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End Of The Road Festival

Salisbury, du 29 août au 1er septembre 2024

Live-report rédigé par Laetitia Mavrel le 2 septembre 2024

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Seconde journée et premier gros challenge que ce vendredi au End Of The Road Festival. Ayant profité de ce petit après-midi du jeudi pour faire notre repérage, indispensable pour gagner de précieuses minutes entre les scènes tout en profitant un maximum des activités offertes, nous avons sélectionné pas moins de huit concerts à couvrir, entre valeurs sûres et espoirs de la rédaction, tout en prenant le temps de grappiller sur le chemin cornets de frites généreux et autres gourmandises sucrées vegan. Un festival où l'on ne mange pas sans faim n'est pas un festival réussi, tout le monde le sait.


Premier invité de marque, le soleil, denrée somme toute rare dans la région. C'est dès 13h45 que nous pénétrons sur le site pour nous ruer vers la discrète scène Piano, minuscule estrade faite de bric et de broc dissimulée dans les petits bois, entre les tentes des nombreux naturopathes présents et autres distilleurs de bières artisanales. La programmation de cette scène est tenue secrète, même pour la presse. Coup de poker réussi, le premier set est la réunion en acoustique de deux grands artistes présents respectivement plus tard dans la journée, Bill Ryder-Jones et Gruff Rhys. Les deux compères accompagnés de la violoniste Evelyne Halls proposeront durant vingt petites minutes un florilège de leurs morceaux les plus folk, agrémentés de quelques notes des Beach Boys, devant une poignée de spectateurs tous assis dans l'herbe, en toute décontraction.


Une mise en jambe des plus agréables pour débuter le marathon, et direction la scène Woods pour le duo anglais MRCY. Composé de Barney Lister et Kojo Degraft-Johnson, le groupe nous avait apporté bien du réconfort à l'écoute de son tout premier album Volume 1 sorti en mai dernier. Présent dans la capitale alors en première partie au Zénith des Américains de Black Puma, c'est ici sur la scène la plus prestigieuse qu'ils se produisent et l'heure précoce (seulement 14h15) n'empêchera pas les nombreux présents de se presser auprès des musiciens pour se laisser bercer par la northern soul si délicate et voluptueuse du duo. Encore peu connu de par chez nous, nous espérons retrouver MRCY dans la capitale rapidement, ces trois quart d'heure toute en velours nous ayant une fois de plus convaincus.


Le prochain choix nous amène pour la première fois du festival sur la magnifique scène Garden, située en plein air en lisière de forêt, dont les sentiers en cailloux bancs nous rappellent ceux du domaine de Saint Cloud. Nous y retrouvons donc Bill Ryder-Jones, avec une nouvelle chemise et sans ses lunettes de soleil malgré la très grande luminosité à ce moment. Certains d'entre vous se souviennent encore de la très belle prestation de l'anglais à la Maroquinerie de Paris en mars dernier pour nous présenter lechyd da. Avec une petite heure de set, Bill se concentrera donc à part égale sur son dernier opus et ses précédents disques en allant chercher quelques anciennetés dont il nous avoue devoir les réviser ardemment avant les concerts. Avec Christinha ou Wild Roses, le chant tout en douceur et fragilité de Bill Ryder-Jones, ses airs d'éternel rêveur et les magnifiques harmonies de sa guitare nous permettent de passer un moment solaire, nichés au creux de ce magnifique jardin.


Nous repartons gorgés de bons sentiments vers la scène Woods pour l'univers, celui-ci beaucoup plus salé, de CMAT. Nouvelle égérie de la musique féministe irlandaise, dotée d'un sens du sarcasme et de l'auto-dérision qui la rendent tout bonnement savoureuse, Ciara Mary-Alice Thompson, accompagnée de cinq musiciens arborant tous un tee-shirt à son effigie, va apporter un peu de piment à l'ambiance encore très bucolique de ce début d'après-midi. Avec sa pop teintée de country, santiags, collant rouge, mini short et bandana noué au cou, CMAT déroule une heure de ses meilleurs titres dont les polissons I Wanna Be A Cowboy Baby! et Have Fun. CMAT ne fait pas dans la dentelle, hormis celle qu'elle porte négligemment sur elle, et nous offre un show débridé en dansant de tout son soul, imitant Elvis Presley devant un miroir géant et appelant le public à plus de bienveillance. Une artiste qui marque les esprits et dont la personnalité chatoyante se marie parfaitement avec le festival.


