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Fujiya & Miyagi

Paris, Nouveau Casino - 14 juin 2014

Live-report par Olivier Kalousdian

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Certains groupes ne changent pas, ou si peu. Fujiya & Miyagi, discret quatuor de Brighton, est de ceux-là. Évoluant, depuis quatorze ans à la croisée des routes qui vont du krautrock électro intimiste aux influences puisées dans le hip-hop et le funk, ses membres fondateurs, Steve Lewis et David Best, seront fidèles à eux-mêmes, ce soir encore. Malgré une chevelure blanchie par les années pour David et un embonpoint visible pour Steve, les concerts de Fujiya & Miyagi semblent se suivre et se ressembler.

En formation à quatre sur scène (et en studio, depuis 2008), voilà un groupe à l'opposé de l'arrogance et du bling-bling. Quand Steve Lewis entre en scène, on ne peut s'empêcher de penser, malgré toutes ces années de carrière, qu'il n'est pas très à l'aise en public avec sa personne. Regard fuyant et chant chuchoté, l'aspect scénique de Fujiya & Miyagi n'est pas sans rappeler les groupes, légendaires parfois, dont les malaises faisaient le style et pour qui la vraie star n'était pas les musiciens, mais bien leur musique et seulement leur musique.

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Un set que les habitués savent millimétrés et d'une durée quasi administrative : cinquante minutes pour le set principal, pas une minute de plus. Il faut dire qu'entre les titres Cat Got Your Tongue et son tempo quasi jazzy, Uh le guttural ou Collarbone et sa basse funky, les relations du groupe avec son public sont réduites au strict minimum. « Bonjour », « Merci », « Au revoir »... Ce seront, à peu de choses près, les seuls épanchements auxquels se livrera Steve Lewis vêtu, tel un technicien de plateau prêt à tout pour ne pas être vu, d'un tout petit rien, qui font les grands tout.

Fujiya & Miyagi seraient à ranger coté geeks ; une bande de nerds plus intéressée par le graphisme d'avant-garde et les sonorités minimalistes où les cordes tiennent le haut du pavé que par les débordements du rock pur et dur. La scène, inévitable en ces temps difficiles, serait même superflue pour eux. Le bidouillage studio, les arrangements et la richesse des textes sont les véritables raisons d'être du groupe (toute ressemblance avec un groupe de rock progressif né dans les années soixante est laissée à la libre interprétation de chacun) et il faudra attendre les envolées quasi techno de Knickerbocker ou Tinsel & Glitter pour assister à quelques moments de tension rock, sur scène.

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Le Public, lui, est à la fête. Pas très nombreux, il semble constitué d'irréductibles du groupe, composé d'une majorité de très beaux jeunes gens ; ceux que les médias, en mal d'inspiration, qualifient à tour de bras de « bobos ». Pourtant, peu de smartphone dégainés pour cette soirée pourtant placée sous le signe du numérique. L'assistance préférant boire et danser sous les rythmes syncopés, hypnotisés par la vidéo projection Kraftwerkienne en fond de scène.

Cinquante minutes pile poil et Steve Lewis sort de la scène en premier. Un titre manque, bien sûr, au programme. Le seul hit du groupe à ce jour et une composition devenue un standard de l'intelligentsia électro au fil des ans : Ankle Injuries. Rappel d'un titre toujours aussi plaisant à écouter dans une version vitaminée que seules les basses, saturées et grésillantes, viendront légèrement compromettre ce soir.