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Tom Vek

Interview publiée par Amandine le 6 juin 2011

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C'est au siège de Coopérative Music que nous avons rencontré le fantasque Tom Vek, jeune trentenaire souriant qui fait aujourd'hui la promotion de son tout nouvel album Leisure Seizure. L'occasion pour lui de nous parler de ses cinq longues années d'absence, de ses nouveaux projets et de ses amitiés avec Breton.

Je suis certaine qu'aujourd'hui tout le monde a dû te poser cette question mais j'aimerais savoir...

Quelle est ma couleur préférée (rires) ?

Non, pas celle-là ! Pourquoi as-tu été absent pendant cinq longues années ?

Parce que... (silence) Comment dire... Je crois que c'est parce que je voulais faire un disque spontané et je devais attendre jusqu'à ce que je sente que le bon moment était venu pour sortir la bonne musique qui montrerait de la meilleure façon mes influences et qui ferait part des confidences que j'avais à faire. Donc j'ai attendu très longtemps (rires) ! C'est la façon la plus concise que j'aie trouvée pour expliquer cette absence.

 

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Pendant cette période, as-tu eu des moments de doute où tu as pensé à arrêter la musique ?

Non, parce que j'étais toujours en train de travailler sur de nouvelles choses. Je crois que j'ai développé un nouveau savoir-faire pendant ces cinq années, notamment avec tous les nouveaux outils qui étaient à ma disposition. Je devais apprendre à me servir de l'informatique et de toutes ces machines dont je n'avais pas eu besoin précédemment mais, tu sais, il y a tellement de nouvelles techniques disponibles et maintenant, l'enregistrement studio est intimement lié à l'informatique. En fait, il est très difficile de controverser la façon de faire de la musique de nos jours parce que tout est à disposition et il est intéressant d'avoir autant de ressources audio. Mais en même temps, je voulais pouvoir m'en servir sans qu'il n'y ait que ça, je voulais que ça devienne un tout avec la musique que j'aimais déjà faire. Donc oui, j'ai continué à travailler, à apprendre à me servir de toutes ces techniques, et j'ai appris aussi à importer tous ces sons pour une nouvelle version de ce qu'était ma musique. Parfois, c'était très ennuyeux, mais je voulais bien faire les choses. Tout se devait d'être stable et créatif. Même si j'aime la technologie et que je suis en quelque sorte un geek, il faut que ces sons d'ordinateur viennent jusqu'à ton cerveau et se mélangent à des instruments jusqu'à ce qu'ils forment un bruit... et de la musique.

A quel moment as-tu eu le déclic t'ayant fait comprendre qu'il était temps de faire ton retour ?

A vrai dire, je me le suis seulement dit une fois que l'album entier était terminé. J'ai trouvé un très bel espace en 2009 et j'en ai fait mon studio. A partir de ce moment, j'ai su que je pourrais faire un nouvel album et j'ai passé plus de dix-huit mois à y travailler. Dès que j'ai réussi à inviter un producteur à me faire confiance en lui faisant juste écouter quelques extraits, il m'a laissé le champ libre et m'a donné le temps pour tout terminer correctement. Dès que tu as suffisamment de chansons et que tu commences à te dire « Celle-ci devrait ouvrir l'album, celle-là devrait suivre cette autre... » , c'est que le moment est venu et que tu es prêt.

Tu as été acclamé avec ton premier album, n'as-tu pas quelques appréhensions avec ce nouveau disque, comme si tu devais refaire tes preuves pour la toute première fois ?

Oui, car un deuxième album se doit d'être un progrès par rapport au premier. Je suis assez fier de mon précédent disque mais avec toutes les meilleures intentions dont je pouvais faire preuve, je devais passer à autre chose. J'ai donc envoyé Leisure Seizure à mon label en disant « Voilà de quoi je suis capable aujourd'hui ! » (rires).

 

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Avec We Have Sound , ton premier album, tu étais l'un des précurseurs en ce qui concerne le mix électro-rock lo-fi. Maintenant qu'il y a beaucoup de concurrence sur ce créneau, notamment Hot Chip par exemple, n'as-tu pas un peu peur que les gens se disent que tu n'es qu'un artiste de plus au milieu des autres ?

