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Sunken
Nerves

Paris, Supersonic - 12 janvier 2024

Live-report par Adonis Didier

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Janvier : mois de la déprime, du lundi bleu, mois sans alcool parce que la santé publique s'est rendue compte que si on commence à boire on ne s'arrête plus avant avril, et mois sans concert jusqu'au 17 tant l'écosystème musical hiberne le temps que le public se soit enfin remis du Nouvel An et des abus de chocolat praliné. Et pourtant, profitant de l'absence de concurrence, c'est le 12 janvier que le Supersonic marque véritablement sa rentrée en programmant sa première soirée They're Gonna Be Big de l'année, la dix-septième du nom. Oui, on galère de plus en plus à se souvenir du numéro auquel on en est...


Quatre groupes, tous au Supersonic Club, et tant mieux parce qu'avec des températures négatives on se voyait mal changer de salle toutes les trente minutes. Quatre groupes, un premier qui s'appelle Smile, des allemands de Cologne affublés d'une chanteuse américaine avec la voix de Kim Gordon, et une musique moins rigolote que ne le laissait penser le nom du groupe. Du post-punk lent ou mid-tempo, associant un aspect planant indie à la recette habituelle. Les structures se baladent, se floutent dans la chevelure jaune fluo de la vocaliste, pour un résultat final agréable mais trop homogène croisant The Lounge Society, Sorry, et Sonic Youth. Un pont entre la crank wave et le rock nineties, comme un constat d'une époque en pleine transition dont on attendra la pleine maturation avant d'en juger.


Mais restons en Europe, et partons maintenant en Irlande. Nerves ont débarqué sur nos côtes avec dans leur cale la dernière mode de l'ouest irlandais : le punk-noise. Un groupe de noise irlandais sur deux étant produit par Daniel Fox, on attribuera la parenté du mouvement national à Gilla Band, et si vous en doutez, je vous laisse écouter le premier album de Naked Lungs, groupe à la musicalité et à la nationalité très proche de celle de nos irlandais du soir. Mais si Naked Lungs nous avaient décroché la tête dans un set alliant violence et encore un peu plus de violence, Nerves nous accrochent en live sur un autre créneau, celui de la lourdeur. Nonobstant la chemise en dentelle et les airs de Rory Gallagher de leur chanteur-guitariste Kyle Thornton, le trio nous aspire instantanément dans un noise éléphantesque, craquant l'image de lourdes formes métalliques se mouvant dans l'obscurité dans un vacarme assourdissant de chocs et d'entrechocs. Des touches indus et électro (qui a dit Nine Inch Nails ?), des grattements, des craquements, des textures aspirant l'air de la salle, comme du doom-noise-indus menant à une comparaison plus qu'improbable avec un autre groupe irlandais que vous aviez peut-être déjà oublié : Just Mustard. Oui, on conclura ce puissant concert en arguant que Nerves sont au punk ce que Just Mustard sont au rock un peu perché, une version oppressive de la chose non par sa violence directe mais par sa capacité à s'enrouler autour de sa victime jusqu'à lui vider les poumons et lui exploser la cage thoracique. Ce qui n'empêchera pas les énervés de service privés de pogo depuis au moins un mois de se lancer dans la fosse dès les premiers éclats de voix, et ce jusqu'à l'arrivée sur scène de Sunken.


Sunken, quintet londonien de dream pop atmosphérique, dont la photo doit se trouver juste à côté de la définition de la dream pop atmosphérique dans le dictionnaire tant le groupe pourrait être vu comme un exemple type du genre. Un exemple type que l'on définira comme du My Bloody Valentine sans la disto éclairé par des nappes de violet-turquoise, et un set sympathique de Sonic Angel à Nightcrawler, qui va invariablement ralentir et s'adoucir, au grand déplaisir de la foule du soir. Car oui, on commence à être un peu serré, à avoir chaud, et l'envie d'esquiver le vortex de somnolence en racontant toute sa semaine à son voisin se propage parmi les têtes violettes et turquoises. Une dynamique et un effet de foule qui nous gâcheront pas mal la fin du concert, mais on reconnaîtra qu'on a aussi fini par craquer et parler chiffons, parce qu'on attendait autre chose d'un vendredi soir à 22h, et qu'on préférera désormais écouter Sunken sous un plaid devant une tisane avant d'aller au lit.


Heureusement pour nous, l'ambiance revient par l'intermédiaire inattendu de trois néerlandais complètement éclatés et regroupés sous le nom de Parker Fans. Qui c'est Parker ? Aucune idée. Qui c'est les fans ? Sans doute nous maintenant, devant ce mélange what the fuck d'hyperpop, de techno, et de hip-hop comprenant un bassiste et deux mecs gigotant devant leurs claviers, autant là pour gueuler n'importe comment que pour envoyer des sons. Un bazar croisant easy life avec Fatboy Slim et LCD Soundsystem, mais surtout un bazar propice à faire les cons et s'envoyer sur le dancefloor avant de terminer la soirée à s'envoyer des Piña coladas et des verveines. Le genre de concert qui nous rappelle que Personal Trainer reviennent bientôt en ville, et ça, ça fait déjà plaisir.

Sur ce, on n'avait pas parlé de Piña colada ? Non parce qu'il s'agirait de pas dessoûler d'ici le blue Monday quand même !
setlist
    NERVES
    Non disponible

    SUNKEN
    Sonic Angel
    Friends
    Nightcrawler
    I’d Rather Feel
    He Really Gets Me
    Adore You
    Blaze
    Paris Blues
    Something Warm
photos du concert
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