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White Lies

Interview publiée par Fab le 10 janvier 2011

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Sur tous les fronts lors de la sortie de To Lose My Life en 2009, White Lies s'apprêtent à tenter un retour gagnant avec leur second album, Ritual. Rencontre avec Harry McVeigh et Jack Brown à l'occasion de leur concert à la Flèche d'Or de Paris le mois dernier...

Vous avez pris du recul durant une année pour enregistrer votre second album, pouvez-vous revenir sur cette période ?

Harry : Nous avons commencé par prendre un peu de repos pendant environ deux mois avant de nous mettre au travail et d'écrire de nouvelles chansons. Une fois en studio, nous étions complètement concentrés sur le disque, sept jours sur sept, et ce durant une période de trois mois. Les seules pauses étaient pour jouer dans quelques festivals.

Donner quelques concerts vous a-t-il permis de tester les nouvelles compositions ?

Jack : C'est plutôt l'inverse ! Lorsque nous décidons d'écrire de nouvelles chansons, nous nous consacrons à 100% à cette tâche. Nous évitons de donner des concerts et de jouer nos nouvelles compositions tant qu'elles ne sont pas enregistrées dans leurs versions définitives. Durant les festivals d'été, nous n'avons donc joué que Bigger Than Us, mais pas le reste du disque car rien n'était encore vraiment achevé. Nous n'avons pas besoin de tester les chansons face à un public, nous préférons suivre nos instincts pour savoir ce qui est bon ou ne l'est pas. Nous fonctionnons comme cela depuis toujours.

Votre premier album avait été écrit progressivement depuis vos débuts mais Ritual a été travaillé sur une période beaucoup plus restreinte dans l'optique de devenir un disque à part entière. En quoi ces deux processus ont-ils été différents pour vous ?

Harry : Ce sont d'abord deux disques différents car ils découlent d'approches différentes. Nous n'avons évidemment pas pensé Ritual comme nous l'avions fait pour notre premier album. Charles s'est installé dans ma chambre avec un ordinateur et nous avons enregistré les premières idées progressivement. Ensuite, le groupe s'est réuni au complet dans un véritable studio pour donner vie à ces idées et pour les répéter. Cette façon de travailler était beaucoup plus simple pour nous, elle nous a permis d'être plus ambitieux dans notre démarche. Je pense que notre créativité et l'écriture des chansons ont bénéficié de tout cela.

Le second album est souvent un cap difficile à passer pour de nombreux groupes, vous semblez vous en être accommodés assez simplement ?

Harry : J'ai effectivement le sentiment d'avoir vécu l'inverse. L'enregistrement de Ritual ne nous a posé aucun problème particulier alors que To Lose My Life nous avait demandé beaucoup de travail sur une longue période. A cette époque nous manquions vraiment d'expérience en tant que musiciens et nous ne savions pas encore comment réagir face aux différents aspects de l'industrie de la musique. Il nous a fallu du temps pour trouver notre place, pour apprendre ce qu'est la vie d'un musicien mais aussi pour mieux travailler lorsqu'il est nécessaire d'écrire de nouvelles chansons. Cette fois-ci nous avons su nous débarrasser de notre naïveté et être moins nerveux. Avec cette nouvelle assurance, il était plus simple de fixer nos objectifs pour parvenir à la création d'un album.

Pourrait-on parler d'une certaine forme de maturité ?

Harry : Certainement. Être un musicien s'apparente à beaucoup d'autres jobs pour certains aspects, notamment celui de l'expérience. Durant les deux premières années tu es dans une phase d'observation, tu écoutes les autres et tu apprends énormément de choses. Cela te permet de grandir en tant que personne et d'obtenir de nouvelles responsabilités qui te font prendre conscience de ce que tu dois fournir.

Après le succès de votre premier album, votre maison de disques vous avait-elle fixé des objectifs ?

Jack : Non, elle nous encourageait plutôt dans notre démarche. Nous avions consommé tellement d'énergie durant les deux années précédentes que notre management nous poussait à prendre un peu de repos pour recharger nos batteries. A aucun moment nous n'avons été contraints à travailler plus rapidement ou d'une manière différente. Je pense que notre label avait conscience de ce que nous avions réussi à produire avec notre premier album et qu'il était préférable de nous laisser gérer notre avancée à notre manière.
Harry : Je pense qu'il nous faudra faire une pause plus longue après notre second album, nous en aurons certainement besoin. Au-delà de l'enregistrement, nous consacrons beaucoup de temps aux tournées et cet aspect peut être très éreintant sur la durée.

Pour Ritual vous avez nettement accentué la présence des claviers et des sons électroniques, était-ce une évolution logique pour vous ?

Harry : C'était un choix naturel lié à de nombreux facteurs. Durant les deux dernières années nous avons découvert un grand nombre de groupes de musique électronique que nous ne connaissions pas et cela nous a forcément influencés. De plus, travailler avec Alan Moulder ne pouvait que nous pousser à suivre une telle orientation. Comme il l'a montré durant sa carrière, il est très doué pour créer des textures avec les sons. Je pense que nous étions plus intéressés par l'apprentissage de ces nouvelles sonorités que par d'autres possibilités.

Aviez-vous choisi de travailler avec Alan Moulder dans cette optique ?

