RHODES

On avait attaqué la chronique du dernier album de RHODES en parlant de l'île et du colosse, mais sachons rester sérieux pour une fois, car de toute façon le seul colosse de Lille c'est Martine Aubry, et ça vous le savez déjà. Cela fait donc un an que l'on redécouvrait David Rhodes, après huit longues années de silence, sur son deuxième album Friends Like These. Une belle collection de chansons intimes, chantées d'une sublime voix et tapissées tantôt d'arpèges acoustiques, tantôt d'une cascade de piano remuant l'écume des jours et nos cœurs de tristes lovers. Revenant nous voir beaucoup plus vite que la dernière fois, l'enfant spirituel d'Adele et de Sam Smith est-il parti pour nous surprendre, ou ce nouvel album (un-finished) est-il un tome deux poursuivant l'histoire du beau gosse à l'âme en peine, héros malheureux et attachant du premier roman ?

A tous les amoureux du suspense, sachez que la bonne réponse était la réponse deux, en même temps personne ne s'attendait ici à un album de rap ou de black métal, et c'est sans doute tant mieux. Tant mieux car RHODES est tel qu'il est, un lover aux cheveux bouclés à même de vous griller tous vos plans s'il se met au piano à côté de vous, mais aussi à même de subtilement vous aider à conclure si vous vous contentez de le passer en vinyle dans votre salon. Et si (un-finished) devait être un tome d'une longue série, il serait le tome de l'intimité, celui qui voit le personnage principal partir en ermite dans la forêt pour réfléchir sur sa vie, peser ses erreurs, retracer ses joies, retrouver qui il était, qui il devient, et qui il veut être.

De ballades aux puissants refrains sur fond de guitare acoustique (How I Love You, Toothpaste, Faraway) en ballades au piano poussant la voix de David Rhodes dans ses derniers retranchements (Happy, All I've Ever Known, Don't Cry), l'album se promène donc agréablement, ni trop haut ni trop bas, jusqu'à se permettre deux interludes planants dont la bien-nommée Being In The Sky, inspiration de son fils de cinq ans entendant son père jouer dans sa chambre. On regrettera toutefois, par rapport à l'album précédent, de ne pas trouver plus de chansons pop et soul relançant régulièrement la machine, évitant ainsi à l'auditeur la sournoise et classique « sieste de septième chanson », trop bien posé qu'il est dans la couche cotonneuse dans laquelle on vient tout juste de l'installer.

Un album de RHODES qui revêt une forme de passage obligé scénaristique, de développement de personnage que l'on aurait aimé plus dynamique, plus chevaleresque, rocambolesque, mais qui au final est comme il est, et nous conforte dans tout le bien que l'on pense de l'artiste. Un troisième album bourré de ouate et de plumes d'oie, auquel il aura tout de même manqué quelques Watts pour qu'on ne lui préfère pas son prédécesseur, mais que l'on n'oubliera pas de se passer lors des siestes crapuleuses du dimanche matin.