Los Bitchos

Voilà un album qui était particulièrement attendu ! Lorsque Los Bitchos avaient débarqué en 2022 avec Let The Festivities Begin!, elles avaient donné un sérieux coup de fouet à la scène pop anglaise. Voilà que quatre filles, produites par Alex Kapranos himself, claquaient un album purement instrumental hyper réjouissant et cohérent sur toute sa durée, ce qui n'était pas chose gagnée vue la difficulté de l'exercice. Deux ans après, le quatuor est toujours le même, mais c'est Oli Barton-Wood, qui a notamment travaillé avec Wet Leg, qui succède au Franz Ferdinand en chef derrière la console. Et comme dirait l'expression consacrée, Talkie Talkie, c'est le changement dans la continuité pour le quatuor.

Le changement car, par rapport à l'album précédent, des rythmiques quasi funk viennent s'inviter, et ce dès le morceau d'ouverture, Hi !, très réussi avec ses « Hi ! », « Hey ! » et autres « Suck on that one, bitch » (ce seront les seules paroles de l'album !). La basse groove et ondule sévère, et il est assez difficile de rester insensible à cette énergie. D'autres titres explorent cette même veine funk rock (Talkie Talkie, Charlie Charlie), et se teintent même de sonorités caribéennes (l'étonnante Road, qui commence sous les Tropiques avant de finir dans un club new-yorkais) ou hispanisantes (la futée La Bomba). Los Bitchos tentent aussi une incursion en territoire psychédélique vaguement jazz avec It's About Time, mais elles se montrent nettement moins convaincantes sur ce type d'exercice, le morceau ressemblant à du Santana ayant avalé une boîte de Prozac.

La continuité, ce sont des morceaux portés par une guitare quasi twang (la bien nommée Don't Change, 1K !) et orientés pop, sonnant parfois, chose rare, comme de véritables tubes instrumentaux (Kiki, You Complete Me, Naughty Little Clove, Tango & Twirl, Let Me Cook You). Des titres sur lesquels Los Bitchos démontrent que, derrière leur côté rigolo-on-fait-la-teuf, il y a quatre sacrées bonnes musiciennes, qui maîtrisent parfaitement leurs instruments et l'art de la composition d'un bon titre pop-rock. Quand elles réussissent à trouver l'équilibre sur toute la durée d'un morceau, c'est de très haut vol, et c'est ce qui se produit sur (attention au titre) Open The Bunny, Wasting My Time, seul titre pour lequel on regrette qu'il n'y ait pas de parties chantées tellement il est efficace.

Alors certes, l'effet de surprise qui faisait beaucoup pour le charme du premier album s'est estompé, mais Los Bitchos ont créé un disque extrêmement plaisant à écouter, à défaut d'être renversant. Le passage à la scène des compositions de Talkie Talkie sera extrêmement intéressant à observer, car certaines risquent de prendre une toute autre ampleur.