On rebrousse à nouveau chemin, tout en prenant quelques minutes pour un arrêt aux toilettes sèches, seuls moyens de commodité écolo sur le site et au bar qui propose en toute évidence des breuvages locaux et non sulfatés. Retour à la scène Garden pour retrouver notre gallois préféré, Gruff Rhys. La sortie de Sadness Sets Me Free en tout début d'année et une rencontre avec l'artiste nous avait plus que charmé à nouveau. Chantre d'une poésie moderne et toujours caustique, à nouveau armé de sa traditionnelle casquette moche, Gruff Rhys aborde pour cette tournée avec ses musiciens un costume d'ouvrier tout en blanc, avec le logo d'une entreprise factice « GR Entreprises », que ce dernier décrit comme fournisseur de musique pop. Une heure qui nous fera enfin découvrir sur scène Sadness Sets Me Free, Loan Your Loneliness ou Silver Lining (Lead Balloons) issus du nouveau disque. Malheureusement programmé en mars à Paris le même soir que Depeche Mode, notre joie d'enfin retrouver le pape de la scène Cool Cymru n'en est que plus forte. Pang!, album tout en gallois paru en 2019, est lui aussi mis à l'honneur et les voisins anglais semblent apprécier d'entendre le leader des Super Furry Animals mettre sa belle langue natale à l'honneur. Un moment magique et un musicien que l'on attend de nouveau rapidement chez nous.


Un petit quart d'heure s'écouLe et nous changeons à nouveau totalement d'ambiance dans la tente de la scène Folly pour retrouver les très prometteurs Gurriers. La prestation des Irlandais lors de leur passage au Supersonic de Paris nous avait tous littéralement collés sur les fesses tant l'énergie tout comme l'intelligence de leur répertoire sont bluffant chez un tout jeune groupe. Leur premier album Come And See à paraître très prochainement, le concert donné fait office de répétions. Il est toujours amusant d'observer le groupe juste avant d'entamer les hostilités (les balance se faisant entre chaque concert devant les spectateurs) et le calme olympien qu'affiche notamment Dan Hoff le chanteur qui, comme Clark Kent, se métamorphose dès qu'il ôte ses grosses lunettes en écailles en super héros punk. Un set court mais intense, avec les excellents singles Nausea, No More Photos, Top Of The Bill et Close Call. Pas une seconde de répit offerte aux spectateurs, Dan se jetant dans la foule dès le second morceau, haranguant à tout va et entrant presque en transe au son de son punk noisy et délicieusement sombre. Une rage nécessaire de nos jours et un retour sur scène en tête d'affiche très attendu cet automne en France.


Autre chapiteau, autre groupe irlandais. Nous continuons notre périple grosses sensations avec SPRINTS, qui se produisent au Big Top, à la décoration très baroque inspirée de l'univers de Tim Burton. SPRINTS ont sorti un des meilleurs albums en ce début d'année (Letter To Self, paru le 3 janvier) dixit certains de nos collègues, critique que nous validons au risque de trouver du sel dans notre café. Le groupe mené par la flamboyante Karla Chubb n'a eu de cesse depuis l'an passé de se produire aux quatre coins de l'Europe, rendant leur set de plus en plus carré et efficace. Dans la semi-pénombre du chapiteau, le groupe délivre une heure de concert avec la quasi-intégralité de son répertoire. Sans fioritures, on note cependant une certaine lassitude dans les gestes et même le chant de Karla. Enchaînant concerts, festivals et promotion, le groupe se donne les moyens de réussir mais peut-être au détriment d'une vitalité qui leur a manqué ce soir. Un peu en automatisme mais néanmoins fidèles à leur public, nous souhaitons à SPRINTS de prendre un repos bien mérité avant de remettre le couvert avec, nous l'espérons, un nouvel album prochainement.