Pas vraiment. En fait, le premier album de Hot Chip est sorti pratiquement en même temps que le mien, à quatre mois de différence je crois, et depuis, ils ont vécu un essor assez incroyable. Cela me donne de l'espoir mais c'est aussi source d'inspiration pour beaucoup d'autres. Je crois que les gens sentent quand ce qu'ils écoutent est sincère. En même temps, maintenant, presque tout le monde utilise les ordinateurs à côté des instruments. Tu utilises tout ce qui s'avère nécessaire dans ta musique et tu n'es pas le seul à le faire. Mais chacun sa manière je suppose.

Ta musique a toujours été un mélange de pop et d'électronique mais comment as-tu fait évoluer la méthode avec ce nouvel album ?

Je suis encore très basique dans ma façon de jouer de la musique et j'ai une vision très romantique en termes de comment enregistrer parce que tu peux rester entièrement dans l'univers des ordinateurs si tu le veux... mais je n'aime pas ça. Je crois que c'est parce que je viens d'un univers rock et que j'ai besoin de voir et de faire des choses... vivantes. J'utilise donc tout ce que je peux au niveau de la technologie mais j'aime garder ce côté non calculé que l'on peut avoir avec de vrais instruments. Pour la batterie par exemple, j'aime m'enregistrer plutôt que de prendre une boîte à rythme. J'aime l'assemblage des ordinateurs et de la musique live, c'est important pour moi. On peut dire que ma méthode n'a pas tellement évolué , peut-être un peu dans la production et dans le mixage, mais les arrangements sont un peu les mêmes que précédemment. J'ai aussi pensé à comment transposer ma musique en live. Par exemple, avec We Have Sound , les chansons étaient pensées pour un groupe de quatre personnes. Cette fois-ci, j'ai procédé à l'identique car il est important pour moi, quand je compose, de me dire que je vais suffisamment faire confiance à des personnes pour qu'elles jouent ma musique avec moi. Je suis content car avec ma méthode de travail, je n'aurai pas besoin d'un groupe de vingt personnes pour jouer sur scène à mes côtés (rires) !

Finalement, qu'est-ce qui a changé pour toi artistiquement parlant depuis ton premier album ?

Comme je te le disais, je suis très romantique avec la façon de faire de la musique et je n'ai jamais vraiment planché sur comment travailler donc je pense que chez moi, tout est question d'évolution. J'ai continué à écouter de la musique et j'ai forcément été influencé par tout ce que j'ai entendu. Je crois aussi que j'ai été inspiré par tout ça car on a maintenant un bon panel de ce qu'il ne faut pas faire. Je n'ai pas du tout envie d'être cynique en expliquant tout ça. Je peux dire que j'essaie de plus en plus d'avoir le contrôle de la situation en m'occupant par exemple de la logistique dans mon studio... en étant un adulte ! C'est très gratifiant et enrichissant. Je n'ai plus cette vision adolescente comme dans le passé, j'ai développé de plus en plus mon indépendance et j'ai enregistré des choses en lesquelles je croyais vraiment. Mon développement personnel s'est peut-être reflété dans ma musique, probablement même !

 

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Tu as trente ans maintenant...

Oui, tout juste ! Mon anniversaire était mardi dernier.

Donc tu as trente ans et j'imagine que tu as beaucoup évolué depuis tes débuts mais, maintenant, quels sont tes thèmes de prédilection ?

Je suis fasciné par la rhétorique cryptique, cette théorie selon laquelle une chose peut en fait en signifier deux. Si tu ne connais pas le ton sur lequel une phrase est dite, tu peux l'interpréter de deux façons. Je suis très soucieux de l'esthétique de la formulation, du phrasé et des sonorités. Ce n'est pas très sympa de m'interroger sur ça car je dois m'expliquer sur des choses sur lesquelles j'essaie de rester mystérieux ! (rires)
Je crois que mes intentions sont surtout portées par l'atmosphère que j'apporte à ma musique et le chant est pour moi un instrument comme les autres, ni plus ni moins. Je crois qu'en faisant de la musique, je réécris, je retranscris mes plus grandes anxiétés et avec ce nouvel album, il est possible de voir si j'y parviens ou non, ce que j'aime assez car c'est un peu espiègle et malicieux.

