Dès les premières notes de
The Thief & The Heartbreaker, les routes désertiques s'ouvrent à nous. Le thermostat s'affole,
Ryan Adams déploie son drapeau américain au
-dessus de notre lit et on finit par retrouver l'harmonica qu'on avait égaré il y a des milliards d'années. La folk n'a jamais aussi vivement représentée les Etats-Unis de
Johnny Cash que sur ce mini-album "mi-coton mi-laine", mi-country mi-blues. On imagine un fier Made In The EU au dos de l'album et des millions d'unités vendues à travers le monde, admirées par les plus grands,
Neil Young et
Leonard Cohen en tête, et même importées jusqu'en France. Il en est pourtant tout autre.
Alberta Cross est un groupe londonien mené par les deux têtes pensantes Petter Ericson Stakee et Terry Wolfers, auxquels viennent s'ajouter sur ce
The Thief & The Heartbreaker le frère de Petter, John Alexander Ericson, à l'orgue et Seb Sternberg derrière les fûts. Sensiblement psychédélique, la musique désabusée du groupe embrasse
Dylan sans la langue, propre et maîtrisée, comme pour conclure avec un genre qui n'en finit pas de se dérober. De l'affolante chanson titre à la dernière plage avec le mot Devil dedans, on titube entre mirages décharnés et
Oasis incarnés, où la sécheresse prend le pas sur la raison et l'Angleterre sur l'Amérique.
Seulement, comme l'affirmait récemment Nick Talbot, talentueux leader de
Gravenhurst, « en Angleterre, la presse raffole des groupes indie, des gangs de chez elle. Elle sait par ailleurs apprécier l'americana et ouvrir son esprit lorsqu'il s'agit d'artistes moins lisses venant des Etats-Unis. En revanche, composer ce genre de musique ici est beaucoup plus difficile à faire accepter. » Alberta Cross sont hélas de ceux-là . Sorti dans l'anonymat en avril dernier,
The Thief & The Heartbreaker possède un potentiel indéniable que Sound Of Violence ne pouvait évidemment pas laisser passer sans constater les légers mais immuables dégâts laissés sur son passage.
The Veils n'ont pas vraiment réussi à percer, Alberta Cross semblent suivre ce même chemin ombrageux. L'avenir le dira, un EP, au sinistre nom de
Leave Us Or Forgive Us, sort dans quelques semaines.