U2

Plus de 120 millions d'albums vendus depuis 1978... 8 albums vendus par minutes depuis la création de ce groupe. Autant dire que celui qui n'a jamais entendu parler de U2 doit être sourd.
Avant même la sortie de cet album, Bono l'avait lui-même qualifié de « vrai » album de U2, du meilleur même, alors quelle joie ! Vite ! Ecoutons le meilleur album de U2 !

Tel un freesbee, le CD vole dans la gueule ouverte du lecteur CD et mon index d'un tacle puissant fauche la touche « play » de la platine. Toute la concentration est là, on s'attend à retrouver les émotions de Joshua Tree, Achtung Baby ou encore War. Première chanson : Vertigo. On zappe, ça fait déjà des semaines qu'elle passe à la radio, et il doit bien y avoir mieux dans cet album ! Dès le deuxième morceau, Miracle Drug, on retrouve le charme romantique de U2 : ligne de basse régulière, guitare frontale, batterie légère, et des paroles montrant que Bono est en grande forme poétique. Par contre ce « remède miracle » ne semble pas vraiment faire effet sur sa voix que l'on sent plus faible que par le passé. Plus loin dans l'album, Crumb From Your Table et Original Of The Species ont ce même goût, ce son U2 que l'on connaît depuis toujours, celui qui nous replonge dans nos souvenirs plus ou moins lointains, car je défie quiconque de ne pas avoir au moins un souvenir sur une musique de la bande à Bono.

Hormis ces morceaux, il y a du bon et du « pas mal du tout ». Du bon avec All Because Of You, chanson entraînante à souhait, avec un rythme soutenu, sorte de ballade emballée faite d'un chant prépondérant et d'une guitare stridente placée au sommet des refrains, morceau qui se durcit en son milieu et vire carrément rock sur la fin. Du « pas mal du tout » avec Love And Peace Or Else, pièce apocalyptique et morceau majeur de l'album. Rythme appuyé, basse roulante, guitare grave, voix de tête tendue, U2 se fait féroce. Ce morceau gagne le droit de repasser en boucle et semble même taillé pour faire le bonheur des fans aux prochains concerts déjà prévus. La fin est explosive. Enfin entendons nous sur le terme « explosif » ! Aucune tempête de cordes saturées ni râlement suraiguë du meneur d'hommes ne viennent troubler l'ensemble qui reste du U2.

Et le reste de l'album ? Aie, il faut aussi parler du reste...
Sometimes You Can't Make it Your Own semble être une faible déclinaison de With Or Without You, One Step Closer et Yahlew sont ennuyeuses à mourir, presque inécoutables entièrement, à moins de vraiment être au fin fond de la déprime, et pour ce qui est de A Man And A Woman, le topo est identique, avec en plus la triste impression qu'elle finira elle aussi sur les bandes FM, après Vertigo et Sometimes You Can't Make It Your Own. Reste le cas de City of Blinding Light, qui ressemble étrangement à Smile Like you Mean It des Killers... Serait-ce au tour de U2 d'imiter les autres ?

Alors voilà, le « vrai » U2, le « meilleur », on le cherche ici mais on ne le trouve pas. Pire, on finit par se dire que Vertigo, zappée au départ car surfaite et sur-jouée à la radio fait partie malgré tout du meilleur de l'album, ce qui n'est pas forcement élogieux quand on sait de quoi fut capable le groupe par le passé, et dénonce un album en parti décevant car très standard. U2 n’a pris aucun risque, alors que leur notoriété aurait pu leur permettre un peu plus d'extravagance et de prise de risque. Une sorte de bombe jamais activée en quelque sorte...
On se demande parfois si Bono, à travers ses différents discours politiques et humanitaires plus ou moins médiatisés n'en finit pas un peu par oublier sa vocation première : le rock britannique.

How To Dismantle An Atomic Bomb reste cependant un album agréable à écouter, rien de mémorable, ou en tout cas rien qui ne bousculera nos souvenir du U2 des années 83 à 91. Seulement peut-on demander à ce groupe, qui présente quasiment le même visage depuis le début, qui s'est assagi, et qui de surcroît possède les clefs d'un des plus gros coffre fort du rock anglais, de foncer tête baissée dans une ambition musicale ? Non, bien sûr que non. Il semble bien que U2 soit trop vieux pour ça, à moins que ça ne soit nous qui devenions, en fin de compte, trop vieux pour écouter U2.