Young Knives

On a beau savoir que le trio loufoque de Ashby-de-la-Zouch n’a pas pour habitude de se prendre au sérieux, on sait aussi que leur technique subtile et intelligente se déhanche sur le fil du rasoir. Bousculé par la tendance du groupe à perdre de vue une ligne personnelle pour que prime la dérision, l'équilibre de ce parti-pris se révèle précaire... et la chute ne pouvait pas être loin. Effectivement.

Depuis la fin du mois de juin, on peut entendre les quatre morceaux de leur Oh Happiness EP. Difficile cependant de parler de réjouissance. Dès l’ouverture de l’étrange Reproduction, les 8bits explosent, les synthétiseurs lancinent, on se croirait plongé dans un générique de série SF du début des années 80. Les sons saturent dans tous les sens et prennent totalement le pas sur une mélodie, qui semble chercher à poindre au milieu de ce tord-neurones.
Après ces cinq premières minutes d’ouverture quelque peu indigestes, le funk mélancolique et languissant de Maureen laisse espérer une trêve. Très vite les discordances de la voix sous vocodeur et la redondance du texte enveloppent de malaise à défaut de toucher tout centre émotionnel.

Le morceau titre renoue enfin sensiblement avec ce qu’on connaissait bien des Young Knives : une énergie pop-tubesque posée sur des basses aux relents post-punk. Mais là encore, les cordent viennent tirer sur le larsen sans trop de raison, sauf d’obtenir un effet vieux poste de radio qui dérègle la machine et relance la migraine.
Pour conclure, L’EP tire sa révérence sur Signs Of Weakness, illustration parfaite des faiblesses significatives dont il souffre : les frères Dartnall semblent se complaire tout à coup dans une overdose expérimentale de saturations en tout genre, qui fait se languir du parfais équilibre électro-acoustique dont le genre tire pourtant sa force majeure. Difficile d’approche, la première écoute rebute presque. On en vient à se demander quelle substance faudrait-il ingérer pour pénétrer cet univers complexe et déroutant.

Quand vouloir à tout prix déstabiliser son public et ses attentes vire à l’entêtement, le risque, c’est qu’à force, plus personne ne suive...