Max Bloom

Max Bloom entame une nouvelle étape de sa carrière musicale. Après la dissolution de Cajun Dance Party et la pause à durée indéterminée de Yuck, son projet phare tout au long de cette dernière décennie, le Londonien se lance en solo. Libre de la pression d'un public déjà établi et d'un son prédéfini, le chanteur a pu prendre le temps de sortir l'album qu'il voulait, en contrôlant chacune de ses étapes de fabrication. Quatre ans après son dernier disque, Max Bloom s'autorise à parler de ses relations personnelles, chose qu'il s'était toujours interdit de faire jusqu'à présent.

Perfume est un album intimiste racontant la douleur, mais aussi la reconstruction après une rupture amoureuse - en l'occurrence celle avec sa petite amie après huit ans de relation . En termes de sonorités, cet opus s'éloigne définitivement du son typiquement rauque avec lequel Yuck a fait main basse sur les playlist des Anglais en 2011. En témoigne le morceau d'ouverture To Be Alone, composé au piano, avec lequel le Londonien offre une réflexion planante et douloureusement brute sur ses maux. Perte de l'être cher, dépression sévère et retour dans sa maison d'enfance... La liste des poncifs en la matière est très longue, mais Bloom ne tombe pas dans le piège de la complainte larmoyante.


C'est là son tour de force, l'artiste se sert des affres du passés et autres tourments pour livrer un message positif. Dans Thinking About You il proscrit le « reniement » de sa relation passé et explique comment cette épreuve a fait de lui une personne plus forte, et même lui a permis d'en tirer bénéfice. Bloom confie s'être inspiré du stoïcisme (courant philosophique majeur de la morale antique, ndlr) afin de rendre les situations difficiles plus agréables, estimant que la faute revient au destin qui nous échappe totalement et qu'il faut apprendre à accepter. Bloom ne cache pas pour autant la difficulté d'appliquer cette doctrine : Call Me When It's Over fait écho au sentiment pénible de vouloir avancer lorsque l'on regarde dans le rétroviseur tandis que Bottle parle des biens matériels dont chacun a plus ou moins du mal à se séparer pour une rupture franche et définitive.

Musicalement, le spectre de Yuck et ses sonorités nineties plane sur l'album mais dans un registre plus mélodique et langoureux. Il évite l'écueil de la linéarité et l'album se montrent en effet assez varié dans ses ambiances comme dans ses tempos. Ainsi, le londonien nous balance tout autant de la chanson guillerette, et presque légère (Thinking 'Bout You), que de la composition mélancolique (It's Alright, Happy Alone - Into Eternity), ou à la limite de la déprime (Will It Last A Lifetime?). On sent que les héritages de ses précédents projets et les inspirations ont été digérés, la technicité du musicien faisant le reste. Les puristes retrouvent certaines distorsions saturées arrachées aux décennies précédentes, mais Bloom a préféré faire la part belle à des chansons très épurées, que l'on peut jouer sans aucun effet, rendant hommage ainsi à ses auteurs préférés (George Harrison, Elliott Smith ou Harry Nilsson).

Cet album marqué par une rupture amoureuse douloureuse, est d'une mélancolie déchirante. Max Bloom y exorcise ses doutes et ses angoisses. Indispensable pour avancer sur le chemin de guérison, il livre un album post-rupture, incontestablement plus doux que ses anciens travaux, rempli d'un contraste saisissant entre angoisse et positivité. Dans ce carcan taillé sur-mesure, Max Bloom s'éloigne encore un peu plus des sonorités du groupe qui a fait sa renommée, preuve que l'artiste peut se réinventer avec une belle créativité.