Palma Violets

Il faut le dire, nos gaillards l’ont quand même bien cherché : repérés à force de shows improvisés dans leur studio londonien, Palma Violets ont poussé le vice jusqu’à s’armer d’un premier tube monstrueux, un Best Of Friends incandescent et indécent tant il est jouissif, incarner un rock d’un autre temps, traversé de la première à la dernière note par leur gouaille de jeunes branleurs des quartiers branchouilles de Big Smoke, et jouer la carte du dédoublement de personnalité, choisissant d’exposer aux yeux du monde deux frontmen plutôt qu’un seul.

Difficile ainsi de retenir ce bon vieux hypomètre, qui va alors s’emballer jusqu’à atteindre son niveau le plus haut, déclenchant au passage un florilège de comparaisons, souvent idoines, mais jamais des plus simples à soutenir (The Libertines, The Clash,...). De là, difficile pour le groupe de ne pas sentir l’incroyable pression harnachée sur ses épaules, de ne pas sentir concerné, à l’heure du premier disque, par la fameuses ritournelle du ça passe, ou ça casse. Bref, il est comment ce 180 alors ?

Achevons le suspens d’entrée : le disque est suffisamment riche en bonnes choses pour ne pas pilonner la carrière naissante de ses géniteurs. Mais 180 manque également de constance, un fait que certains chercheront absolument à expliquer par l’impétuosité dont aime à faire preuve notre jeunesse, et qui l’amène, en conséquence, à dégainer parfois trop vite. On pourrait aussi convenir qu’au vu du turnover actuel (combien de nouveaux disques et artistes chaque semaine, chaque mois ?), mieux vaut ne pas partir trop tard une fois le buzz parti. La mémoire, on le sait, est du genre frivole.
Quoiqu’il en soit, le premier long format de Palma Violets est doté de quelques arguments imparables. Traversé tout du long par une énergie punk des plus salaces, savant mélange de véhémence rance et de j'menfoutisme parfaitement incarné, la bourrasque rock que souffle 180 est d’autant plus jouissive que tout sonne ici comme dans un bon live, réverb cradingue, grain grossier, et imperfections sonores à la clé. De quoi donner plus de profondeur à des titres déjà enluminés du timbre de voix moucheté de rage et d’orgueil du chanteur, qui n’est pas sans rappeler, mais cela a déjà été dit maintes fois, celui de feu Joe Strummer. Un héritage dont ils ne peuvent s’affranchir, tout comme leurs congénères WU LYF d'ailleurs, bien que le mimétisme se voulait moins prononcé chez ces derniers (ce qui n’empêchait pour autant pas leur musique d’être entachée d'une certaine lourdeur).

Le plus frustrant dans toute cette histoire, c'est sûrement l'absence sur 180 de tubes aussi évidents et percutants que peut l'être le génial Best Of Friends, qui n'a pas franchement besoin de se forcer pour mettre une bonne longueur à tous ces petits camarades. Un détail qui n'en est finalement pas un quand on parle d'un groupe dont la vocation première est de donner dans le titre simple, court et efficace.
Au delà de ça, l'album pêche dans ses moments les moins pompiers, comme si Palma Violets savaient à merveille mettre le feu, un peu moins comment l’éteindre. Si on n’en peut plus de taper des pieds et de hocher la tête à l’écoute des brûlots que sont Rattlesnake Highway et autres Tom The Drum, on reste plus circonspect face à un All The Garden Birds bien plan-plan, tout juste sauvé par un changement de rythme intervenant à mi-parcours, comme si le groupe s’était subitement rendu compte de son erreur d’appréciation. Plus loin, c’est I Found Love qui nous donne une folle envie de passer à la suite, tant ce morceau brouillon donne l'impression de n’avoir jamais vraiment été écrit: c’est bien simple, le groupe ne s’embarrasse même plus d’un vrai refrain, préférant allègrement chantonner de grossiers la-la-la, et ce plusieurs secondes durant.

Ultra-performants sur scène, Palma Violets pourront toujours compter sur leurs prestations live et les quelques bombes rock qu'ils sont sous le bras pour ne pas disparaître des radars sitôt leur premier album sorti. Ça devrait amplement suffire pour le moment.