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Rock en Seine

Paris, du 23 au 27 août 2023

Live-report rédigé par Fab le 26 août 2023

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Rituel immuable à la fin du mois d'août pour tout fan de musiques actuelles, le festival Rock en Seine prenait ses quartiers en cette fin de semaine dans le Domaine National de Saint-Cloud. Une édition initiée deux jours plus tôt pour une soirée spéciale en compagnie de Billie Eilish avant le début de trois jours de festivités consécutifs en ce vendredi 25 août.

Si certains avaient pu craindre un temps l'arrivée de la canicule dans la capitale, jusque là plutôt épargnée, c'est au contraire sous un ciel gris avec des températures en chute que cette première journée va ainsi se dérouler, aucune ondée n'allant au final être recensée pour le plus grand bonheur de tous. Il n'est que 15h35 lorsque tout débute, UPSAHL et ses deux musiciens prenant place sur une grande scène face à une fosse encore très dépeuplée. Difficile à catégoriser, avec des chansons allant de la pop au hip-hop en passant par le rock ou même le RnB, l'américaine ne manque ni d'énergie ni de gouaille dans un style ne manquant pas de rappeler un certain Yungblud, dont elle a par ailleurs déjà assuré les premières parties. Si le jeune public installé dans les premiers rangs semble réceptif, le manque de subtilité, pour ne pas dire de sincérité, d'une musique très calibrée et l'utilisation de nombreuses pistes préenregistrées ne sont pas des plus convaincants.


On préfère ainsi après quelques titres migrer vers la scène de la Cascade en vue d'une toute autre proposition artistique avec Turnstile. Entre post-hardcore et punk, menés par la pile électrique Brendan Yates au chant, les américains vont proposer l'une des prestations les plus jouissives de la journée. Court et intense, avec une durée totale de quarante minutes, à l'image de nombre de titres de leur discographie, le concert ne laisse aucune place à l'ennui, le public le rendant bien au groupe avec le lancement de moult circle pits, pogos ou slams dès les premières minutes. Leur dernier album en date, le très populaire GLOW ON, est logiquement le plus représenté dans la setlist du jour, notamment via les singles BLACKOUT, FLY AGAIN et le très attendu T.L.C. (TURNSTILE LOVE CONNECTION), alors que Julien Baker, présente via la venue de Boygenius, s'offrira un featuring inattendu et détonnant pour UNDERWATER BOI. Avec un groupe à l'unisson dans son implication, le bassiste Franz Lyons n'hésitant pas lui aussi à haranguer le public et la récente recrue scénique Meg Mills ne ménageant pas efforts, le public de Rock en Seine s'en donne à coeur joie pour ce qui constituera assurément l'un des meilleurs moments de cette édition à l'heure des comptes.


Une heure plus tard, après que Bertrand Belin ait eu le temps de charger l'audience sur la Grande Scène avec un set somme toute classieux à défaut d'avoir été flamboyant, et nous voilà de retour sur la scène de la Cascade pour la seconde décharge punk de la journée, cette fois-ci avec les suédois de Viagra Boys. Moins incisif que Turnstile, le sextet se démarque quant à lui par un sens du groove certain et la gouaille de son chanteur Sebastian Murphy, lequel n'aura de cesse aujourd'hui d'arpenter la scène microphone en main et ventre tatoué au vent, laissant le soin à ses cinq camarades de donner le tempo à un set entre post-punk et garage, le saxophoniste Oscar Carls et son mini short faisant partie des attractions visuelles de ce set profondément positif et bienveillant face à un public y trouvant un réel plaisir. Si l'on pourra regretter quelques longueurs sur la durée du fait du manque de variété du répertoire du groupe, on ne peut que saluer l'engagement de la formation et le partage ininterrompu avec un public féru de rock aux anges en ce début de week-end après les deux démonstrations successives du jour.


De retour sur la Grande Scène, l'une des attraction de cette édition de Rock en Seine s'apprête à faire chavirer les coeurs du public de 7 à 77 ans : Boygenius. Déjà auteures chacune de plusieurs disques en solo, Phoebe Bridgers, Julien Baker et Lucy Dacus joignent depuis quelques années désormais leurs forces au sein d'un supergroupe né d'une amitié profonde et durable. En a découlé il y a quelques mois un premier album, The Record, entre pop, folk et rock, sur lequel les trois musiciennes se partagent tant le chant principal que les choeurs, à l'image du concert du jour durant lequel toutes se verront à un moment ou un autre placées au coeur des débats. Si les interprétations proposées en live sont fondamentalement plus musclées que sur disque, notamment en raison de la présence de quatre musiciennes à leurs cotés, à l'image de Satanist durant lequel Brendan Yates (Turnstile) puis Sebastian Murphy (Viagra Boys) viennent tour à tour donner de la voix, Boygenius n'en négligent pas pour autant l'émotion pouvant se dégager de certains de leurs titres plus dépouillés, à l'image de l'ouverture du set a capella sur Without You Without Them. Bien que l'émouvant Souvenir ne sera pas proposé aujourd'hui, pas moins de quatre titres de leur premier EP éponyme se verront présentés, notamment Bite The Hand ou Salt In The Wound en clôture du concert durant lequel Phoebe Bridgers et Lucy Dacus se lancent dans le public sur fond de solo de guitare de Julien Baker au centre de la scène. Un concert tantôt drôle, tantôt touchant, marqué par les éclats de rire des trois jeunes femmes et des harmonies vocales sublimes de bout en bout.