Place aux stars de la soirée sur la scène Woods en cette nuit maintenant tombée complètement avec IDLES. Les doudounes sont de rigueur avec un sympathique 14 degrés au compteur, les thés, cafés et cidres chauds sont légion et la petite colline qui, à ses pieds renferme la scène, se remplit très rapidement. Joe, Mark, Lee, Jon et Adam sont à nouveau au rendez-vous et malgré une feuille de route qui ne leur a laissé que quelques instants de repos, sont au sommet de leur forme. Mark aborde ce soir sa robe meringue rose métallisé, le cheveux court et la moustache encore plus fournie, le sourire radieux et s'empresse dès les premières notes de IDEA 01 de poser l'ambiance derrière son clavier. Dans la pénombre, le reste du groupe entre sur scène, et Joe Talbot mènera de là le show tout en entrecoupant ses titres de nombreux discours en faveur de la Palestine, en appelant à la bienveillance, et s'amusant du public du End Of The Road qui rechigne à se séparer un deux comme il le demande systématiquement en début de concert.
Une setlist uniquement faites des principaux tubes et des singles de TANGK, tels POP POP POP, Gift Horse, Dancer ou Gratitude. Le show est extrêmement rodé, quitte à peut-être faire ressentir parmi les spectateurs un peu de déjà-vu. Ce sont en effet les mêmes speechs et les mêmes incursions dans la fosse aux mêmes moments qui religieusement ponctuent le set, au risque de ne plus convaincre comme aux premier jours les fidèles du groupe. Cependant, l'honnêteté et la rage intelligemment distillée par Joe et sa bande ne peuvent que mettre tout le monde d'accord : IDLES ont gagné à la sueur de leurs fronts des lauriers qu'il sera difficile de leur ôter.


Pour finir la soirée, quoi de mieux qu'une bonne grosse dose de nonchalance et de charme de supermarché ? Direction le Big Top et son atmosphère moite de cave du 9.3 pour Baxter Dury. Vu dans de toutes autres conditions le week-end précédent à Rock en Seine, alors en plein cagnard pour un set de seulement quarante minutes, Baxter Dury en tant que dernier gros concert de la soirée met les bouchées doubles, accentuant encore plus les gestes et danses suggestifs, les grimaces et autres regards un brin lubriques, s'amusant de cette scène très grande qu'il parcourt en courant de gauche à droite sans arrêt face à une petite horde de fans déchainés.
Ces derniers reprennent en chœur Miami, I'm Not Your Dog, Cocaine Man et le dernier single issu de I Thought I Was Better Than You, Celebrate Me, totalement en phase avec le jeu de scène du chanteur. Avec à nouveau à ses côtés la très raffinée Fabienne Débarre, le show est tout aussi élégant qu'outrancier, et c'est exactement cet étrange mélange des genres que nous adorons chez Baxter Dury, un artiste complètement à part sur la scène anglaise actuelle.

En action depuis 13h30, c'est donc onze heures plus tard que nous regagnons nos peinâtes, les jambes déjà en coton, ce qui n'augure rien de bon pour la suite, mais surtout avec un sentiment plein et entier de satisfaction. Quelques heures de sommeil seulement pour cause de réveil à programmer pour tenter de décrocher le sésame Oasis-ien et une troisième journée tout aussi riche qui nous attend de pied ferme.
artistes
    IDLES
    SLEATER KINNEY
    CMAT
    NUSANTARA BEAT
    MRCY
    HOLIDAY GHOSTS
    LANKUM
    ALABASTAIRE DEPLUME
    GRUFF RHYS
    BILL RYDER-JONES
    MARY LATIMORE
    SARAH HALGAN
    KASSI VALAZZA
    YU-SU
    BAXTER DURY
    SPRINTS
    PARANOID LONDON
    JAMES HOLDEN
    HOTWAX
    SEXTILE
    KING HANNAH
    SENYAWA
    HEARTWORMS
    DURRY
    GURRIERS
    HOUSE OF ALL
    RVG
    WINE LIPS
    MUY ZYU
    HELLO MARY
    THE SHITS
    CLARISSA CONNELLY
    JESS WILLIAMSON
    MARY ELIZABETH REMINGTON
    ML BUNCH
    CHANEL BEANS
    COLOSSAL SQUID
    BLUE LAKE
    JOE GIDEON
    EX-EASTER ISLAND HEAD
photos du festival