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Everything Everything
Breton
Foals

Paris, Zénith - 12 novembre 2013

Live-report par Julien Soullière

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L'homme prend place parmi les convives, encore peu nombreux à cette heure, et éparpillés au-devant de la grande scène. Ses yeux tournoient, encore et encore, le regard empli d'une tension incontrôlable, mais pas franchement inhabituelle chez ce grand timide. Il n'attend pourtant personne, pour le moment du moins. Simplement, il lui faut se nourrir de chaque parcelle de la salle, jusqu'à l'excès, comme si quelqu'un allait sous peu faire son arrivée, aller jusqu'à lui, lui bander les yeux, lui poser des questions très précises sur ce qu'il avait vu et entendu, tout en lui faisant remarquer que la moindre erreur mettrait bien évidemment sa vie en jeu. Pris d'un coup de froid soudain, l'homme prend soin de remonter la fermeture éclair de sa veste. Bizarre, car en temps normal, et en pareille circonstance, il se serait depuis longtemps déjà dévêtu.

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Les lumières se taisent soudain, et quelques onomatopées se font alors entendre, émanant chaotiquement de la mase informe et vivante formée autour de l'homme discret. Les membres d'Everything Everything s'élancent, leurs pieds foulant avec assurance l'aluminium recouvrant la plateforme, et ce jusqu'à atteindre leurs instruments respectifs. Sans même considérer le public qui leur fait face, les anglais balancent dans le puits de leur premier album un sceau qui ramène à nous un Final Form à l'image de ce groupe pop, fantasque, et dont la musique crépite au point de déborder de couleurs et d'images.
Armé de titres toujours très dansants, ce sera d'ailleurs le gimmick du soir, le quatuor semble être du goût de l'assistance. L'homme n'essaie plus de cacher le sourire qui, jusqu'ici, tentait sans succès de s'inviter au bord de ses lèvres. La voix bipolaire de Jonathan Higgs est originale, bien en place, capable de bien des montées dans les aigus (cela pourra en irriter certains, d'ailleurs), et l'homme ne peut s'empêcher d'apprécier tout particulièrement ce numéro d'équilibriste, et de le considérer comme parfaitement en phase avec les rythmiques saccadées et joueuses proposées par le groupe. A l'occasion des titres les plus connus d'Everything Everything, Kesomabe et Cough Cough en tête, l'ambiance se fait même plus chaleureuse encore, et les pieds de l'homme à la doudoune commencent à perdre patience. Il leur faut danser. Tant mieux, il semble que ce soit la bonne soirée.

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War Room Stories. C'est là le nom du second et très attendu album de Breton. L'occasion est donnée ce soir de découvrir quelques-uns de leurs nouveaux morceaux, et en cela, l'homme est des plus impatients. Si ça n'est pas la foule des grands soirs, de grandes bâches de dissimulation recouvrant quelques pans de l'imposante estrade, la foule dans laquelle l'homme s'est immergé a grossi au fur et à mesure des minutes, atteignant désormais une taille plus que respectable. Conséquence directe du temps qui avance, les alcools et autre substances ont à ce stade déjà fait leur travail, et quelques esprits commencent tout naturellement à s'échauffer. Les voix portent, les corps s'agitent, et, sur scène, les roadies s'activent pour permettre au second concert de la soirée de démarrer à temps. Ce qui arrivera, pour le plus grand plaisir de l'homme, rejoint depuis par un ami qui, lui, ne connait pas encore la formation menée par Roman Rappak.
Pour la seconde fois de la soirée, les lumières s'en remettent aux ombres. L'excitation qui assiège depuis plusieurs minutes déjà le corps de l'homme atteint désormais son paroxysme. La retraite n'est plus envisageable, la guerre sera totale. Et Breton l'engage dès son entrée en scène, dégainant le furieux Got Well Soon pour le plus grand plaisir d'un public qui a déjà bien digéré le morceau en question. Comme à leur habitude, les laborantins s'exécutent dans une quasi-obscurité, avec un Ian Patterson légèrement excentré par rapport au reste de la troupe, et un drap blanc tiré en fond de scène pour mieux nous abreuver d'images. Comme toujours en live, le chant de Rappak n'est pas sans poser quelques problèmes, parfois trop limité, parfois trop en retrait par rapport à l'instrumentation. Par chance, un équilibre se profile, et les quelques réglages encore nécessaires (que de grésillements sur le titre d'ouverture !) ne sont bientôt plus que de l'histoire ancienne. L'homme est rassuré, et c'est dans le meilleur état d'esprit possible qu'il se laisse porter par les titres racés et multiculturels de Breton, qui naviguent ce soir entre titres phares de leur premier opus, et quelques nouveautés, dont le foutrement triste 302 Watchtowers et le sautillant Envy, dévoilé quelques jours auparavant par le groupe. Le set, bien que court, semble faire son petit effet. Plusieurs fois, l'homme espionnera son ami, posté à sa gauche, pour tenter de déchiffrer un quelconque signe dans son regard. Ce sera facile, et sans appel : il n'en peut plus d'adorer.

