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DUO

Interview publiée par Jordan Meynard le 15 décembre 2020

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Le leader du groupe The Kooks, Luke Pritchard, et sa femme Ellie Rose sont à la tête de DUO, un groupe né pendant le confinement qui sort déjà un premier album sensuel et envoutant en cette fin d'année. Tous les deux auteurs, compositeurs et interprètes puisent leurs inspirations dans la pop française des années 60/70 qui n'est pas sans rappeler ce qui a été insufflé par plusieurs icônes de Brigitte Bardot à Jane Birkin, en passant par Françoise Hardy. Un parti-pris qui risque de défriser une bonne partie des amoureux de rock nerveux qui se retrouvent ici sur un tout autre territoire. Rencontre.

Avant de commencer cette interview, je voulais vous féliciter pour votre album que j'ai adoré. Parlons de sa genèse... Vous êtes tous les deux auteurs-compositeurs-interprètes. Vous êtes mariés. J'imagine donc que vous n'avez pas attendu de former DUO pour faire de la musique ensemble. Qu'est-ce qui vous a poussé à officialiser ce groupe et sortir un album ?

Luke : Merci beaucoup ! On a naturellement commencé à jouer ensemble lors du premier confinement, ça s'est fait tout seul. On s'est mis à écrire pendant qu'on était enfermés chez nous, et puis comme ça s'éternisait on s'est dit : « On doit en faire quelque chose, on ne doit pas garder ça pour nous ». On ne voulait pas gâcher ça, donc on a commencé à travailler dessus de manière plus officielle.

En vivant ensemble, j'imagine que vous écoutez les mêmes choses, regardez les mêmes films... fort de ces influences votre album est vraiment cohérent et homogène, pourtant les chansons ont chacune leur personnalité. Comment avez-vous réussi ce tour de force ?

Luke : C'est grâce à Ellie, c'est un génie !

Ellie : (Rires) Nous étions sur la même longueur et surtout nous avions beaucoup de temps devant nous. Effectivement, nous aimons tous les deux la musique et l'esthétique des années 60 et 70 et ces décennies sont les influences majeures de cet album. Durant le confinement ça allait très vite : dès que l'on terminait une chanson, on enchaînait avec une autre directement. Nous avons littéralement formé une bulle DUO. Tout ça s'est fait très naturellement.

Ce qui ressort de l'écoute c'est que cet album est composé de titres vraiment intemporels et authentiques. Vous avez fait peu de prises pour l'enregistrement des voix, non ?

Luke : Tout a été fait à l'instinct ! On voulait surtout garder quelque chose d'authentique et de naturel et éviter au maximum de trop retoucher. Pour les voix, cela dépendait vraiment. Par exemple, on pouvait parfois enregistrer à 2h du matin deux ou trois prises de chant d'Ellie et nous savions directement qu'on avait la bonne. Bien sûr, il nous est aussi arrivé de faire plusieurs prises pour certains titres afin de trouver le bon son. Mais le maître mot c'était vraiment : « Pas de pression ». J'aime les erreurs et le côté imparfait, c'est ce qui donne du charme et du cachet aux morceaux. Nous ne voulions pas faire quelque chose de trop refait.

On sent aussi que vous vous êtes fait plaisir sur les sonorités laissant place notamment à des expérimentations sur plusieurs titres. Avez-vous assuré la production ou étiez-vous avec un producteur plutôt clément ?

Ellie: On a tout fait tout seul, surtout Luke !

Luke : Bien sûr, nous avons eu un peu d'aide de David, notre producteur, mais nous avons produit la majorité nous-mêmes. L'intention était vraiment de faire le plus intime possible, pour coller à ce qu'est notre projet depuis le début. Le fait d'écrire à deux, isolés à cause du confinement, a créé une atmosphère spéciale qu'on ne voulait pas dénaturer. C'est le principe même de faire ça tous les deux. Le charme de cet album vient aussi du fait qu'il dégage quelque chose de très jeune et juvénile. L'intimité dans lequel il a été fait est le fil conducteur de ce disque.

Impossible de ne pas penser à la musique française des années 60/70, la cavale de Bonnie & Clyde... L'album sonne moderne mais avec une énergie du passé. De plus, il y a une imagerie très cinématographique, notamment dans le clip de Lolita, No!. Vous vouliez que l'on se sente comme dans un vieux film ?

