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Glass Animals

Paris, Nouveau Casino - 29 avril 2014

Live-report par Julien Soullière

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A quelques semaines de la sortie de leur premier album, Glass Animals accentuent leur opération séduction, et reviennent à Paris trois mois à peine après leur passage à la Cigale en première partie de St. Vincent, pour promouvoir celui qui répond au doux nom de ZABA. Un terme étrange, mais qui n'a peut-être pas été choisi au hasard. Rien de sûr à ce stade, mais l'Histoire le dira sûrement.

Glass Animals n'y échappent pas : dès lors qu'un média s'intéresse à leur cas, le jeu des comparaisons ne tarde pas à trouver le chemin des convives. Alt-J, Troumaca, Wild Beasts et autres Beaty Hart s'invitent alors à la table des négociations, et deviennent malgré eux les alliés de journalistes en mal de repères et d'imagination. C'est que Glass Animals viennent grossir les rangs, toujours plus fournis ces derniers mois, de ces nouveaux ambassadeurs de la scène indépendante britannique, vecteurs d'une musique plurielle, riche de textures et gorgée d'exotisme. C'est là le sens de l'histoire, les cases dans lesquelles on aime à mettre habituellement les artistes apparaitront désormais comme toujours plus étroites.

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Le plus remarquable là-dedans, c'est que les groupes déjà cités ne s'auto-alimentent pas. Glass Animals, leur truc, c'est le hip-pop franc et rêche de Kendrick Lamar, et le R'n'B maousse et suave de Beyoncé. Et dont acte : chez nos anglais, le temps est aux syncopes et aux contre-temps, à l'érotisme discret, aux basses chargées et aussi lourdes que l'iridium le plus pur. Les convives ne s'y trompent pas, et ce soir, parce qu'un soin tout particulier aura été porté au soundcheck (on peut toujours faire mieux, certes, mais rappelons quand même que l'on parle du Nouveau Casino), cœurs et corps vont chalouper, alors que les esprits, eux, semblent s'envoler vers une destination où « problème » est un mot que personne n'a jugé bon de devoir inventer.

Ce soir, c'est l'expérience qui parle, et avec les nombreux concerts qu'ils ont donnés ces derniers mois en Europe et aux États-Unis (ont un dans le cadre du festival SXSW, à Austin), Glass Animals ont sensiblement gagné en confiance. Il faut dire que c'est là leur premier set parisien en tête d'affiche, et comme ils l'ont confié eux-mêmes un peu plus tôt dans la soirée, loin de leur mettre une pression supplémentaire, cette date à marquer d'une pierre blanche a plutôt joué sur leur motivation et leur énergie, qui s'en trouvent effectivement décuplées. Certes, les membres du groupe sont de nature discrète (peu de mots seront échangés avec le public), il ne fallait donc pas s'attendre à une démonstration de force, ce qui aurait d'ailleurs été une idée aussi saugrenue que mal venue de la part d'un groupe dont on apprécie justement l'infinie délicatesse.

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Pour autant, c'est bien avec leurs tripes que Glass Animals ont décidé de jouer ce soir, et ce sont les déhanchés malhabiles mais sincères de Dave Bayley qui vont ouvrir la marche tout au long de ce beau périple, nous guidant sans mal au sein d'une terre métisse et intrigante, faite de beats, de brocs et de nappes électroniques. Un voyage du meilleur goût qui, de Gooey au tubesque Black Mambo, en passant par quelques petits nouveaux issus du très attendu ZABA (Toes, Pool...), ne connaitra aucun réel temps mort.
Heureusement, diront certains, car le set n'aura finalement duré que quarante petites minutes. C'est peu, d'autant qu'à plusieurs reprises, on s'était fait la réflexion que certains morceaux auraient mérités d'être joués pendant un peu plus longtemps encore, et ce pour profiter notamment de quelques riffs de guitare bien sentis. C'est là chercher la petite bête (le psylle ?), mais quand on a passé la soirée en si bonne compagnie, on est toujours tenté d'en demander plus, au risque de quitter la salle désabusé plutôt que frustré.

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Pour autant, c'est une très bonne surprise qui viendra balayer cette légère déception. Chaleureusement apostrophé par le public une fois la scène devenue vide de sa présence, le groupe va faire son grand retour pour interpréter sa reprise du Love Lockdown de Kanye West, un titre initialement enregistré pour la radio australienne Triple J. Ce n'était pas prévu (d'ailleurs, pas peur d'oublier les paroles, Bayley s'aidera de son téléphone portable), mais quelqu'un leur aurait soufflé l'idée un peu avant leur entrée sur scène.

La preuve, s'il en fallait vraiment une, que Glass Animals est un bien beau groupe, aussi intéressant musicalement que respectueux de son public.