logo SOV

Gorillaz

Humanz

Gorillaz - Humanz
Chronique Album
Date de sortie : 28.04.2017
Label : Parlophone
3
Rédigé par Cassandre Gouillaud, le 29 avril 2017
Bookmark and Share
Qu'attendre de la musique, dans les moments où l'expression culturelle libre semble d'autant plus essentielle que les dangers sont grands ? Voilà sept ans que Damon Albarn et Jamie Hewlett n'avaient plus élevé leurs voix. De longues années qui ont laissé le temps au paysage musical de se renouveler de multiples fois, d'impulser des expérimentations nouvelles, et de repousser des frontières auparavant considérées acquises. Ce retour, attendu parfois désespérément, se devait d'être à la hauteur des attentes, et conscient d'un monde où les règles du jeu avaient été rebattues. Gorillaz s'étaient rendus indispensables pendant la première décennie de ce siècle, constat plus si évident aujourd'hui qu'il avait pu l'être.

Humanz voit 2-D, Murdoc, Russel et Noodle se saisir de ce qui doit être aujourd'hui l'humanité et les forces qui l'animent. Débutant, sans équivoque, sur I Switched My Robot Off, ce cinquième album semble prolonger le propos de l'acclamé Everyday Robots de Damon Albarn. Moins revendiqué comme une déclaration politique qu'une tribune d'expression personnelle offerte à ses très nombreux collaborateurs, l'album poursuit la quête d'un meilleur futur. Ce monde est incompréhensible, sombre, peut-être même fou. Humanz lui répond en étant une fête électronique à ciel ouvert, plutôt le récit de ceux qui ne renoncent pas et animent la résistance. Un message emprunt d'un espoir salvateur, en des temps qui auraient tendance à l'amenuiser.

Ces nombreuses et diverses collaborations ne manquent pas non plus de rappeler à la musique qu'elle est investie d'une force particulière, celle du rassemblement. Elles caractérisaient déjà grandement Plastic Beach, mais prennent malgré elles une dimension toute particulière sept ans après. Sans doute car il n'avait jamais été aussi urgent de sauver, coûte que coûte, ce lien qui doit nous unir. L'album nous offre le modèle d'une alternative souhaitable et désirée qui fait de lui un album de son temps, aussi bien dans les valeurs qu'il incarne que dans l'effort musical faisant la part belle à une électro-pop soigneusement produite.

C'est pourtant musicalement que Humanz ne fait ni honneur à ses prédécesseurs directs, ni à la production récente de Damon Albarn. Plus précisément, il ne parvient pas à être autre chose qu'une agrégation de quelques réussites, noyées dans des interludes trop nombreux et des morceaux qui se laissent écouter sans accrocher l'oreille. Parmi eux, Ascension et Andromeda se détachent du lot par leur rythmique appuyée, la seconde étant indéniablement l'hymne pop le plus réussi de l'album. Hallelujah Money, issu d'une collaboration avec Benjamin Clementine, séduit par cette rencontre inattendue entre électronique, gospel, et la voix grave du crooner anglais. Il est d'autant plus dommage qu'il soit immédiatement suivi d'un We Got The Power enjoué, mais vide d'une quelconque idée musicale. L'album peine à maintenir une structure homogène, et nous perd à force de diluer de part et d'autres son concept originel. Busted and Blue, ballade aérienne et seul titre en solo de Damon Albarn, suffit aussi à nous faire regretter son absence relative sur cet album. À trop vouloir rassembler, ce qui fait le cœur même de Gorillaz ne devient que le fade arrière-plan d'un album dont l'on ne sait plus s'il est le leur ou celui de leurs collaborateurs. L'intention, aussi honorable qu'elle pouvait être, ne parvient pas à produire de cohérence suffisante.

Humanz est, finalement, l'exemple-type même de la difficulté d'articuler albums et chansons. Il rappelle qu'un bon disque, aujourd'hui, ne doit jamais négliger le fil rouge qui tient tous ses éléments ensemble et être plus qu'une compilation de morceaux réussis. Gorillaz n'avaient plus vraiment à prouver qu'ils étaient les auteurs d'une production musicale de grande qualité ; il paraissait alors justifié d'attendre une réflexion d'ensemble un peu plus poussée.
tracklisting
    01. Intro: I Switched My Robot Off
  • 02. Ascension (feat. Vince Staples)
  • 03. Strobelite (feat. Peven Everett)
  • 04. Saturnz Barz (Spirit House) (feat. Popcaan)
  • 05. Momentz (feat. De La Soul)
  • 06. Interlude: The Non-Conformist Oath
  • 07. Submission (feat. Danny Brown & Kelela)
  • 08. Charger (feat. Grace Jones)
  • 09. Interlude: Elevator Going Up
  • 10. Andromeda (feat. D.R.A.M.)
  • 11. Busted and Blue
  • 12. Interlude: Talk Radio
  • 13. Carnival (feat. Anthony Hamilton)
  • 14. Let Me Out (feat. Mavis Staples & Pusha T)
  • 15. Interlude: Penthouse
  • 16. Sex Murder Party (feat. Jamie Principle & Zebra Katz)
  • 17. She's My Collar (feat. Kali Uchis)
  • 18. Interlude: The Elephant
  • 19. Hallelujah Money (feat. Benjamin Clementine)
  • 20. We Got the Power (feat. Jehnny Beth)
titres conseillés
    Ascension, Andromeda, Busted and Blue
notes des lecteurs
notes des rédacteurs
Du même artiste