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Miles Kane
The Royston Club

Paris, Cigale - 19 février 2024

Live-report par Jordan Meynard

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Moins de deux ans après son excellent concert à l'Olympia de Paris - entrecoupé par deux showcase éclairs pour Gibert et Fursac (deux salles, deux ambiances) - le natif de Liverpool nous donnait rendez-vous à la Cigale, en ce lundi pluvieux, pour prolonger les festivités du week-end. Un concert au goût de retrouvailles, puisque Miles Kane s'y était produit en 2018 le temps d'un set ridiculement court et sauvé en grande partie par la présence de son comparse de The Last Shadow Puppets, Alex Turner. Tout au long de sa carrière, Miles Kane a toujours eu du mal à se défaire de son association avec le leader des Arctic Monkeys. En plus de leur groupe commun, les deux hommes ont toujours été liés par les dates de sorties de leurs albums respectifs, leurs décisions de carrière et même leur lieu de résidence lorsqu'ils s'étaient installés à quelques minutes l'un de l'autre à Los Angeles il y a quelques années. Si la bande à Alex Turner a conquis les États-Unis grâce au son et aux riffs de l'album AM, on ne peut pas dire que son comparse ait réussi le même tour de force dans le pays de l'oncle Sam. Il a finalement fait un retour salvateur au Royaume-Uni, tant mentalement que musicalement, pour le plus grand plaisir de ses fans. En témoignent ses deux derniers albums, Change The Show, puis One Man Band au mois d'août dernier.


20h00 : C'est le groupe The Royston Club qui lance les festivités. Cette formation galloise est composée d'un quatuor classique prêt à en découdre, parfois renforcé par la présence d'un cinquième membre à la guitare acoustique. Leur énergie contagieuse insuffle un peu de chaleur à la foule, encore humide de pluie, en nous livrant à la volée les titres de leur premier album Shaking Hips And Crashing Cars, composé notamment de plusieurs coupures de leurs précédents EPs, écrites par le guitariste Ben Matthias. Musicalement, on a à faire à de l'indie rock pur et dur, dont certains morceaux font écho à plusieurs forces vives des années passées comme The Kooks et The Fratellis, en passant par des nouveautés comme RATS ou The Lathums. Si les membres du groupe ont l'air très jeunes, le chant impeccable de Tom Faithfull et l'excellente alchimie du reste de la bande témoignent d'une expérience commune de longue date. Certes, on passe un bon moment, mais il faut admettre que tout se ressemble un peu surtout quand on les découvre de but en blanc. En revanche, il y a fort à parier que certains ont ajouté à leur playlist le tube du groupe Mrs Narcissistic sur le trajet du retour. The Royston Club ont livré un set accompli, cimentant par la même occasion la réputation croissante dont ils bénéficient outre-Manche, après une saison 2023 de festivals réussie.

20h57 : C'est un Miles Kane aux cheveux blonds peroxydés et blouson en cuir fermé jusqu'au cou qui fait son entrée sur scène accompagné de ses musiciens. Pour rappel, cette date parisienne est la seule qui verra se produire le natif de Liverpool en mode full band sur l'ensemble de sa tournée française. Ni une ni deux, il donne le ton avec le premier single de son nouvel album One Man Band : le désormais culte Troubled Son. Il n'hésite d'ailleurs pas à faire la part belle à ce dernier effort en enchaînant plusieurs titres, à l'instar de The Wonder, One Man Band ou encore The Best Is Yet To Come et Heal - signe des qualités intrinsèques de ces nouveaux morceaux en live. L'ensemble est fractionné par Better Than That et Give Up issus du trop souvent décrié Don't Forget Who You Are. Les morceaux s'enchaînent aussi rapidement qu'ils ont été listés dans cette chronique, peut-être un peu trop d'ailleurs ? Si nous sommes ravis que l'anglais ait conservé sa frime californienne, le monsieur paraît plus timoré qu'à l'accoutumé. Même le niveau sonore de sa guitare ne prend pas le lead comme c'est souvent le cas lors de ses concerts, préférant se calquer sur le même niveau que les autres musiciens. Il attendra même vingt-cinq longues minutes, soit près de la moitié du show, pour saluer son parterre d'invités. Heureusement, la qualité du concert n'est pas altérée, puisque Miles est bien présent musicalement avec son exubérance habituelle ponctuée de cris constants, qui rappellent étrangement ceux d'un certain Paul McCartney sur le titre Revolution.

