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TRAAMS
Wire

Paris, Trabendo - 5 octobre 2013

Live-report par Olivier Kalousdian

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Vendredi quatre octobre, au matin, une tribu de musiciens et chanteurs francophones entourée du monde du journalisme musical Français, de la TV à la presse écrite en passant par la radio accompagnaient dans sa dernière demeure notre estimé collègue, Gilles Verlant. Décédé accidentellement dans sa cinquante-sixième année, Gilles Verlant était le biographe officiel de Serge Gainsbourg, maître incontesté de l’histoire du rock et de son odyssée qu’il présenta huit années durant sur Ouï FM, et le trublion belge à la populaire voix de stentor qui, de Nulle Part Ailleurs aux Enfants du Rock en passant par Taratata, s’était très tôt rêvé journaliste rock à une époque où seuls les plus marginaux et les plus déglingués de sa génération envisageaient telle carrière. Gilles avait cette qualité rare : l’altruisme. Il ne voyait pas la relève comme une menace mais comme une chance. Il savait donner une chance aux jeunes générations qui croisaient sa route, pourvu qu’ils aient la motivation et la passion de la musique. Ce report, d’un groupe qu’il a vu naître à la fin des années soixante-dix, lui est dédié.

Alors que toute la communauté hispanophone, des caraïbes à l’Amérique du Sud en passant par la terre mère ibérique s’était donnée rendez vous au Zénith voisin pour un unique récital du chanteur Merengue Dominicain, Juan Luis Guerra, qui affichait largement complet, peu nombreux étaient les quadras vieillissants et les nouveaux punks nostalgiques sur le chemin de terre menant au Trabendo. Il faut dire que ce samedi cinq octobre c’,est la Nuit Blanche à Paris et les axes routiers, rues et trottoirs ont été très tôt envahis par une armée de l’ombre klaxonnant, ruminant et angoissant à l’idée de devoir s’entasser en voitures ou à pied dans une ville devenue bien trop étroite pour tant de circulations ; douces ou violentes.

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Le Trabendo semble souffrir de cette Nuit Blanche car son public est plus que clairsemé quand les premières mesures énervées des trois Anglais de TRAAMS résonnent durement contre le mur qui fait face à la scène ; la reverb semble un poil exagérée ! Ces trois adolescents, qui ont l’air d’appartenir à un film de Judd Apatow sortant d’un concert grunge dans une salle miteuse de Kansas City, sont originaires du West Sussex. Chichester pour être précis. En mode guitare / basse / batterie, TRAAMS, dont le patronyme reste un mystère, prouvent dès les premiers titres qu’ils ont terriblement bien appris la leçon de leurs aînés américains, de l’ironie dissonante des Jane's Addiction à la science noisy rock des Sonic Youth ; c’est dire la qualité de ces Anglais là !
Avec un titre fleuve comme Klaus (sept minutes) ou l’urgence du très punk Jack, planche à roulettes aux pieds et guitare totalement désaccordée, TRAAMS ravissent les plus jeunes comme celles et ceux, plus âgés, venus écouter Wire et heureux d’être arrivés en avance. Ces têtes de Nerds viennent de marquer des points dans la capitale Française qui s’apprête, justement, à commémorer comme il se doit la période Punk à la Cité de la Musique avec la venue de PiL et des Buzzcocks les 23 et 24 octobre prochains. Ils viennent également de commettre leur premier opus intitulé Grin, sorti en septembre et chaudement recommandé.

Contrairement à ses prédécesseurs de presque quarante ans ses cadets, Colin Newman ressemble plus aujourd’hui à Woody Allen qu’à un punk ayant vécu la grande époque du CBGB. Avec tout le respect dû à son grand parcours, le leader chanteur de Wire a toujours détonné dans le landernau musical Anglais des années punk et post punk. Né en 1976, le groupe a participé, avec d’autres, à complexifier et intellectualiser le message et la musique punk et post-punk. Amoureux de Paris où ils jouent en moyenne une fois par an depuis leur retour sur scène en formation originale, Wire sont restés pendant quelques années sur la corde raide en ne produisant plus que des albums sans véritable âme. Le dernier disque en date, Change Becomes Us, en signe de confidence intime, en est le contre-exemple. Excepté un titre comme Attractive Space joué ce soir, au tempo très punk, il se permet des percées progressives quasi planantes, même si toujours glaciales et tendues comme un fil. Bien que beaucoup plus ancien, le titre Marooned qui fermera la marche, le deuxième rappel et le concert est l’exemple type de l’étendue de la vision du punk selon Wire avec son final joué à l’iPad sur des sonorités totalement synthétiques et saturées ne nécessitant plus aucun des musiciens qui sortent à tour de rôle de scène laissant Colin Newman finir seul le set du soir...

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Toujours accompagné de ses trois guitares vertes – assorties à ses chaussures - – Colin Newman n’a rien perdu de son aura auprès d’un public qui ne remplit toujours pas les trois quarts du Trabendo. Après une version de Drill, titre légendaire du groupe s’il en est avec sa ligne de basse mitraillette, joué sur un tempo bien plus rapide qu’à l’accoutumée et des sonorités quasiment techno, Wire rendront chèvre le public en refusant, comme souvent, de tomber dans la facilité de ses titres les plus connus et attendus ; quand un fan du premier rang se risque à demander un "tube" comme 1.2.X.U ou Lowdown, Colin Newman lui lance, pince-sans-rire : "Vous n'aurez qu'à écouter le disque". Un plaisantin lance quant à lui un « Are you the fly ? », référence au fameux morceau I Am The Fly (qu'ils ne joueront évidemment pas).

Le premier rappel, à lui seul, justifie le concert ! Comet et Spent ne font pas dans le détail : « poum shack » aux percussions et guitares plus rapides que mélodiques ; l’intensité de ces deux titres et la recherche du larsen parfait mettent les instruments à rude épreuve. Pendant une heure et demie, les Wire auront donné un cours de musique concassée à toute berzingue sur un ou deux accords et à un rythme métronomique, qui n'aura presque pas varié du début à la fin du concert. La corde cassée et pendouillant du bassiste, Graham Lewis, prouve l’énergie que ces papys du punk situationniste recèlent encore en eux ; TRAAMS se précipiteront alors sur scène proposer leur propre basse avec laquelle Graham finira le set non sans avoir plaisanté sur sa sangle trop courte : « Putain, j’ai l’air du bassiste de Level 42 ! ».
setlist
    TRAAMS
    Non disponible

    WIRE
    23 Years Too Late
    (A Berlin) Drill
    Doubles & Trebles
    Blogging Like Jesus
    Magic Bullet
    Smash
    Adore Your Island
    As We Go
    Please Take
    Another The Letter
    Swallow
    Nocturnal Koreans
    Map Ref 41°N 93°W
    Stealth Of A Stork
    Attractive Space
    Harpooned
    ---
    Comet
    Spent
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    Marooned
photos du concert
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