Luke : Oui, c'est 100% une ambiance old movie qu'on a voulu recréer.

Ellie : Nous avons été très influencés par la pop des années 60 et 70 en France en effet. On adore Brigitte Bardot, Jane Birkin, Françoise Hardy... Toutes ces icônes nous fascinent car ce sont des stars de cinéma ET des chanteuses. C'est un concept qui est beaucoup plus rare au Royaume-Uni. Ce sont des influences sur lesquelles nous nous sommes tout de suite entendus lorsque nous nous sommes rencontrés, c'était donc logique qu'elles inspirent notre album.
Luke : On a voulu créer un univers qui ressemble à tout ça, comme en effet la bande son d'un film fictif, le nôtre ! (Rires)

J'ai l'impression que l'album a été réfléchi comme un vinyle avec une première face très passionnelle avec la naissance des sentiments et l'autre face l'évasion avec en piste centrale l'interlude qui fait passer d'un univers à l'autre. Était-ce pensé de cette façon ?

Luke : Ce n'était pas intentionnel ! Nous avons commencé à travailler par ce qui est la fin de l'album et avons ensuite terminé par le début. C'est vrai que ça constitue deux chapitres bien distincts...

Ellie : Je suis assez d'accord avec ton interprétation ! La première partie est plus conventionnelle et rangée avec ce côté soft, tandis que la deuxième partie parle de libération, d'évasion, de cavale. Finalement, cela fait aussi écho à la sortie de l'album qui est une libération post-confinement.

Luke : Il y a la ressemblance avec le vécu aussi. Nous nous sentions, et nous nous sentons toujours d'ailleurs, comme des outsiders, donc nous avons fait un album qui nous ressemble mais qui peut surprendre de part son concept.

Si l'on connaissait bien la voix de Luke, surtout en France où les Kooks sont très appréciés, on découvre davantage celle d'Ellie, tantôt lascive ou ténébreuse, elle ressemble à de vraies « chanteuses fortes » modernes comme Suzanne ou Claire Laffut en France...

Ellie : Je suis une fan de Claire Laffut ! Elle a d'ailleurs été une grosse influence pour l'écriture de l'album. Je prends vraiment cette comparaison comme un compliment !

Luke : Nous ne connaissons pas Suzanne mais nous sommes curieux, on ira écouter ! C'est vrai que la voix d'Ellie est très changeante et expressive, ce qui contribue au cachet du disque.

J'ai précommandé votre vinyle et j'ai vu que vous aviez fait une collaboration avec une marque de parfum ! Pourquoi ?

Luke : C'est une histoire un peu loufoque ! Notre manager adore le parfum, il pourrait être du genre à être abonné à un magazine spécialisé sur le parfum ! (Rires) C'est un passionné et c'est lui qui nous a mis en contact avec Antonio Gardoni, un parfumeur que nous n'avons rencontré que par Zoom. Il avait adoré l'album et a été très inspiré pour créer un parfum en rapport avec celui-ci. L'idée n'était pas de faire une collaboration commerciale, mais d'associer notre son à une senteur qui représente l'album, ça nous plaisait beaucoup et c'est assez inédit (rires). Antonio Gardoni a vraiment réussi à saisir l'essence de DUO.

En France, il est impossible de voir le moindre concert ou n'importe quel spectacle qui implique du public et un endroit clos. Dans un monde idéal ou tout s'arrangerait en 2021, quels sont vos plans ? Porter ce projet sur scène, un album des Kooks, un album en solo pour Ellie ?

Ellie : Je sais que je veux travailler sur de la musique, mais je ne sais pas encore sous quelle forme !

Luke : Nous allons voir, mais nous voulons faire les choses bien. On ne veut pas se précipiter, et puis tout est tellement incertain... Pour DUO, nous aimerions bien sûr pouvoir monter sur scène présenter l'album, si les gens veulent bien de nous bien sûr ! Nous devions d'ailleurs jouer un concert dans une galerie d'art pour la sortie de l'album, mais le confinement a stoppé tout ça.

Ellie : Ce qui me manque au-delà de tout ça, c'est surtout de pouvoir serrer les gens dans mes bras. En espérant que tout cela cesse bientôt, on pourra peut-être venir vous voir en France !