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Cette fois ça y est, il est temps. Foals sont les prochains sur la liste, et le public ne tient plus en place. L'homme s'écarte d'une zone qu'il identifie désormais comme dangereuse, c'est comme ça, il n'a plus vingt ans. Ce faisant, il prend aussi ses distances vis-à-vis des énormes enceintes qui surplombent la scène, ce qui ne fera pas de mal à ses oreilles dénudées ce soir de protections auditives.
C'est fou, le temps semble ne pas vouloir filer à l'anglaise, mais il suffira que l'homme se fasse cette remarque pour que les hostilités commencent par le biais de sonorités synthétiques assourdissantes, et d'effets de lumière pour le moins hypnotiques. Tout ceci semble durer une éternité, et c'est un véritable soulagement pour l'homme que de voir arriver sur scène, les uns après les autres, les membres du groupe après toutes ces longues minutes d'attente. Sous des tonnerres de cris et d'applaudissements, Foals livrent alors un Prelude des plus efficaces dans ce rôle qui consiste à faire monter la tension et à donner un petit aperçu de ce que sera un concert une heure durant. Et ce soir, celui-ci ne sera pas moins qu'un concentré de musique malicieuse, jouée fort, fort bien, et en capacité de donner la bougeotte à la plus hermétique des personnes de l'assistance.
Véritable rétrospective de leur discographie, le set ne connaitra aucun temps mort, alternant les titres les plus représentatifs de leur début de carrière (Hummer, Olympic Airways, Red Socks Pugie), avec des morceaux plus récents, et symboles de leur nouvelle orientation artistique. Le temps passe, et l'homme, pourtant fin limier, ne parvient pas à déceler la moindre faille ou faute de goût. Le tout est parfaitement rodé, trop peut-être (mais ces automatismes sont le lot de tous ces groupes à succès qui tournent, jusqu'à trop tourner peut-être), et même Spanish Sahara, certes sublime, mais pourtant en rupture complète avec la folle énergie dégagée par le reste de la setlist, ne parviendra pas à faire décrocher l'assistance. Peu adepte de la parlote, le groupe peut néanmoins compter sur le punch, canalisé mais néanmoins communicatif de Yannis Philippakis, le leader étant toujours prompt à arpenter la scène et à se donner à la foule. Alors, certes, il n'y a rien de très punk là dedans, et l'homme aura beau avoir entendu dire que le groupe était moins ne forme ce soir qu'à d'autres occasions, des concerts aussi jouissifs, il en ferait volontiers plusieurs par semaine.

Il ne faudra pas attendre longtemps pour que l'homme sorte de sa torpeur, une fois les lumières ramenées à la vie. D'un pas pressé, il se dirige vers la sortie, soucieux de rejoindre la station de métro la plus proche. La soirée, pour lui, ne fait que commencer.
setlist
    EVERYTHING EVERYTHING
    Final Form
    Photoshop Handsome
    Schoolin
    Kemosabe
    Radiant
    Cough Cough
    Don't Try

    BRETON
    Got Well Soon
    Pacemaker
    Edward The Confessor
    302 Watchtowers
    Envy
    Ordinance Survey
    Jostle
    15 Mins

    FOALS
    Prelude
    Hummer
    Olympic Airways
    My Number
    Miami
    Milk & Black Spiders
    Providence
    Spanish Sahara
    Red Socks Pugie
    Late Night
    Inhaler
    --
    The French Open
    Two Steps, Twice
photos du concert
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