Rolo Tomassi

Avec leurs deux albums précédents, Rolo Tomassi avaient réussi à prouver qu'un groupe de mathcore pouvait être autre chose que la caricature qu'on voulait bien souvent lui prêter et faire preuve d'audace et de malice. Aujourd'hui, c'est sur leur propre label et avec un nouveau line-up, suite aux départs du guitariste principal et du bassiste, qu'ils nous reviennent avec cet Astraea, dans une continuité à la fois logique et surprenante.

Bien que résolument plus pop et plus ambient que ses prédécesseurs, ce troisième album n'en garde pas moins la fougue et les guitares abrasives qui ont fait la réputation de Rolo Tomassi. Toujours aussi centré sur la voix de la jolie Eva Spence, il n'en demeure une réelle volonté de basculer entre chant screamo et voix feutrée pour un effet déstabilisant créant cet équilibre instable inhérent au groupe. Si on avait déjà pu constater cette utilisation sur les albums précédents, ici, la technique s'avère récurrente (Illunis étant la meilleure illustration). Dans une texture sonore des plus riches, le groupe explore de plus en plus la dimension expérimentale de son art, notamment avec l'utilisation des claviers et des sonorités électroniques (The Scales Of Balance).

Tout commençait plutôt mal avec la grandiloquence de Howl et ses orgues d'église caricaturaux mais Rolo Tomassi chassent le mauvais goût d'un revers de la main pour revenir à du classique (The Scales Of Balance) mais c'est réellement avec Remancer que les choses sérieuses commencent. Le groupe réussit le pari risqué d'alterner entre douceur (Prelude II et sa minute de piano), rage et expériences d'alchimiste, et c'est bien dans ce dernier exercice qu'on les préfère. Parfois, la surprise n'est pas bonne, comme sur Gloam et ses horribles claviers vintage, mais souvent nous sommes bousculés, décontenancés. Illuminaire sonne la fin de cette épopée ; entre shoegaze et screamo, les opposés s'attirent pour former le morceau ultime, celui qui nous laissera sur la note parfaite.

Avec leur Astreae, Rolo Tomassi signent ici l'album de tous les dangers ; en s'aventurant vers des contrées qu'ils n'avaient, jusqu'à présent, que défrichées. Ils se cassent parfois les dents mais nous livrent tout de même des moments extatiques faisant de cet album le plus beau et le plus intéressant que les Anglais nous aient donné l'occasion d'écouter jusqu'alors.