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Gang Of Four

Content

Gang Of Four - Content
Chronique Album
Date de sortie : 24.01.2011
Label : Groenland Deutschland GmbH/PIAS France
2
Rédigé par Chloé Thomas, le 21 janvier 2011
Cela faisait plus de quinze ans que Gang of Four n'avait pas composé de nouvelles chansons. Certes, il y avait eu, en 2005, Return The Gift, un album de réenregistrements de leurs chansons précédentes, qui prouvait au minimum que les compères Jon King et Andy Gill avaient encore du plaisir à travailler ensemble, ce que la tournée qui suivit ne fit que confirmer. Mais avec Content, on passe à la vitesse supérieure, avec une autre ambition. Naturel à un moment où les années quatre-vingt deviennent furieusement tendance, où le post-punk réveille les jeunes dans les festivals.

Or, si à l'écoute on ne doute pas que le groupe proposera encore quelque chose de tonique en live, on est quand même forcé de trouver l'album pas très inspiré. On y retrouve les ingrédients fétiches du combo, un rythme soutenu, un son sec, un chant moins chanté que scandé. Mais il y manque les quelques phrases obsédantes ou refrains accrocheurs qui faisaient pour une bonne part qu'on se souvenait de titres comme I Love A Man In Uniform ou Damaged Goods. La voix, malgré l'énergie beuglante qui y est mise, reste comme en surface, incapable de toucher, de donner envie de la suivre, de la reprendre. Ce n'est pas tant un problème de texte que de structure, avec des répétitions trop marquées pour que quelque ligne que ce soit puisse se dégager.

Avec des riffs qui sonnent presque métalleux, Gang Of Four donne l'impression de se prendre un peu trop au sérieux, de ne pas avoir su, avec l'âge, se regarder jeunes hommes avec une distance un peu ironique, un peu tendre. On entend à chaque titre comme ce son-là a influencé une flopée de groupes du début des années 2000, de Franz Ferdinand à Bloc Party. Mais on comprend aussi, alors que l'on écoute Gang Of Four tenter de rajouter à leur sauce live habituelle un peu de production électronique ou de voix robotiques à la Daft Punk (I Was Never Gonna Turn Out Too Good), qu'aujourd'hui d'autres font mieux qu'eux en la matière. D'une certaine façon, le groupe eighties s'inspire en 2011 des petits jeunes qu'il inspira dix ans plus tôt, et la boucle est bouclée.

Les obsessions du groupe qui transparaissent dans les paroles sont très marquées par les années quatre-vingt, par exemple le credo autoritaire asséné dans Do As I Say et symptomatique des générations guerre froide. Curieusement, cela paraît daté dans les années 2010, même si la conscience nous souffle bien que les totalitarismes sont encore partout. Gang Of Four continue à marteler ses convictions avec la puissance d'un bulldozer de gauche, et que pourraient-ils bien faire d'autre, en effet, que d'endosser ce rôle alors que la mode de l'indignation chez les jeunes sera bientôt passée; il faut bien que quelqu'un s'y colle, sans doute.

Ainsi, avec leur disque honorable, mais vite lassant, Gang Of Four posent en filigrane, et malgré eux, la question (assez dramatique, en réalité, sous ses apparences de question en l'air) de savoir pourquoi la protestation, en musique, est laissée aux quinquagénaires, et sonne désespérément vieux jeu.
tracklisting
    01. She Said "You Made A Thing of Me"
  • 02. You Don't Have To Be Mad
  • 03. Who Am I
  • 04. I Can't Forget Your Lonely Face
  • 05. You'll Never Pay For the Farm
  • 06. I Party All the Time
  • 07. A Fruitfly in the Beehive
  • 08. I Was Never Gonna Turn Out Too Good
  • 09. Do As I Say
  • 10. I Can See You From Far Away
titres conseillés
    Do As I Say, I Party All the Time
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