Leisure Seizure est distribué par une major, Island, c'est tout de même une chance...

Ils avaient déjà réalisé le premier album et ils m'ont supporté pour le deuxième. J'ai été très fier qu'ils m'honorent de cette façon et qu'ils me fassent confiance de la sorte. En plus, ils aiment ce disque, ce qui aide beaucoup (rires). C'est vraiment une grande chance pour moi parce qu'il y a comme une destruction (et une reconstruction) au niveau de l'industrie musicale, ce que tout le monde sait mais dont peu de monde se préoccupe. Je suis donc très heureux qu'Island m'ait laissé faire mon disque d'une façon honnête, comme je le voulais. Les sous-cultures musicales sont tellement importantes maintenant avec les nouvelles technologies et Internet... J'ai grandi avec tout ça mais il est de plus en plus difficile de tirer son épingle du jeu et être signé par une maison de disque, c'est une grande reconnaissance.

La vidéo pour ton nouveau single, A Chore, avec cette fille blonde, un peu à la Debbie Harry qui chante à ta place, c'était ton idée ?

Oui, c'était mon idée. J'en ai parlé avec un de mes amis avec qui j'ai étudié et qui fait aussi de la vidéo et nous avons trouvé cool cette idée de vieux show comme sur la télé câblée américaine il y a quelques dizaines d'années. Mon ami voulait donner une version plus moderne de tout cela. Au début, nous avons pensé à un court-métrage ou quelque chose dans le genre mais nous n'avions pas assez d'idées pour le produire. Nous nous sommes bien amusés à produire ce clip.

T'es-tu à nouveau occupé du visuel de la pochette de Leisure Seizure comme pour ton premier album ?

Oui, j'ai dessiné l'artwork à nouveau. A vrai dire, je suis un peu obligé : à la base, je suis graphiste, c'est mon job et j'aime beaucoup faire ça, ça me sort de ma manie de la musique. J'aime l'idée de communiquer des besoins plus fondamentaux. C'est probablement ma propre vision des choses mais je me dis que là, je peux être l'artiste et le communiquant à la fois. Je pense que le design est quelque chose de très direct. Le contexte est très important pour toute forme d'art : par exemple, une galerie est un endroit très calme et confiné qui donnera une certaine vision des œuvres qui y sont présentées. C'est un peu pareil ici, j'aime contextualiser mon art en quelque sorte.

 

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J'ai vu que BretonLABS (ndlr : des membres du groupe Breton ) ont remixé A Chore. Les connais-tu personnellement ? Ce sont eux qui t'ont demandé ce remix ou le contraire ?

Oui, ils font partie de mes amis.

J'ai eu l'occasion de rencontrer Roman (ndlr : Rappak, membre fondateur de Breton) dans le cadre d'une interview, c'est une personne très sympathique !

Oui ! Il est adorable et il me rappelle un peu comment j'étais à son âge. Mais Roman parle très bien français, j'espère qu'il l'a montré pendant l'interview ! Roman est quelqu'un de très talentueux et dévoué corps et âme à ce qu'il fait. Je suis très heureux que les membres de Breton soient mes amis. D'ailleurs, ils vont tourner avec moi au Royaume-Uni, je suis très excité à cette idée. Et leur remix est génial !

Une dernière question : quels sont tes projets pour ces prochains mois, pour ton grand comeback ?

Oh ! « My big comeback ! ». Ce serait un super statut que je pourrais mettre sur Twitter (rires) ! Après la promotion, il y a pas mal de lives prévus mais avant ça, nous devons répéter avec les autres musiciens pendant un moment. Il y aura également d'autres vidéos officielles qui suivront, d'autres choses très excitantes en partenariat avec d'autres artistes. Nous avons aussi des petites idées originales de merchandising pour ne pas seulement présenter le disque dans un boitier anonyme et évidemment, pendant ce temps-là, j'espère continuer à composer de nouvelles choses !