Habituée des salles de la Flèche d'Or ou la Maroquinerie depuis quelques années maintenant, la soirée [PIAS] Nites organisée à intervalle régulier par la maison de disques investissait pour la première fois cette semaine le Trianon, invitant pour l'occasion Bloc Party et le prometteur Oscar à venir se produire face au public local. Un pari réussi à en voir l'affluence présente en dépit des très nombreux concerts proposés dans la capitale le même soir.

Si la salle est encore loin d'être comble aux alentours de 20h15 lorsque
Oscar fait son apparition accompagné de ses trois musiciens, le jeune homme ne s'en laisse pas compter et impose rapidement son style. Pas de fioritures, quelques phrases à destination du public dans un franglais un peu hésitant, et des pop songs typiquement british lui octroient au fil des minutes un capital sympathie certain. Affublé d'une surprenante veste ornée de personnages de l'univers de Disney, le jeune homme joue de sa voix grave pour rythmer des chansons dont les meilleurs représentantes sont celles publiées en singles ou au sein d'EPs dans un passé récent. On pense notamment à son entêtant
Breaking My Phone, introduit par un "we've all been there" faisant son petit effet ou à un
Beautiful Words nous renvoyant aux Smiths et Morrissey, mais l'on retiendra essentiellement deux titres plus enlevés et électriques,
Daffodyl Days et surtout un
Sometimes plus débridé le voyant s'agiter guitare en main avec un plaisir certain. Oscar ne révolutionnera sans doute pas la scène britannique dans les mois à venir, mais son premier album
Cut And Paste attendu en mai prochain apportera assurément un vent de fraicheur au printemps.
Depuis des mois désormais, la question de la légitimité des activités de
Bloc Party en 2016 fait rage. Gordon Moakes et Matt Tong ont définitivement quitté le navire, Justin Harris (ex-Menomena) et Louise Bartle ont été recrutés en remplacement, et le groupe que beaucoup ont aimé et suivi de près durant une décennie a en conséquence bien changé. Leur récent album,
Hymns, accueilli par des réactions diverses et variées, atteste de ce constat, et la méfiance de beaucoup vis à vis de leurs performances live actuelle en va de même.
Si l'on pensait Kele Okereke et sa bande définitivement tournés vers le futur, leur performance de ce soir au Trianon va remettre quelques certitudes en question. En effet, alors que les concerts donnés au cours des derniers mois les voyaient présenter de nombreux titres récents, la setlist proposée à l'occasion de cette [PIAS] Nites semble avoir été préparée pour les fans de longue date.

Certes l'entame du concert laisse le public sur sa faim avec un
Only He Can Heal Me qu l'on aurait aimé entendre plus tard dans la soirée, un
Octopus dispensable et le très bon
Virtue entrecoupé par une pause de quelques dizaines de secondes suite à une altercation en plusieurs personnes en fosse, mais le reste de la soirée va rapidement tourner au sans-faute. Kele attire toutes les attentions comme de coutume et les trois autres musiciens se contentent de l'accompagner avec application, mais la setlist en forme de Best Of va rapidement satisfaire les plus perplexes.
L'enchainement de
Song For Clay (Disappear Here) avec
Banquet fait jubiler la salle, avant que les sonorités plus dansantes de
One More Chance n'enfoncent le clou. Vient par la suite l'une des belles surprises du soir avec le retour espéré de
Two More Years dans une version voyant Kele prendre place au piano tout au long du titre tandis que Justin Harris et Louise Bartle se chargent des choeurs. Si
Different Drugs calme le jeu durant une poignée de minutes, ce n'est que pour mieux repartir de plus belle avec
Hunting For Witches, un inespéré et détonnant
Positive Tension ainsi que le récent single
The Love Within, désormais adopté, durant lequel Russell Lissack triture les effets appliqués à sa guitare pour un résultat surprenant.
Le rappel ne décevra pas non plus. Après une reprise un peu trop scolaire du
Heroes de David Bowie,
Helicopter offre un dernier exutoire à une fosse agitée comme jamais avant
Ratchet et une fin plus raffinée mais non moins jouissive sur
This Modern Love.
Quelques saluts et remerciements plus tard, Bloc Party ont rempli leur contrat après soixante-quinze minutes passées sur scène. Plus rodés qu'en décembre dernier sur la scène de l'Alhambra, avec un choix de titres judicieux, ces derniers ont prouvé ce soir que cette version 2.0 de la formation anglaise avait quelques arguments de poids et un avenir devant elle.