attente sur le site tout à long du week-end et l'agaçant Golden Pit maudit par le plus grand nombre, aura réservé bien des satisfactions de par son éclectisme. Avec 150 000 visiteurs répartis sur quatre jours, le festival Rock en Seine a indéniablement réussi son retour et peut préparer 2023 avec sérénité.