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Peter Doherty

Paris, Olympia - 21 mars 2012

Live-report par Anne-Line

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Pour une fois, Peter Doherty avait le rôle du mec sympa. Dans un renversement de rôle assez cocasse, les organisateurs du tremplin Rock The Gibus lui ont demandé de remplacer Nina Hagen pour clore la grande finale à l'Olympia ce soir. L'occasion pour lui de tester face public parisien les nouvelles chansons écrites récemment et jouées lors de concerts à Londres ces derniers mois. Jusque-là, tout paraissait prometteur, Peter étant un grand amateur des shows à la dernière minute. Mais voilà, tout ne se passe pas toujours comme prévu.

Tout d'abord, le public présent à l'Olympia ce soir est un public typique de ces fameux tramplins. À savoir que ce sont majoritairement des parents et autres membres de la famille venus admirer leur progéniture jouer dans une salle, et qui s'en vont une fois la prestation de leur rejeton terminée. Et quand ce ne sont pas des membres de la famille, ce sont des camarades de classe, qui eux aussi vont avoir cours demain matin, et n'ont pas tous la permission de minuit. A l'entrée, la plupart des personnes présentes pour voir Nina Hagen tentent de revendre leur place, mais les amateurs se font rares. Autant dire qu'à l'heure où Peter Doherty se présente sur scène, après l'annonce des gagnants (Big Money Makers), la salle est à moitié vide. Il est à peine 22 heures.

Plein d'enthousiasme et frais comme un gardon (enfin, aussi frais que peut l'être un gardon du monde de Doherty), l'anglais arrive sur scène, armé uniquement d'un guitare acoustique et d'un chapeau. Il commence son set comme il l'avait fait la semaine passée au showcase privé donné pour le lancement de sa ligne de vêtements pour The Kooples, avec une nouvelle chanson qui n'a pas encore de titre et dont les paroles du refrain sont « Nothing ever comes to nothing without my baby ». Frais et enjoué, ce morceau prometteur est un bon choix pour débuter un concert. Plein de confiance en lui, Peter enchaîne sur une chanson, qui en est à un stade si embryonnaire qu'elle tient plus de l'improvisation, basée autour du morceau Make Me A Pallet On Your Floor du bluesman Mississipi John Hurt.
Sans doute habitué à susciter l'hystérie quoiqu'il fasse, il est loin de se douter que le public présent, déjà assez clairsemé, ne lui est pas entièrement acquis. Commencer un set par deux chansons inconnues dans ces conditions tient du suicide. Après avoir joué des morceaux plus familiers, dont deux parmi ses plus emblématiques, à savoir Albion et Death On The Stairs, on se dit que cela va peut-être fonctionner, mais au milieu du quatrième morceau, ce qui devait arriver arriva : une bagarre éclate dans le public. Peter s'arrête de chanter et demande au micro ce qu'il se passe, les causes exactes ne sont pas claires. Dans un élan très professionnel, il déclare « Ce n'est pas la guerre ! » (en français dans le texte) et continue son morceau comme si de rien n'était, mais l'atmosphère s'en retrouve viciée de manière irréversible.
En poursuivant avec What A Waster, sans doute son morceau le plus apprécié, il pense sûrement pouvoir retourner la situation, mais mis à part quelques rares aficionados au premier rang, le public reste de marbre, et quelques sifflets se font même entendre. Perdant un peu de son sang-froid, il déclare alors qu'il a fait l'effort de venir en acceptant un cachet beaucoup plus réduit que ce qu'il prend d'habitude, et adresse un bras d'honneur à quiconque ne serait pas content.

Après cela, le public est irrémédiablement divisé en deux parties : une qui écoute (minoritaire), et une autre carrément hostile. Peter tente une dernière tentative de réconciliation en introduction de Tell The King, en jouant Mes Copains D'Abord de Brassens, dans un français-yaourt assez comique, mais rien n'y fait. Même lorsqu'il fait venir sur scène la chanteuse Marie Flore, pour l'accompagner sur le morceau Sheepskin Tearaway, la malchance le poursuit. Le micro de la belle, à la voix déjà très délicate, ne semble pas marcher correctement, et le morceau tombe un peu à plat. Sans se démonter, le rockeur bien décidé à ne pas se laisser faire, se lance à nouveau dans les inédits, dont Down For The Outing entendu à quelques reprises lors de récents concerts, notamment au Brixton Jamm en janvier dernier. Autant dire qu'à ce point-là, la cause est totalement perdue. Pas rancunier, le britannique se lance dans une apologie du public français, d'habitude si bon pour lui. Le plus dommage dans tout cela ? Le jeu du bonhomme ce soir est assuré, clair, il ne perd pas le fil de ce qu'il fait, il improvise parfois, certes, mais en gardant le contrôle. En un mot, le concert est assez bon. Il se termine avec Can't Stand Me now et Beg, Steal Or Borrow, deux de ses crowd-pleasers les plus appréciés.

Pour un artiste beaucoup plus habitué à devoir gérer un public parfois trop enthousiaste, Peter Doherty a su garder la tête froide. Il est juste dommage que lorsqu'il se décide enfin à jouer de nouveaux morceaux, trois ans après son album solo, les conditions lui soient si défavorables. On pourrait même se poser la question : Qui attend encore aujourd'hui un nouvel album de Peter Doherty ? L'avenir nous dira si le fiasco de ce soir n'était qu'un accident passager, ou bien le signe d'un déclin définitif dans le cœur de son public préféré, le public parisien.
setlist
    New song
    Make Me A Pallet On Your Floor (Mississipi John Hurt cover)
    Albion
    Unbilotitled
    Death On The Stairs
    The Lost Art Of Murder
    What A Waster
    Hooligans On E
    Tell The King
    Sheepskin Tearaway
    New song
    Down For The Outing
    Can't Stand Me Now
    Beg Steal Or Borrow
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