Royal Blood

Avec plus de deux millions d'albums vendus dans le monde et une distinction de « Meilleur Groupe Britannique » aux BRIT Awards, Royal Blood est devenu une des formations les plus importantes du moment. Lorsque Mike Kerr et Ben Thatcher se sont assis pour parler de la création de ce nouvel album, ils savaient ce qu'ils voulaient accomplir. Cela impliquait un retour conscient à leurs racines, à l'époque où ils avaient fait de la musique influencée par Daft Punk, Justice et Philippe Zdar de Cassius, et revenir à une approche qui avait rendu leur premier album éponyme si passionnant, viscéral et original.

Il n'était pas chose aisée que de deviner le contenu de Typhoons jusqu'à la parution de Trouble's Coming dans le cadre de la sortie de FIFA 21 l'été dernier : une infusion de pur rock 'n' roll et d'une touche disco. Frappant un melting-pot de riffs rock enflammés et de rythmes dansants, ils ont livré quelque chose de frais, d'inattendu et pourtant tout à fait en phase avec ce avec quoi ils avaient forgé leur réputation. Une nouvelle formule que l'on retrouve tout au long de ce nouvel opus, comme en témoignent les pistes suivantes, Oblivion et le nouveau single éponyme Typhoons. Le riff de basse de Kerr jette une allure hypnotique à mesure qu'il s'intensifie au fil des mesures, tandis que sa voix bascule sans modération entre un rugissement rock brut et un fausset émouvant. Il est soutenu par les rythmes tendu tonitruants de Thatcher, imprégnés de charlestons chargés de groove. Les pistes défilent et le groupe prouve que l'on ne doit plus l'associer à un seul style avec une vision plus diversifiée et complexe sur le plan sonore.


La preuve avec Who Needs Friends produite par Paul Epworth (récompensé à de multiples reprises aux Grammy Awards pour son travail avec Adele), un morceau downtempo désorientant, mais qui trouve toute sa place par le spectre sonore large que propose Typhoons. Les références à la nouvelle gamme d'influences venues tout droit des années 80 et des techniques de produits électroniques se font sentir avec le déploiement des voix vocodées sur Million & One et Limbo.
C'est dans ces morceaux que Royal Blood perd de son intérêt. En cause, de longs pans électroniques donnant lieu aux moments les plus ennuyeux de l'album. Les puristes de Royal Blood peuvent être déçus par les morceaux plus légers qui prennent une direction plus douce, tels que Either You Got It, ternissant l'image de « rock and roll sauveur » du groupe que Kerr et Thatcher se sont retrouvés à brandir au cours de la dernière décennie. Une image balayée d'un revers de manche avec Boilermaker, morceau devenu un favori des fans de Royal Blood depuis que le duo a proposé ses débuts au Reading Festival en Angleterre en 2019. Produit par Josh Homme du groupe Queens Of The Stone Age, le titre est à la hauteur de sa réputation et est plus que égalé par Mad Visions, qui évoque un prince hyper-agressif. « C'est si bon de lâcher prise », lance justement Kerr dans ce titre et c'est exactement ce que Royal Blood proposent tout au long de Typhoons. Il se termine par une dernière surprise sous la forme de la ballade au piano All We Have Is Now, un rappel vulnérable et révélateur de vivre dans l'instant.

Royal Blood n'a jamais prétendu être des innovateurs, mais en élargissant la palette sonore de sa discographie, le duo peut se targuer de proposer de nouvelles sonorités sans trahir les atouts qui ont bâti sa renommée. Les puristes se raviront de l'énergie volcanique des débuts, mais ne seront peut-être guère séduits par les moments plus calmes et l'ouverture électronique mis en avant de ce nouveau disque. Typhoons n'est pas pour autant un mauvais album, loin de là. Si Kerr et Tatcher avaient déçu une partie de leur public avec leur deuxième album How Did We Get So Dark? (2017), il y a fort à parier les garçons de Brighton revitalisent une partie des troupes perdues en route et fassent monter de nouvelles personnes à bord.