Róisín Murphy

Il avait fallu quatre ans à la voix de Moloko pour sortir son troisième album solo, Hairless Toys, qui en guise de bienvenue avait été nominé pour le Mercury Prize. A peine un an plus tard sort Take Her Up To Monto. Le secret d'une telle rapidité est que l'album a été écrit et enregistré en même temps que son prédécesseur.

Même si le titre vient d'une chanson folk de la capitale Irlandaise, son pays d'origine, c'est un album sur Londres, la ville de résidence de l'artiste. C'est un festival de sons et d'ambiances dès le morceau d'ouverture, Mastermind. On y retrouve des influences très cosmopolites, un style sophistiqué et le son est très maitrisé. Le côté jazz et électro pointu fait spontanément penser à Björk.

Reflet de la ville toujours en mouvement et en mutation, on a parfois l'impression que plusieurs disques jouent en même temps, tellement il y a de couches et d'éléments différents sur chacun de ces morceaux. C'est le genre de disque à jouer très fort pour entrer complètement dans cet univers et en capturer tous les détails.
Au milieu des synthés et des samples, il y a un instrument naturel qui se détache, c'est la voix de Róisín Murphy. Écoutez Thoughts Wasted pour découvrir l'étendue de son registre, des accents de David Bowie quand elle va chercher un timbre à la fois inspiré/expiré, grave et aigu ou la partie finale quasi parlé d'une voix plus grave et ferme.

Moins facile d'accès que son jumeau, ce disque en conserve la même variété de registres qui peut perdre l'auditeur. On peut passer d'une bossa tranquille (Lip Service) à un long cauchemar (Nervous Sleep qui porte très bien son nom). A la qualité de la production, il est manifeste que les artistes savaient quant à eux où ils voulaient aller.
La visite s'achève par Sitting And Counting, un des morceaux les plus calmes de l'album, mais aussi un des plus beaux et étranges. Ces phrases susurrées, des accords plus ou moins harmonieux de piano, des gémissements, forment une ambiance cassée et mélancolique à la Portishead.

Comme sur son prédécesseur, il y a beaucoup de très bonnes choses sur cet album, mais aussi beaucoup d'ambiances différentes. Celui-ci semble avoir regroupé les morceaux les plus abstraits, j'aurais préféré regrouper les titres par ambiance, et aurais pris celui avec le côté obscur.