Après une telle bouffée d'air frais, difficile de transitionner sur la scène du Bosquet avec la française Ana Benabdelkarim, alias Silly Boy Blue. Accompagnée par trois musiciens, cette dernière délivre durant une courte heure une sélection de titres extraits de ses deux albums, sa pop aux accents synthétiques manquant d'originalité et de mordant en dépit de la bienveillance de l'artiste et du plaisir pris à participer à un festival de cette ampleur. Les anecdotes qu'elle délivre ont beau faire sourire, on s'ennuie quelque peu malgré la présence de quelques rayons de soleil venus égayer l'ambiance.


La réussite n'est guère plus au rendez-vous sur la Grande Scène pour la venue de Christine And The Queens pour un concert constitué exclusivement de compositions extraites de son dernier album en date, Paranoïa, Angels, True Love. Une prestation conceptuelle et théâtrale, un brin pompeuse, où les chorégraphies et textes déclamés se succèdent. Les interprétations de l'artiste s'identifiant désormais au masculin, rapidement torse nu sur scène, semblent laisser de marbre la majeure partie de l'audience, pourtant venue nombreuse alors que la nuit commence doucement à tomber. A l'évidence, le spectacle proposé aujourd'hui n'était pas celui attendu.


Après avoir connu une première vie en tant que DJ, c'est sous le nom d'Avalon Emerson & The Charm qu'Avalon Emerson a publié il y a quelques mois un premier album la voyant transitionner vers le rôle de musicienne à part entière. Nous la retrouvons aujourd'hui sur la scène du Bosquet, après une apparition au printemps au Hasard Ludique à Paris, afin de présenter un univers où la musique électronique tend vers la dream pop, son chant parfaitement maîtrisé servant de fil conducteur à des compositions envoûtantes et taillées pour faire dodeliner les têtes. Accompagnée d'une boîte à rythmes et de diverses pistes préenregistrées, mais aussi d'une guitariste et d'un bassiste/violoniste, l'américaine évolue au centre de la scène, microphone en main, en enchaînant durant près de trois quarts d'heure les titres tantôt planants tantôt plus dansants, présentant par la même occasion une composition inédite et sa reprise réussie du Long-Forgotten Fairytale de The Magnetic Fields. Si l'on aurait aimé la voir se produire avec un line-up plus étoffé, les qualités de son disque auront suffi à faire de ce moment en apesanteur une belle réussite.


Direction la Grande Scène pour retrouver Placebo en terres parisiennes, plusieurs mois après un concert à l'Accor Arena ayant fait suite à la sortie de l'album Never Let Me Go. Bien qu'ayant émis une nouvelle fois le souhait de voir le public laisser de coté les smartphones et appareils photo pour profiter au mieux du spectacle, la prestation du duo n'est pas plus réjouissante que chaleureuse. La faute notamment à un son gargantuesque mais brouillon, avec quatre musiciens accompagnant Brian Molko et Stefan Olsdal, mais aussi à une setlist déséquilibrée pour un concert en festival et un manque d'alchimie entre le duo et la foule. Un service minimum assuré une fois encore par Placebo, et un concert étrangement achevé par deux reprises de Tears For Fears et Kate Bush alors que nombre de hits de leur répertoire se seront faits remarquer par leur absence.

Une journée au final inégale, conclue par Romy en format DJ set, alors que la programmation du samedi et dimanche devraient offrir bien plus de réjouissances.
artistes
    AVALON EMERSON & THE CHARM
    BERTRAND BELIN
    BOYGENIUS
    CHRISTINE AND THE QUEENS
    DALLE BÉTON
    EN ATTENDANT ANA
    FEVER RAY
    FLAVIEN BERGER
    GLAUQUE
    PLACEBO
    POGO CAR CRASH CONTROL
    PREMIER MÉTRO
    ROMY
    SILLY BOY BLUE
    THE BIG IDEA
    TURNSTILE
    UPSAHL
    VIAGRA BOYS
photos du festival