C’est un concert particulièrement attendu qui s’est déroulé hier soir à la Gaité Lyrique à Paris.
The Horrors venaient en effet défendre sur scène leur tout nouvel opus
Luminous. Résolument plus électronique et moins oppressant que ses prédécesseurs, le disque allait-il tenir toutes ses promesses en live ?

Pour cela, il a fallu patienter le temps de la prestation de
The Proper Ornaments, quatuor anglais au sein duquel
James Hoare, guitariste de Veronica Falls, officie. Les quatre musiciens produisent un rock psychédélique où le fantôme du
Velvet Underground s’avère omniprésent. Leurs chansons, plutôt de bonne facture, restent dans un format musical oscillant entre deux minutes trente et trois minutes. Les guitares déversent quelques sonorités très cristallines sur lesquelles le chant à double voix vient se conjuguer efficacement en compagnie de la basse et de la batterie. Les pop songs sous influence seventies évoquent
Ride période post-shoegazing. D’une manière générale, les mélodies sont plutôt linéaires et les morceaux s’ensuivent sans immenses bouleversements. Le groupe se montre assez peu loquace mais aussi appliqué musicalement. Si le son est assez éloigné de la pop indie de Veronica Falls, The Proper Ornaments délivrent un set d’une trentaine de minutes au final percutant. Une première partie en définitive plutôt plaisante.

A l’issue de cette prestation, force est de constater l’arrivée de la chaleur dans la salle parisienne qui s'est remplie comme un œuf. Sur le coup de 21h40, les cinq de Southend-On Sea arrivent enfin et contre toute attente démarrent pied au plancher avec le cultissime
Sea Within A Sea. Étrange manière de démarrer un concert sensé promouvoir un nouveau disque. Faris Badwan, perfecto et coupe de cheveux désinvolte, attaque son show avec ce timbre Butlerien que l’on croyait pourtant disparu. La voix du chanteur est assez positionnée en avant et ses quatre acolytes viennent l’illuminer musicalement avec brio. Les stroboscopes bleus pétillent à tout va. Le contraste sombre/lumineux déjà présent sur la pochette de
Luminous s’avére toutefois un peu démesuré. Enchainant avec deux autres classiques issus de
Primary Colours, dont l’irrésistible
Who Can Say aux vagues synthétiques glaciales, The Horrors vont alors exécuter un premier extrait de leur tout récent opus.
In And Out Of Sight, bien plus électronique que les trois premières compositions interprétées précédemment, s’avère séduisant et permet au groupe de s’échapper de la noirceur de leur début de set et enchainer sur un rythme bien plus propice aux dancefloors. Ils doublent la mise avec le long
I See You à l’intro quasi Kraftwerkienne. Assez curieusement la voix de Faris Badwan se retrouve davantage en retrait et se fait moins rêche sur les nouvelles compositions, à l'image du rendu studio.
La mutation du groupe, passé du post-punk à la cold-wave psychédélique avant de devenir électro-rock, peut paraître étonnante mais n’est en rien illogique. La place de Tom Furse, remixeur récent pour TOY et Coves, étant de plus en plus conséquente au sein du groupe. Les lumières passent d’une chanson à l’autre du rouge au bleu en crépitant inlassablement dans les yeux du public. Cette luminosité en devient presque aveuglante. Pour une fois, ce ne sont donc pas les oreilles qui sont menacées lors d’un concert, mais plutôt les organes visuels.

Le tempo diminue le temps de
Endless Blue et
Falling Star, mais la moiteur dans la salle parisienne est plus que jamais de mise, Faris Badwan délaissant au passage son perfecto. Et cela est préférable puisque l’excellent
Mirror's Image vient à son tour s’imposer dans la setlist du concert. Le quintet replongera une fois encore dans l’univers de son dernier essai le temps d’un
So Now You Know particulièrement réussi. La prestation s’achève curieusement avec
Still Life, plage pour le moins poussive de
Skying, au bout de cinquante-cinq minutes, et incluant, en définitive, uniquement quatre extraits de
Luminous, The Horrors démontrant au passage qu’ils n’ont définitivement pas une démarche commerciale. A notre grande surprise, car non coutumiers du fait, les cinq anglais reviennent sur scène pour une version étendue et magistrale de
Moving Further Away, en guise de rappel, affichant ainsi toute l’incandescence de leur noirceur.
Si le show fut quasiment irréprochable de bout en bout, on regrettera forcément l’absence de certaines plages de leur dernier album, notamment le si bien nommé
Chasing Shadows. Gageons que la bande à Faris Badwan nous en gratifiera lors d'un retour prochain.