Wire

2013, l'année du treize ? C'est un peu facile mais, après Depeche Mode, c'est au tour des londoniens Wire de sortir leur treizième album studio et tous les deux comptent chacun treize titres au compteur ! Débutée en 1976, la carrière du groupe fût assez chaotique avec deux longues interruptions d'activité mais semble bien avoir repris du poil de la bête. Trois ans après Red Barked Tree, les maîtres du post-punk qui ont influencé tant de groupes actuels sont de retour, mais pas forcément comme on l'aurait cru.

Au lieu de nous servir du neuf, le groupe est allé puisé dans ses archives et en a exhumé des ébauches de morceaux élaborés peu avant sa première période de pause. Ces titres joués en partie en concert n'avaient jamais vu le jour sur galette à l'exception d'un album live datant de 1981 et sous des noms différents.
Dès le début, nous sommes plongés dans l'ambiance de Wire. Un son froid, métallique, une voix robotique, une basse lourde et répétitive, d'inquiétantes notes de synthé, c'est tout un monde qui s'ouvre sur Doubles & Trebles. Ce rock industriel peut décontenancer. Des paroles assénées violemment, des notes pas forcément agréables, le post-punk est du genre à ne pas se faire apprécier d'emblée. Après un début d'album en demi-teinte et assez mou, le groupe s'offre une belle bulle de récréation avec un refrain punk jusqu'à la moelle où la batterie, les guitares, et la basse se noient dans deux joyeuses mais (trop courtes) cavalcades de moins de trente secondes chacune sur Adore Your Island. Jouissifs en diable, ces passages sont immédiatement contre-balancés par l'atmosphérique Re-invent Your Second Wheel et ses mystérieuses paroles énumérant des lettres de l'alphabet dont le sens m'échappe. Puis le rythme se fait de nouveau plus énergique et rentre-dedans pendant deux courtes minutes avec le hargneux Stealth Of A Stork.

Cet album de Wire tire parfois vers la pop comme avec Magic Bullett tout en gardant à l'esprit les spécificités du groupe dans la recherche d'effets sonores qui sortent le morceau de l'ordinaire avant de contre braquer d'un coup sec. Il donne l'impression de se chercher en permanence et de jouer aux montagnes russes. On se dit alors que ces fragments du passé n'auraient peut-être pas dû être réunis de cette manière. De nombreux titres finissent d'ailleurs par se ressembler ce qui est bien dommage. On a même, paradoxalement, parfois la sensation d'écouter un disque plat, sans nuance.
Comme un jeu de miroir, Wire semblent même reprendre d'anciens titres de groupes qui leur ont succédé. Il est ainsi quasiment impossible de ne pas penser à Tool sur Time Log Fog tant dans la basse qui glace les sangs que dans la diction et les effets sur la voix. Wire paraissent également habiter de groupes les ayant précédés. Ainsi sur le quasi instrumental & Much Besides, le frappé des guitares et les claviers rappellent leurs compatriotes de Pink Floyd période Syd Barrett et période The Wall dans le phrasé de B/W Silence. Sur Eels Sang, c'est le punk rock germanique qui revient à la charge de bien belle façon avec un travail sur l'accent et une instrumentation adéquats. Certes, il ne s'agit objectivement pas de leur meilleur album mais il vaut certainement mieux un album moyen de Wire qu'un autre de certains artistes ... Il lui manque ce petit quelque chose pour en faire un bon album. Plus de cohérence, moins d'idées disparates, que sais-je encore ?

Alors oui, la relecture du passé est bien devenue le présent, mais on espère pour l'avenir, que, comme le laisse supposer le titre de l'album, elle ne soit pas tout simplement devenue Wire.