Tom McRae, encore un jeune et mignon britannique qui fait de la folk, non ?
Non, pas vraiment. Le monsieur débute sa carrière quinze années plus tôt en gravant dans le marbre deux pépites de pop/folk mélancolique :
Tom McRae en 2000 et
Just Like Blood en 2003, et traine depuis ses ballades aussi désespérées que majestueuses, soutenues par sa voix corrodée, riche en subtilités fascinantes, au fil d'une carrière pourtant en montagnes russes. Mais qui peut se vanter de faire systématiquement l'unanimité ?
Did I Sleep And Miss The Border? est le septième opus de Tom et certainement le plus controversé, où, ce qui autrefois brillait de spontanéité semble avoir laissé place aux démonstrations de lyrisme superficielles et incohérentes. Toujours fort d'émotions sur le fil et d'un charisme de prédateur, le songwriter s'accompagne du Standing Band, un collectif de musiciens anglo-saxons, avec qui il prend la route pour cette courte tournée, marquant un arrêt par le Trabendo.
Quand l'auditoire tombe dans l'obscurité, le piano fait d'abord son entrée, seul, pour lever le voile sur les nouveaux morceaux de l'artiste. Les autres instruments se joignent tour à tour à la voix écorchée vive de Tom, qui se charge tranquillement de faire monter la pression et d'installer un silence de cathédrale durant
The Dogs Never Sleeps et
We Are The Mark.
Prêcheur des tourments et errances qui nourrissent les plus vives passions, ce dernier les explore, les provoque et les manipule sans vergogne dans une messe orchestrale qui manque cruellement de modulations. Dans le public, l'ennui s'insinue sans crier gare et prend doucement ses aises. Il fait bailler, laisse les pensées s'échapper et toise d'un sourire en coin le chanteur quand il délaisse ses mélodies pour tenir son microphone tel un rappeur (
The High Life) et tente des figures scéniques qui auraient d'avantage leur place à un concert d'AC/DC au Wembley Stadium.
C'est à la limite du décrochage que Tom McRae propose l'emblématique
End Of The World News (Dose Me Up) où il divise l'assemblée pour qu'elle reprenne les paroles en harmonie. Celle-ci accueille avec un enthousiasme prononcé les titres issus des premiers albums, où l'acoustique est sublimé et la guitare prend toute sa mesure mélodique (
Walking 2 Hawaii, A&B Song), ainsi que
Hoping Against Hope et
Christmas Eve, 1943, (issus tout deux de
Did I Sleep And Miss The Border?), qui se révèlent de toute beauté en live.
Réuni autour de Tom dans l'écrin du Trabendo, le Standing Band joue les westerns spaghetti, pour interpréter
What A Way To Win A War en acoustique, juste avant un rappel grandiose où le public renoue, non sans allégresse, avec les cultes
Ghost Of A Shark et
The Boy With The Bubblegun.
Si Tom McRae semble, depuis quelque temps, avoir laissé échapper ce savoir-faire qui faisait dresser les poils en quelques mesures et textes percutants, certains fragments de magie restent bel et bien indélébiles, si infimes et fragiles soient-ils. De quoi se réchauffer le cœur pour le reste de la soirée.