Jack : Ce n'était pas un inconnu pour nous car il avait déjà mixé notre premier album. Il existait donc déjà une vraie connexion avec lui et l'idée de pouvoir pousser notre collaboration un peu plus loin pour Ritual était très excitante. Avec le temps, il a choisi de ne produire qu'un nombre restreint de disques pour se consacrer au mixage, il était donc plutôt flatteur pour nous qu'il accepte de nous consacrer du temps. Nous lui avons laissé beaucoup de liberté dans ses choix car nous avions beaucoup de confiance et de respect pour ses connaissances. Alan était notre premier choix et je ne sais pas comment nous aurions procédé s'il n'avait pas été intéressé par ce projet.

To Lose My Life était souvent décrit comme un disque très sombre, est-ce aussi le cas pour Ritual selon vous ?

Harry : Il existe une forme de continuité entre les deux albums. Contrairement à To Lose My Life, Ritual est un album sombre... mais plus entrainant et positif. Ritual est le reflet de ce que nous sommes devenus en l'espace de deux années. Notre entourage et notre cadre de vie font que notre vision des choses a évolué. Malgré tout, les textes font encore une fois référence à des sujets plutôt pessimistes et je pense que nous allons encore être décrits comme un groupe sombre avec cet album (rires) !

Le titre de l'album, Ritual, semble aller en ce sens avec une signification mystique et religieuse...

Harry : Charles écrivant les textes de nos chansons, le choix du titre a été le sien. C'est un simple mot... mais avec beaucoup de sens. Si tu t'intéresses de plus près aux nouvelles chansons, c'est un titre adéquat étroitement lié aux thèmes abordés, mais si tu pousses la réflexion plus loin, tu peux même le lier à la musique en général et à ce qu'une personne peut ressentir en écoutant un disque. L'aspect religieux et mystique en est proche, ce qui constitue bien souvent une source d'inspiration.

Vous entretenez le mystère jusque dans la pochette de l'album, pourquoi avoir choisie cette image ?

Jack : Le choix de l'artwork a été long. Nous ne sommes pas des artistes capables de créer nous-mêmes nos visuels donc la réflexion a été plus poussée et nous avons choisi de nous tourner vers l'extérieur pour trouver un visuel qui nous convienne. Nous avons donc expliqué notre vision des choses à une équipe de graphistes qui ont pris la photographie eux-mêmes en fonction de nos indications. La pochette principale représente donc ces deux jeunes filles identiques mais le livret contient d'autres images jouant sur cette dualité. Des éléments pouvant sembler à la fois très proche et très différent, tout comme certaines personnes choisissent de se distinguer en écoutant ou non les préceptes des religions par exemple. Artistiquement, je trouve que la photographie des deux jumelles sur la pochette est incroyable et captive l'attention de ceux qui la découvrent.

Votre nouvel album est moins immédiat que le précédent de par sa complexité. Était-ce un choix conscient ?

Harry : Nous avions l'ambition de créer un disque plus complexe et profond que le précédent. Je pense que nous y sommes parvenus mais les singles qu'il contient lui permettent de conserver une certaine accessibilité. Je m'attends à ce que certaines personnes soient surprises et ne trouvent pas ce qu'elles étaient venues chercher. Le résultat est nécessairement différent de To Lose My Life et je pense que des titres comme Turn The Bells, The Power & The Glory ou Come Down ne sont attendues par personne. C'est aussi pour cela que Ritual est plus difficile à appréhender que To Lose My Life selon moi.

A-t-il été évident pour vous de choisir Bigger Than Us en tant que premier single de Ritual ?

Jack : Je dirais que la chanson s'est imposée elle-même en quelque sorte... C'est une des premières démos à avoir été enregistrée et dès le départ notre management et nous avions une grande confiance en cette chanson. La mélodie est évidente et le refrain est très puissant, ce sont deux critères primordiaux pour un single. Pour être honnête, le choix revient plus à notre maison de disques qu'à nous-mêmes, mais c'est une bonne chose car c'est pour cette raison que nous avons besoin de travailler avec des personnes qui gèrent cet aspect de notre carrière. Nous écrivons et enregistrons les chansons mais il est sain d'avoir à ses cotés des personnes avec le recul nécessaire pour ce type de choix. Le processus est sur le point de se répéter avec notre prochain single, nous avons une idée sur la question mais notre label en a peut-être une autre et il sera intéressant de confronter les différentes solutions pour faire un choix. Après tout, peu importe les titres des singles, cela ne changera en rien l'album que nous avons enregistré ni la qualité de notre travail.

Au-delà des singles, les chansons de cet album semblent réellement taillées pour être jouées dans de grandes salles ou en festival, est-ce un de vos objectifs désormais ?

Harry : Pour le moment, j'ai l'impression de reprendre les choses là où nous les avions laissées il y a un an. Nous nous apprêtons à jouer dans des salles dont les tailles sont identiques à celles que nous connaissions il y a peu et c'est assurément la bonne manière de procéder. Il nous semble plus prudent de nous projeter progressivement vers des salles de plus grande envergure, mieux vaut ne pas vouloir aller trop vite... de nouvelles possibilités s'offriront à nous en 2011.

Comme le fait de désormais évoluer à cinq sur scène ?

Jack : Nous avons toujours un clavieriste avec nous mais aussi un guitariste supplémentaire désormais. Le besoin est apparu durant les sessions d'enregistrement en studio, il nous est rapidement apparu évident qu'il serait impossible de reproduire toutes les textures à quatre. C'est une évolution que je trouve très excitante pour le futur, cela va apporter une touche de nouveauté à nos concerts. Nos anciennes chansons vont aussi bénéficier de cet ajustement et gagner en profondeur, je pense que le public saura apprécier ce choix.