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Savages

Paris, La Gaîté Lyrique - 21 mars 2014

Live-report par Mélissa Blanche

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Pour le dernier concert de sa tournée européenne, c'est à la Gaité Lyrique que Savages se produisent ce soir. Mais au fait, c'est qui, Savages ? Eh bien, Savages, pour faire simple, c'est un groupe de post-punk formé à Londres et qui s'est fait beaucoup remarquer avec son premier opus Silence Yourself, sorti en mai dernier. Et puis, petit détail qui n'en est pas un, Savages c'est un groupe entièrement féminin, ce qui est assez rare pour être noté. Et Dieu qu'il est bon de voir évoluer ces femmes qui ont tant d'allure, d'assurance et de talent, tant cela change de ce qu'on veut bien nous présenter dans les médias.

Quiconque est venu pour Savages ce soir, aura néanmoins quelques surprises avant d'entamer le concert. La première : un spectacle de danse contemporaine qui démarre de manière totalement impromptue en plein milieu de la salle – je dis bien la salle et non pas la scène – c'est-à-dire au beau milieu des spectateurs réalisant progressivement que, non, ces gens étranges qui marchent pieds nus à côté d'eux n'ont pas simplement oublié leurs chaussures. La Gaité Lyrique est un lieu culturel qui fait la part belle à tous les arts, du jeu vidéo au cinéma en passant par les arts graphiques et les concerts ; aussi est-il assez normal, finalement, d'assister à un tel spectacle.
Celui-ci s'engage sur fond de bruits industriels répétés et inquiétants. Les mouvements sont durs et saccadés, comme une version dansée du post-punk. Un spectacle de danse anxiogène, et sans aucune narration, qui laissera perplexe les profanes. « On se croirait sur Arte très tard le soir » commente une femme à mes côtés. Je pense que tout est dit.

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Deuxième (très heureuse) surprise : le duo australien The Dead Forest Index, sublime – aux atmosphères noires, sauvages, désertiques, servies par un son minimaliste, brut et électrique.

Mais trêve de bavardages : c'est de Savages qu'il faut parler maintenant. Je l'ai dit et le répète, on aimerait voir plus de groupes féminins qui ont cette gueule-là. La chanteuse, française, Camille Berthomier alias Jehnny Beth, sera notre interprète ce soir. Cheveux courts, allure fière, mais sans pour autant abandonner sa féminité et ses chaussures à talons, c'est elle qui dicte les règles. Post-punk oblige, l'ambiance est sombre et le groupe nous délivre une musique noire, introspective, brutale et furieuse, à la Joy Division et Siouxsie And The Banshees. Cela n'empêche pas la chanteuse de se déhancher, avec naturel, sans jamais adopter une posture de violence ou de provocation.

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L'esthétique est travaillée : la chanteuse est habillée en noir et blanc tandis que les trois autres sont tout de noir vêtues. Sous le jeu des lumières et des fumées, on croirait que la batterie va s'enflammer, et il faut dire que la batteuse met le feu avec son énergie et son jeu brutal. Au bout de quelques morceaux, Jehnny Beth nous fait une confession. Il y a des gens qui envoient des SMS au premier rang et ça ne lui plait pas. « J'ai besoin de vous ! J'ai besoin de vous, vous comprenez ça ? », lance-t-elle avec force – entre aveu de faiblesse et menace autoritaire. Et elle de continuer en nous disant, d'une voix qui se fait plus douce, qu'elle va être triste si on ne s'y met pas vraiment. Terriblement sincère ou terriblement habile, l'intermède aura au moins permis de réveiller la foule. S'en suivent des « bravos » lancés par-ci par-là lors du morceau suivant et une fosse qui commence progressivement à pogoter, les téléphones désormais bien rangés dans les poches. « You're getting there » commente-t-elle alors que la foule commence véritablement à s'échauffer.

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La suite du concert se passe sans incident. Le groupe jouera la quasi-intégralité de son album. Le concert s'achève sur le single Fuckers. La chanteuse annonce la couleur, ou plutôt le tempo : « C'est le dernier morceau... mais il est long. On prend tout notre temps ». Et en effet, les quatre musiciennes font monter la sauce pendant plusieurs minutes, avant de véritablement lancer le titre. Il n'y aura strictement aucun rappel, faute de matière supplémentaire, au grand dam d'une spectatrice qui s'en plaindra longuement aux techniciens, impuissants.

Savages auront ce soir fait honneur à leur excellent premier album, et se placent comme un nouvel incontournable du post-punk anglais.
setlist
    I Am Here
    Flying To Berlin
    Shut Up
    I Need Something New
    Strife
    Waiting For A Sign
    She Will
    City's Full
    No Face
    Husbands
    Hit Me
    Fuckers
photos du concert
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