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Gold Panda

Paris, Flèche d'Or - 18 novembre 2013

Live-report par Xavier Turlot

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Le lundi n'est sans doute pas le jour idéal de la semaine pour organiser une soirée électronique, mais dans les capitales rien ne s'arrête jamais vraiment et Paris ne déroge pas à la règle en accueillant le talentueux Gold Panda à la Flèche d'Or.

La foule est plus que clairsemée quand Infinite Livez, anglais émigré à Berlin et signé sur Ninja Tunes, attaque son introduction. Expérimental est un euphémisme si l'on cherche à qualifier ses constructions sonores. Vinnie Tiefilz battit ses morceaux comme il dessine, brique par brique, lentement, les élevant comme un château de cartes, pour en faire des créatures biscornues et angoissantes. Balançant une ligne de basse, il l'agrémente de boîtes à rythmes déconstruites et bruitistes, enregistrant en live une boucle de chant et se consacrant ensuite à l'ajout de touches électro décadentes tout en triturant les pistes précédentes. L'Anglais ne fait pas dans la dentelle, les sonorités sont abruptes et tranchantes et les schémas qu'il emprunte ne sont jamais ceux auxquels on s'attendrait. S'il se débrouille très bien avec ses machines, on peut quand même regretter que l'accent n'ait pas plus été mis sur son excellent flow et ses compositions comico-obscènes comme The Adventures Of The Lactating Man ou R Yeah.

On peut palper les 150 000 « likes » de Gold Panda sur Facebook à travers la foule qu'il est parvenu à faire se déplacer en cette sortie de week-end. Le Britannique a su attirer des fans autour de ses expériences électroniques, puisant autant dans la house et l'ambiant que dans les musiques traditionnelles extrême-orientales. Se plaçant sans solennité derrière ses mètres de câbles, Gold Panda entame son set aussi aérien qu'expérimental, présenté comme un voyage à l'aide de vidéos psychédéliques multicolores et flashy qui se marient à merveille avec ses sons alambiqués.
Chimiste confirmé en électro, son passage à la School of Oriental and African Studies a laissé des traces. Les samples d'orgue traditionnel, de violon et de cithare sont omniprésents entre les beats syncopés et les basses analogiques. Jonglant entre ses installations et se déhanchant sur ses constructions, Gold Panda se donne à fond et se perd presque dans ses interprétations, terminant parfois les morceaux de manière abrupte par un sur-ajout d'effet qui perd les pédales. A la fin de chaque piste il lève irrémédiablement les deux pouces en baissant la tête, révérence au public qu'il semble remercier avec une infinie politesse.
Junk City II, tiré de son dernier album Half Of Where You Live, remporte un énorme succès chez le public avec sa ligne entêtante et sourde ; de même pour la géniale You tirée de Lucky Shiner et son sample vocal qui rend fou. Derwin (son nom dans la vie civile) triture chaque piste en les passant à la moulinette d'effets : reverb, cut off, accélération/décélération, remodelant tous les côtés de ses compositions malléables. Ce positionnement à la frontière de la house, de la post-dubstep et d'aspects plus glitch, captive. Non sans évoquer son compatriote Four Tet, il mêle percussions cristallines traditionnelles et kicks électro, recrée des bugs, change le tempo...

Puisant dans ses deux albums et ses innombrables compilations et remixes, il offrira presque deux heures de live à l'auditoire de la Flèche d'Or, finissant par une version endiablée de Win-san Western et son rythme drum'n bass anarchique avant de lever ses deux pouces, hocher la tête et s'éclipser derrière le rideau.