Miles Kane dégage une confiance en lui incroyable, confortant son rôle de maître de cérémonie. Ses interventions avec le public ne sont que sporadiques, préférant laisser parler ses paroles pour lui : « And I will take the stage / And l'II beat the drum until the dawn to keep the darkness from your door / 'Cause I'm your one-man-band ». Son statut n'est pas près d'être remis en cause, lorsqu'il entonne le premier tube de la soirée, Inhaler, paru il y a déjà treize ans sur son premier album Colour Of The Trap - après avoir quand même pris le temps de tomber la veste. Son armée de fans chante chaque mot de la chanson comme si elle avait été écrite spécialement pour chacun d'entre eux. Miles Kane profite de cette effervescence pour remonter le temps et parcourir brièvement sa discographie (Heal, Loaded et First Of My Kind), omettant toutefois de piocher dans le répertoire si riche de Change The Show. Le rythme redescend le temps d'interpréter Colour Of The Trap, un des plus beaux titres co-écrits avec Alex Truner, avant de retrouver le rythme effréné du concert grâce à un enchaînement intelligent avec Baggio et sa montée en crescendo. Une montée en puissance qui n'est d'ailleurs rien d'autre qu'une rampe de lancement vers la dernière partie du concert aux allures de fan service. Au programme : Rearrange, Coup de Grace, le petit nouveau Never Taking Me Alive (qui va être difficilement indéboulonnable dans les tournées à venir) et le cultissime Come Closer. La fosse est en ébullition et la frénésie ne se calmera que lorsque son chef d'orchestre et ses musiciens feront silence sur ce dernier morceau tout en continuant de chanter « Aahh aahh aahh aahh » et que la foule répliquera à son tour « Oohh oohh oohh ooh » encore et encore. Il faut attendre le coup de grosse caisse pour que tout se beau monde reprenne la chanson en chœur pour une fin de concert épique.


Miles Kane nous gratifiera d'un rappel, ce qui n'avait été le cas de son concert de 2018 dans la même salle. Le public le lui a de toute façon fait sentir en entonnant avant même son retour sur scène le refrain culte de Don't Forget Who You Are. Le scouser revient avec ses musiciens et son groupe (Liam Toon, Nathan Sudders et Ben Rose) le temps d'une dernière danse et ce fameux morceau qui avait été le point culminant de son dernier Olympia. On le sait, Miles Kane est une bête de scène et nous l'a encore prouvé avec un set livré pied au plancher. On ne peut que saluer son initiative de jouer une majorité de titres de son nouvel album One Man Band (sept au total), parsemés de tubes et autres pépites cachées de sa (déjà) longue discographie. Si son capital sympathie n'a pas été écorné, on regrettera tout de même son manque d'interactions avec le public et son set un peu vite expédié en 1h10.

En rejoignant le bar d'à côté pour la traditionnelle bière d'après-soirée, on ne peut s'empêcher de se demander : quand le reverrons-nous à nouveau jouer sur scène ? Est-ce que ce sera avec The Last Shadow Puppets comme la rumeur qui enfle veut nous le faire croire ? Ou peut-être avec son nouveau side-project Miles Kane & The Evils récemment annoncé sur ses réseaux sociaux ? Si on espère qu'il percera un jour ce plafond de verre sous lequel il est depuis trop longtemps coincé, on ne peut pas non plus s‘imaginer le voir se produire dans d'autres lieux que des salles de moyennes capacités. Quand on vient voir Miles Kane sur scène, on a le sentiment de faire partie d'une poignée de privilégiés qui assistent depuis plus d'une décennie à quelque chose de grand, dans une certaine intimité. Comme si cette énergie galvanisante, exceptionnelle et familière à la fois, devait rester chasse gardée. Peut-être ne sommes-nous pas (encore) prêts à le partager ?
setlist
    THE ROYSTON CLUB
    Blisters
    Shallow Tragedy
    The Deep End
    Cherophobe
    52
    Mrs Narcissistic
    Mariana
    I'm A Liar

    MILES KANE
    Troubled Son
    Better Than That
    The Wonder
    The Best Is Yet To Come
    Give Up
    One Man Band
    Inhaler
    Heal
    Loaded
    First Of My Kind
    Baggio
    Colour Of The Trap
    Rearrange
    Cry On My Guitar
    Coup De Grace
    Never Taking Me Alive
    Come Closer
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    Don't Forget Who You Are
photos du concert
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