Après la claque reçue avant l'été avec son sublime album
The Book Of Traps and Lessons, c'est avec le plus grand des plaisirs que nous tendons l'autre joue à Kate Tempest pour découvrir en live sa collection de cantiques intimes et puissants. Et nous ne sommes pas les seuls, car ça se presse au Trianon en ce lundi soir. On y croise d'ailleurs les fines lames du girl power engagé de Julia Lanoë à Virginie Despentes, évidentes cousines françaises tant littéraires que musicales de la jeune anglaise.
Nous nous demandions tout de même comment allaient être transposées en concert ces chansons avant tout destinées à une écoute attentionnée, bien calé dans son canapé, un dictionnaire Harper Collins Robert à la main et surtout comment allaient-elles cohabiter avec ses anciens morceaux bien plus hip-hop et enjoués.

Mais nos appréhensions furent vite balayées car nous allions tout simplement assister à deux concerts en un. Une première partie dédiée à ses anciens morceaux pour nous dégourdir les jambes, le sourire aux lèvres et une seconde partie consacrée à son nouvel album pour nous hérisser les poils, les larmes aux yeux.
Dans un décor minimaliste, toute de noir vêtue et simplement accompagnée d'une acolyte aux claviers et machines, Kate Tempest arrive sur scène sur le plus pertinent que jamais
Europe Is Lost, hymne prophétique annonçant l'ère actuel des Boris et Donald sont dans un bateau. Pas le temps de souffler, les titres seront enchainés sans répit, de l'explosif
Ketamine For Breakfast au grimesque
The Beigeness.
Deuxième partie, une salle, deux ambiances. Kate Tempest nous livre dans l'ordre, l'intégralité de son nouvel album. Mais bien loin d'un simple copier-coller du disque, chaque morceau déjà grand en studio va prendre sur scène une ampleur inattendue. Dès les premières mélopées de
Thirsty, morceau d'ouverture de
The Books And Traps and Lessons, le Trianon fait silence, captivé par le charisme hors norme de la Londonienne.

Sur les morceaux a cappella, comme
All Humans Too Late, Kate Tempest devient prêcheresse devant un Trianon médusé venant assister à un monday service tout en rage contenue mêlée d'une douce bienveillance. La grand-messe change subitement de ton sur l'avant dernier morceau, Holly Elixir, revisité dans une version électronique d'une folle intensité où nos jambes se réveillent à nouveau avant qu'un dernier People's Faces ne vienne terminer de scotcher la salle, bruler les cœurs et même faire couler quelques larmes. Moment suspendu, rare, qui se termine sur une standing ovation longue et sincère. Kate reviendra sur scène, non pas pour un rappel, pas le genre de la maison les faux départs, mais pour de beaux remerciements, visiblement émue de l'accueil qui lui a été réservé par le public parisien.
Grand concert, Grande soirée, Grande femme.