Si beaucoup de groupes ont pris pour habitude de proposer lors de deux dates successives dans un même lieu des spectacles purement complémentaires, on a même pu constater la volonté de Radiohead de faire de chaque show d'une même tournée un véritable nouvel exploit, notamment en faisant varier sans cesse ses setlists. Ainsi, ce second soir aux Arènes de Nîmes était clairement tout aussi attendu que son prédécesseur. Et certainement pas à tort.
Comme souvent dans les Arènes nîmoises, peinent à se remplir la fosse et les gradins durant l'heure suivant l'horaire officielle annoncée sur nos billets et ce n'est qu'après la première partie que l'on voit l'édifice romain rempli comme il se doit.
Caribou, malgré son électronique poignante, pop et remarquablement recherchée, n'a ainsi pas reçu le succès mérité. Le lieu encore peu rempli ne l'explique pas à lui seul. Il est d'abord clair que le show des canadiens n'est pas adapté à un espace aussi ample. Ensuite, si les titres
Kaili et
Odessa ne peuvent que séduire quelque public de musique rock ou indépendante que ce soit, le faible espace réservé au groupe sur la scène et, surtout, la sonorisation et le mastering encore en cours de réglage (on a pu constater le volume sonore du chant osciller sans cesse, la basse l'écrasant souvent), n'ont paru présenter au public qu'un cafouillage sonore. Dommage. Une version psychédélique de
Sun aura tout de même su correctement terminer le set très court (seulement une demi-heure) d'un groupe remarquable mais malheureusement incompris ce soir, d'après les avis environnants.
Un temps d'attente s'impose, et les roadies installent les multiples pédales à effets et instruments divers. Les lumières s'éteignent et démarre une musique électronique qui permet l'entrée en scène du groupe tant attendu.
Bloom ouvre le bal en un grand fracas. Suivent
Kid A, 15 Step et
Morning Mr Magpie. Les oxfordiens poursuivent ainsi une setlist purement expérimentale sans tomber dans la facilité de leurs grands tubes qui sauraient être repris en chœur par les arènes. Si les titres de
The King Of Limbs ont pu, dans leurs enregistrements studio, paraître fades à beaucoup, il est incontestable qu'en live, ceux-ci prennent une dimension noisy et subtilement saturée qui les rend jouissifs.
The National Anthem et son utilisation de morceaux sonores de la radio francophone, le très sombre
The Gloaming poursuivent un set expérimental, délicat et pour le moins travaillé. « Ceci est une nouvelle chanson » annonce soudain Thom Yorke. Pas si nouvelle que ça, alors que démarre
Supercollider, déjà sorti l'an dernier sur un 45-tours avec le certainement meilleur
The Butcher. Encore un titre assez difficile d'accès. Lui, pourtant, se révèle peu efficace sur scène voire même dispensable. On lui aurait préféré le plus récent
Staircase, proposé la veille.

Le concert devient plus pop. Radiohead jouent
Codex puis
Airbag, font pleurer l'assemblée au son d'une version sublime d'
Exit Music (For A Film). Ceux qui peinaient à accrocher à ce show remarquable sont désormais conquis. Le concert résume alors bien la véritable nature du groupe d'Oxford, expérimental et pop, perfectionniste et touchant. Le concert continue de gagner en émotion. La première partie du spectacle se termine sur la saturation de
There There, le néo-dubstep de
Feral et enfin
Bodysnatchers.
Acclamés comme il se doit en guise de rappel, Radiohead nous reviennent sur le minimal
Treefingers, enchaînent avec
Give Up The Ghost sur lequel Thom Yorke gratte sensiblement sa guitare folk, visiblement aussi ému que son public. Sommet atteint en fermeture du concert.
Everything In It's Right Place et
Idioteque sont joués dans la plus grande maîtrise et laissent sans voix un public admirateur. Ce dernier parvient tout de même à rappeler avec engouement une seconde fois ses héros.
S'il aurait été facile pour les oxfordiens de jouer un tube touchant tel
Karma Police ou
No Surprises en clôture d'un spectacle proche de la perfection, c'est la très haute teneur émotionnelle de
Street Spirit (Fade Out) qui vient clore le set, bouleversant son public.
Des compositions touchantes jouées dans le cadre sublime d'arènes romaines au son incontestablement très bon, un travail d'expérimentations musicales hors-normes : Radiohead nous ont une nouvelle fois prouvé en ce second soir de concert leur talent scénique remarquable. Inoubliable.