Tom Vek

Nous sommes en 2005 et un jeune artiste multi-instrumentiste fait le buzz avec son premier album, We Have Sound . Il devient le chouchou des médias ; sa musique, mélange de pop et d'électro sonne très avant-gardiste et tous sont unanimes pour lui prédire un grand avenir et une longue carrière. Seulement voilà, depuis plus de cinq ans, Tom Vek avait complètement disparu de la circulation et on en venait même à se demander s'il n'avait pas abandonné la musique, peut-être pour retourner à ses premières amours, le graphisme. Le 11 avril, coup de tonnerre avec un nouveau single, A Chore, et l'annonce d'un nouvel album début juin. La blogosphère est en ébullition et ceux qui se rappellent encore de lui l'attendent comme le fils prodigue.

Plus de cinq longues années d'absence, c'est risqué pour un artiste en devenir. Tout jeune trentenaire, Tom Vek explique ce hiatus par une volonté de savoir manier toutes les nouvelles technologies dont son nouveau bébé aurait besoin. Lui qui a toujours aimé fusionner les genres, la pop, l'électro ou le funk, nous propose donc aujourd'hui Leisure Seizure, un effort compact, sans fausse note. Issu du milieu rock (voire punk) underground, il met un point d'honneur à ne pas perdre de vue la tessiture live des instruments et ce même s'il utilise les ordinateurs.
Celui qui, à ses débuts, fut comparé à Beck (probablement à cause d'une ressemblance physique un peu arbitraire à l'époque) semble avoir trouvé l'atmosphère qui lui sied. On pouvait reprocher à We Have Sound d'être un peu fourre-tout : hyper créatif, Tom semblait avoir du mal à trier et à rassembler ses idées et il était ainsi difficile de se trouver une ligne directrice ; c'est aujourd'hui bien différent.
Si l'on devait effectuer un parallèle entre Tom Vek et un autre artiste, le premier qui viendrait à l'idée serait David Byrne : les deux semblent graviter dans un monde qui nous est inconnu et dont nous ne saisissons que d'infimes parties ; ils étudient et dissèquent les fonds sonores pour en prélever l'essence mais là où Mr Talking Heads a préféré se tourner vers diverses sources musicales (notamment la World Music), Tom, au contraire, se recentre sur sa propre vision de la musique. Véritable homme orchestre, il profite de pouvoir contrôler ses compositions de A à Z, jouant lui-même tous les instruments.

Leisure Seizure reprend donc là où We Have Sound nous avait laissés, en constatant plus une évolution qu'une révolution dans la musique de Tom Vek. Il garde le même songwriting et la même approche des instruments ; en résulte des compositions dynamiques, à l'image de Hold Your Hand ou du premier single, A Chore. Le synthé se fait plus présent qu'auparavant (Someone Loves You). Les trois titres d'entame (Hold Your Hand, Aroused et A Chore) sont de petites bombes en puissance, avec des refrains très accrocheurs et cette voix si nonchalante, la batterie, parfois lourde (A Chore) et cet effet de répétition qui reviendra tout au long de l'album.
Ici, la pop côtoie l'électro, le lo-fi, le hip-hop (World Of Doubt) ou encore le dubstep (A.P.O.L.O.G.Y.) tout en gardant un fil conducteur assez fort permettant de ne pas être décontenancé par ces changements de style. On pense parfois à du Radiohead post-OK Computer (Close Mic'ed) ou à du Beck (On A Plate) sans que jamais les influences ne se fassent trop présentes.

Si quelqu'un pensait que Tom Vek était fini ou en mal d'inspiration, Leisure Seizure vient prouver le contraire. « I'm a lost cowboy, waiting for the truth » scande-t-il dès le début de Hold Your Hand : serait-ce la raison de son absence ? Attendait-il de pouvoir nous livrer un disque honnête, reflet de ses pérégrinations artistiques ? On peut se le demander. Il a quoiqu'il en soit pris le risque de prendre son temps pour pondre ce deuxième album, choisissant de devoir à nouveau faire ses preuves. Au final, il relève aisément le challenge et ne devrait pas avoir trop de souci à se faire.